Pour la Fop (Fédération des producteurs d’oléoprotéagineux), « l’enjeu protéine est un point prépondérant de l’enjeu alimentaire des années à venir et doit être pris en compte comme tel dans la Pac, en particulier par le recouplage (des aides). Mais cela suppose la valorisation de la production des protéagineux, y compris dans le cadre des SIE (surfaces d’intérêt environnemental) au titre des préoccupations environnementales et l’accompagnement du développement de filières européennes » comme le soja.
« Il y aura une vraie tension sur les protéines à court et moyen terme, a observé Gérard Tubéry, président de la Fop (1). La population mondiale progresse, les régimes alimentaires évoluent ; il y aura donc un appel important pour de la protéine végétale. Or, la principale protéine échangée est le soja produit en Amérique du Sud. »
Ne pas casser la filière des biocarburants
Pour Gérard Tubéry, « la France doit se saisir de cet enjeu » en défendant notamment l’incorporation des biocarburants de première génération comme le biodiesel. « Les biocarburants, qui produisent de l’huile et des protéines, doivent être développés pour que la France et l’Europe soient moins dépendantes en protéines », soutient le président.
« Arrêtons de vouloir casser cette filière des biocarburants », a également insisté Arnaud Rousseau, vice-président de la Fop, rappelant la proposition de Bruxelles en novembre 2016, de réduire à 3,8 % (au lieu de 7 % actuellement) l’incorporation des biocarburants dans les transports entre 2021 et 2030. Pour lui, cela a des « conséquences dramatiques sur la filière et les outils industriels ». La Fop craint ainsi avec cette baisse d’incorporation une diminution de la sole de colza et la baisse du prix de la graine.
« On veut continuer à avoir une économie agricole de type familial mais ça ne peut pas se faire sans structuration des filières, affirme Arnaud Rousseau, qui souhaite dans le cadre de la future Pac et notamment dans le deuxième pilier, des outils pour aider les filières à se développer. » Comme le recouplage des aides, qui même si le système actuel est imparfait, a permis de développer la culture du soja en France. Les surfaces ont ainsi atteint 137 000 hectares en 2016 en France, dont une partie en surface d’intérêt écologique, « ce qui correspond à un doublement en deux ans », chiffre la Fop. Sauf que les aides pour l’année 2016 ne pourront concerner que 57 000 ha contre 90 000 ha aidés pour l’année 2015. « Est-ce que l’Europe va continuer à soutenir cette culture », se demande la Fop, d’où l’idée de faire du recouplage un réel outil au service des filières.
Inquiétude sur la féverole
Mais recouplage ou pas, le syndicat des oléoprotéagineux est pessimiste sur l’avenir de la féverole. « Cette année, les surfaces devraient chuter de 20 à 30 % en France », prévoit Sébastien Windsor, vice-président de la Fop. En cause : la qualité des graines touchées par la bruche, très mal contrôlée en culture par manque de solutions phytosanitaires, n’est plus suffisante pour satisfaire les débouchés pour l’alimentation humaine, notamment en Égypte.
« C’est une perte de prime complémentaire de 50 à 70 €/t, souligne Sébastien Windsor. La marge s’en ressent, et si dans deux ans il n’y a pas de solutions trouvées, la féverole aura disparu de la sole française. » Pour le pois protéagineux, la situation est moins critique, grâce aux recherches encourageantes sur les variétés de pois d’hiver. « Mais la proposition bruxelloise d’interdire l’application de produits phytosanitaires sur les SIE pourrait déjà casser cette dynamique, certes ténue, sur le pois », juge la Fop.
(1) Au cours de l’assemblée générale de la Fop qui aura lieu le 1er février prochain, sera élu un nouveau président, Gérard Tubéry ayant décidé de ne pas se représenter.