La politique agricole commune ? Un sujet jugé trop aride par les télévisions qui n’ont pour l’heure pas souhaité diffuser le documentaire « La Négociation ». Heureusement, son réalisateur a su emprunter des voies parallèles pour donner à voir son film qui est tout, sauf une fiction, et qui pourrait intéresser les agriculteurs.

Nicolas Frank a suivi pendant neuf mois Stéphane Le Foll et son cabinet dans leurs déplacements à Luxembourg, à Bruxelles, à Paris et dans les Régions. Le film débute le 17 juin 2012, au Mans, au second tour des élections législatives. Le ministre est conforté, son gros dossier est désormais la réforme de la Pac.

Au cœur de la « machine » européenne

Le réalisateur se défend de tout activisme : « Mon documentaire n’est absolument pas militant. Je n’avais pas pour objectif de suivre l’homme, mais de filmer, à travers un ministre et son cabinet, le travail des politiques à Bruxelles, leur marge de manœuvre… Je voulais montrer ce qu’est la grosse machine européenne. Quel autre meilleur dossier que la Pac ? Ses enjeux économiques, sociaux et environnementaux sont énormes ».

Les agriculteurs ont aussi voix dans ce film, avec les témoignages notamment de Christian, un éleveur savoyard et de Pascal, un céréalier bio de l’Yonne.

Un processus démocratique mis à mal

Les 40 dernières minutes du film ont été tournées les 18 et 19 mars 2013 à Bruxelles. C’est la dernière phase (musclée) des négociations. « L’Europe n’est pas déconnectée des enjeux des agriculteurs, elle a la capacité de faire bouger les choses », explique Nicolas Frank.

Mais le film montre aussi que le processus démocratique n’est pas toujours respecté. Sur le couplage, tous s’entendent pour le passer à 15 %, sauf l’Allemagne. « Mais, pour des intérêts qui n’ont probablement rien à voir avec l’agriculture, l’Irlande qui préside alors l’UE, accorde ce pouvoir de veto à l’Allemagne. On n’est plus dans les règles du jeu », ajoute le réalisateur.

Conditions de tournage

Le ministère avait posé quelques conditions de tournage au préalable : pas de micro oublié, aucun propos sur la vie personnelle. Et une condition plus floue : ne pas mettre en péril les relations diplomatiques de la France. « Au final, aucune demande n’a été formulée », confie Nicolas Frank, si ce n’est le retrait d’une blague anecdotique d’un conseiller à l’égard d’une autre délégation.

« Le ministre et son cabinet ont fait preuve de transparence. Mais quand on y réfléchit, chaque élu la doit », précise-t-il.

Le documentaire est désormais en accès libre sur www.lanegociation.com.

Rosanne Aries