La progression des cours est restée d’actualité cette semaine sous l’effet de la sécheresse en Australie, de la poursuite des négociations entre la Chine et les USA et de la révision en baisse des stocks de maïs US. Comme la semaine dernière, le colza ne suit pas la tendance pour l’instant.
La hausse se poursuit en blé
Les prix du blé ont augmenté de nouveau pour la cinquième semaine consécutive. Rendu Rouen ou rendu La Pallice, le blé français se situe aux alentours de 171 €/t (base : juillet), ce qui représente un accroissement de 4 €/t sur la semaine. Sur le Matif, la progression est un peu moindre après le léger retrait d’hier soir dans la foulée de l’affaissement de Chicago. En effet, le marché à terme US a clôturé en baisse après la publication des estimations mensuelles de l’USDA, le secrétariat d’État à l’Agriculture, le 10 octobre 2019.
L’organisme a revu en baisse de 0,6 million de tonnes la prévision des exportations de blé américain (à 25,9 millions de tonnes) en raison du manque de compétitivité des blés américains. Cet ajustement a conduit à une révision en hausse des stocks américains pour la fin de la campagne de 2019-2020. Néanmoins, la petite correction baissière qui en a découlé et qui a influé sur le Matif à la fin de la soirée n’a pas gommé les gains de la semaine. Le contrat de décembre a fini la journée du 10 octobre à 177 €/t (+75 cents par rapport au jeudi 3 octobre) et il est en train de remonter vendredi 11 octobre lors de la rédaction de cet article.
Une forte demande mondiale de blé
Même mouvement sur le marché mondial que celui observé en France : les prix ont gagné entre 2 $/t (blés russes et argentins) et 9 $/t (blé américain). La situation se dégrade encore en Australie à cause du temps sec et les perspectives de récolte ont été amoindries en Argentine même si des pluies sont revenues dans les principales régions productrices de blé.
La récolte russe sera finalement légèrement plus élevée que prévu (remontant vers le niveau de 75 millions de tonnes) mais cela ne suffit pour compenser les révisions en baisse de l’hémisphère Sud et une dégradation plus importante que celle prévue de la récolte turque. Il est à noter en effet que la Turquie a déjà importé plus de 3 millions de tonnes de blé depuis le début de la campagne, ce qui dépasse très largement les importations de l’an passé et devrait conduire le pays vers un record d’importations pour l’ensemble de la campagne. Avec une demande soutenue du Maghreb, de l’Afrique subsaharienne et de l’Asie, il se confirme que les échanges mondiaux de blé vont croître nettement pendant la campagne en cours.
Une situation encore haussière mais le Brexit comme aléa
Avec ses prix actuels, la France est bien placée pour en profiter, occupée actuellement par de nombreux chargements à destination du Maroc. Vu la demande mondiale qui se profile, il y a besoin que tous les grands pays exportateurs contribuent à la servir. Cela va conduire à des stocks très bas en fin de campagne dans les pays de la mer Noire d’une part. Et cela devrait conduire aussi les USA à exporter plus que l’USDA ne le prévoit actuellement et l’UE à écouler la plupart de son disponible exportable d’autre part, pourvu que ses blés restent attractifs.
L’ensemble de la situation demeure plutôt haussière surtout si l’Argentine, avec ses élections en fin mois, venait à modifier les règles qui s’appliquent aux exportations (possible remontée des taxes à l’exportation).
Le Brexit reste aussi un aléa de taille : sous l’hypothèse d’un Brexit sans accord, nous prévoyons que les exportations de blé du Royaume-Uni vers l’UE seront faibles à partir de novembre, tant que les prix anglais n’auront pas chuté suffisamment pour permette aux blés de l’outre-Manche de retrouver leur compétitivité malgré un droit potentiel d’importation de 12 €/t à l’entrée dans l’UE. Si un accord était finalement trouvé, le Royaume-Uni pourrait exporter plus que prévu vers l’UE et cela viendrait fortement concurrencer la France.
L’orge suit mais jusqu’où ?
Dans la foulée du blé et du maïs, l’orge aussi a poursuivi sa hausse cette semaine, les prix montant de 4,5 €/t rendu Rouen (162,25/t en base juillet) ou 6 $/t en position Fob (orge chargée sur un bateau) à 185 $/t.
Les orges françaises ont grimpé de concert avec celles de la mer Noire même si l’achat récent de l’Arabie – par le fait qu’il couvre les besoins du pays jusqu’au mois de février – indique que les importations de ce pays risquent d’augmenter moins fortement que nous l’avions prévu précédemment. Contrairement à celle du blé, la situation mondiale de l’orge s’annonce lourde, avec des stocks importants attendus dans l’UE à la fin de la campagne. Les prix pourraient donc se retourner rapidement.
Sur le créneau brassicole, les prix sont restés stables pour la récolte de 2019, limités par le fait que certains utilisateurs acceptent d’utiliser des orges à très faible taux de protéines (plus bas que normal), ce qui augmente l’offre brassicole disponible. À l’inverse, les cotations se sont appréciées sur la semaine pour les orges brassicoles de la récolte de 2020 avec une baisse de surface possible pour cette récolte de 2020.
Le maïs en hausse aussi
Après l’électrochoc de la semaine dernière (stocks de maïs américain moins forts que prévu au début de la campagne de 2019-2020), les prix du maïs ont continué à grimper sur le marché mondial, gagnant 2 $/t en Ukraine, 7 $/t aux USA et 4 $/t au Brésil. Les prix français se sont appréciés aussi mais la hausse a surtout concerné les prix du nord de la France (4 €/t Fob Rhin, à 165 €/t en base juillet) sans que les valeurs ne changent beaucoup dans le Sud-Ouest. Les récoltes de maïs grain ont timidement commencé dans le sud de la France et la récolte est attendue proche de 12 millions de tonnes, sans augmentation par rapport à 2018 malgré la hausse des surfaces ensemencées.
