Le CGAAER prédit dans son rapport des impacts « lourds » dans toutes les dimensions du développement durable, tant sur le plan économique que social, environnemental et international. Par exemple sur le bassin de la Boutonne (à cheval sur la Charente et les Deux-Sèvres), les relations conflictuelles entre agriculteurs et associations environnementales, la perte de compétitivité serait de 10 % et à l’horizon de 2050 toute l’agriculture irriguée (20 % des exploitations) aurait disparu.

La fin de l’agriculture irriguée est également prédite dans la Beauce (première région irriguée de France avec 340 000 ha équipés), si rien n’est fait pour contrecarrer les effets du changement climatique. Dans les Hauts-de-France, le scénario du statu quo annonce une perte de chiffre d’affaires (cultures maraîchères et de semences irriguées sous contrat) de 14 millions d’euros par an sur l’agriculture et de 75 millions d’eurospar an pour l’industrie agroalimentaire.

Autres conséquences : dans la Drôme des collines, « la diminution préconisée de 40 % des volumes prélevables en eau aboutirait à court terme à des pertes de production (abricot, maïs…) équivalent pour ce petit territoire à 6 millions d’euros par an et à 10 millions d’euros en année sèche », selon le CGAAER. Tandis qu’en Lozère, le manque d’anticipation de l’impact du changement climatique sur l’utilisation de l’eau en agriculture engendrerait d’ici à dix ans une perte supplémentaire de 20 % du revenu agricole.

Des solutions sont possibles

Simplification des paysages, perte de biodiversité terrestre, risque de feux, d’inondations, pollutions de l’eau accrus sont d’autres impacts mis en avant par les rapporteurs. Ces derniers estiment toutefois que « des solutions sont possibles » mobilisant plusieurs types de leviers.

Le stockage d’une petite partie des excédents hivernaux est un exemple, pour un report d’utilisation aux périodes déficitaires afin de satisfaire les nouveaux besoins de l’étiage. « Sur la Boutonne, stocker 4 % des écoulements annuels permettrait d’éviter les assecs annoncés, de répondre aux besoins agricoles et de gagner en compétitivité, estime le CGAAER. Un tel taux (4 %) est faible en comparaison des taux observés en Espagne (Ebre : 50 %) ou au Maroc (Oum er Rbia : 200 %). » Le pompage dans les fleuves ou les nappes à ressources abondantes et/ou transferts de cours d’eau excédentaires vers des cours d’eau déficitaires, peut être une autre solution notamment dans la Drôme et les Hauts-de-France.

La sélection génétique et la promotion d’irrigation de précision permettaient d’améliorer l’efficience des apports d’eau. « Ils sont une condition au scénario d’anticipation, notamment ans la Beauce », estiment les rapporteurs. Quant à l’adaptation des systèmes de culture aux nouvelles conditions climatiques, elle fait partie des leviers de l’adaptation, par exemple en Lozère concernant les systèmes fourragers.

Autres solutions présentées : la baisse des débits d’objectif d’étiage, la valorisation des produits et préservation du foncier irrigué, ou encore l’émergence d’un nouveau dialogue sociétal et la promotion d’une approche d’économie verte « BRBS » (besoins, ressources, biens et services).

Sept recommandations

Pour bien anticiper les conséquences du changement climatique sur les utilisations de l’eau en agriculture, le CGAAER met en avant sept recommandations :

  • restaurer un dialogue interministériel agriculture-environnement,
  • porter le débat au niveau national (plan d’adaptation au changement climatique) et dans les régions volontaires,
  • refonder la politique de l’eau et sa planification (Sdage),
  • inciter les Régions et les territoires à prendre en main les stratégies et les projets d’adaptation,
  • mobiliser la recherche,
  • communiquer et former les jeunes générations,
  • développer une vision européenne et interrégionale sur l’eau, la sécurité alimentaire et le développement durable, en prenant notamment en compte le sujet dans la future Pac.

I.E.