Les prix du maïs français vont rester influencés par le marché mondial et la situation aux USA. Hier, l’USDA, dans son rapport mensuel, a très légèrement réduit son estimation de la production de maïs américain mais la réduction a été beaucoup plus faible qu’anticipé par les opérateurs. Cela a fait baisser les prix sur Chicago sur le moment mais ces derniers se sont ré-orientés à la hausse aujourd’hui, tirés surtout par la révision en baisse des stocks de fin de campagne américains attendus pour septembre 2020.
Cet élément est important à souligner : la révision à la baisse des stocks américains est plus forte qu’on le prévoyait il y a quelques semaines et cela vient retirer un peu de lourdeur à un bilan mondial du maïs qui demeure toutefois bien approvisionné. Il n’y a pas de raison que les prix du maïs continuent à monter beaucoup, mais il suffirait que les récoltes se développent moins bien que prévu en Amérique du Sud, ou que l’USDA révise de nouveau – et plus fortement – en baisse la récolte US pour que les affichent un niveau sursaut.
Les cours du soja reprennent un peu de couleur
Portés par les perspectives de voir les Chinois de nouveau acheter du soja US et par la reprise des négociations commerciales entre les USA et la Chine, les cours du soja ont repris un peu de vigueur cette semaine. L’attention du marché est focalisée sur les discussions sino-américaines qui ont lieu en ce moment à la Maison Blanche. Autre élément de soutien, les conditions climatiques froides et humides sont attendues pour la fin de la semaine dans le Midwest, ce qui pourrait endommager les sojas non matures et retarder l’avancée des récoltes de soja. Enfin, sans surprise l’USDA a revu en baisse de 2,5 Mt (millions de tonnes) les stocks de la fin de la campagne US au 1er septembre 2018-2019. Cela réduit les réserves disponibles pour le début de la campagne de 2019-2020.
Par ailleurs, l’USDA a baissé son estimation des rendements du soja américain et des surfaces récoltées. Au niveau mondial, la production mondiale a été revue en baisse de 2,4 Mt, principalement aux USA. Cela a contribué à réduire les stocks mondiaux prévus à la fin de septembre 2020. Les cours sont ainsi remontés de 4 $/t sur le marché de Chicago.
Du côté Amérique du Sud, la sécheresse continue à persister au Brésil, et particulièrement sur l’État du Paraná. Cela retarde les semis de soja. La Conab (office gouvernemental brésilien) estime pour le moment la récolte de soja à 120,4 Mt, en hausse de 4,7 % par rapport à l’année dernière.
Les cours du tourteau de soja grimpent
Dans le sillage de la fève, les cours du tourteau de soja ont grimpé. Ils sont en hausse plus marquée (+7 $/t) sur le marché de Chicago. Les espoirs portant sur les négociations entre la Chine et les USA et la baisse de la production de soja US ont été des éléments de soutien aux cours du tourteau de soja cette semaine. En effet ces deux éléments plaident pour une moindre trituration américaine (et une production de tourteau inférieure par ricochet).
En France, les cours du tourteau de soja à Montoir ont augmenté de 6 €/t à 330 €/t.
Pois fourrager
Les prix du pois fourrager ont augmenté légèrement cette semaine de 1 €/t à 185 €/t départ Marne, là aussi sous l’effet haussier du marché du soja.
Les prix du tournesol sont en légère hausse en mer Noire
Le prix du tournesol en France pour des livraisons entre janvier et mars s’affiche maintenant à 325 €/t à Saint-Nazaire (cette cotation n’était pas disponible la semaine dernière).
En mer Noire, la récolte se poursuit, avec 83 % des surfaces récoltées en Ukraine et 40 % en Russie. Les rendements ukrainiens montrent un niveau inférieur à l’année dernière. En conséquence, les prix du tournesol en mer Noire ont augmenté de 5 $/t à 330 $/t sur la semaine. Du côté de la Russie, les coupes sont avancées à plus de 40 % avec des rendements supérieurs à l’an dernier.
Les cours du colza cèdent du terrain
Malgré la légère reprise des cours du pétrole, de l’huile de palme et du canola, les cours du colza sur le marché d’Euronext ont évolué en baisse de 2 €/t à 383,5 €/t. Cela résulte de la légère reprise de la parité euro-dollar.
Sur le marché physique les cours du colza ont poursuivi le même mouvement, en évoluant en baisse de 1 €/t, à 386 €/t, en rendu Rouen et de 3 €/t, à 387 €/t, en Fob Moselle.
Pour les huiles, les cours de l’huile de palme ont une nouvelle fois progressé à la suite de la publication des statistiques malaisiennes du mois de septembre par le MPOB (Malaysian Palm Oil Board). En effet, les stocks malaisiens de palme ont moins progressé que prévu entre la fin d’aout et la fin de septembre.
Du côté du Canada, les conditions climatiques un peu plus sèches de cette semaine ont permis une avancée des récoltes du canola, mais une vague de froid et de précipitations est attendue ce week-end dans le pays, ce qui pourrait de nouveaux retarder les récoltes.
À suivre : estimation de la récolte de maïs par l’USDA, politique à l’exportation de l’Argentine, taille des récoltes de blé en Australie et Argentine, conditions climatiques en Amérique du Sud, négociations commerciales US-Chine, Brexit.