La Pac joue-t-elle correctement son rôle ? C’est l’une des questions que se sont posées Birdlife Europe et le Bureau européen de l’environnement (BEE), deux ONG européennes qui viennent de publier un rapport. Quelques jours avant la communication très attendue de la commission européenne sur le futur de la Pac, les ONG dressent un sévère bilan de cette politique. Si la Pac a globalement rempli ses objectifs en termes de soutien au revenu des agriculteurs et de sécurité alimentaire à l’intérieur de l’Europe, il s’agit là d’objectifs d’après-guerre « dépassés », selon les auteurs du rapport, qui estiment que les nouveaux défis ne sont pas relevés.

Des aides relativement efficaces mais aux « effets pervers »

Sur le revenu des agriculteurs, si la Pac a eu un effet positif, les auteurs notent des effets pervers : une plus grande dépendance aux subventions, une ouverture aux marchés qui expose les agriculteurs à la volatilité des prix. Ils jugent la répartition des aides directes « inefficiente et peu justifiée », notamment parce qu’elles ne ciblent pas les agriculteurs ayant les plus faibles revenus.

Les contradictions internes (dues à la coexistence d’aides couplées et découplées et à la flexibilité importante accordée aux États) et externes (notamment par rapport aux réglementations environnementales ou aux politiques alimentaire et de la santé) sont nombreuses. Enfin, les ONG pensent que la société actuelle demande « des produits de qualité plutôt que des produits peu chers », ce dont la Pac, restée « formatée par le contexte d’après-guerre, ne tient pas compte ».

De nouveaux enjeux ignorés

Selon le rapport, la Pac n’apparaît pas non plus en phase avec les nouveaux défis apparus sur le plan environnemental. L’efficacité du verdissement est jugée très faible, en raison de l’abondance des dérogations, de la faiblesse des exigences en matière de diversité des cultures et de l’admission d’éléments inappropriés en tant que SIE.

Les MAEC n’ont pas eu non plus l’effet escompté en raison des contraintes budgétaires et d’une sous-utilisation de cet outil. Si la Pac se soucie désormais de son empreinte écologique et climatique, les deux ONG jugent qu’elle n’a pas encore mis en place de mesures efficaces dans ces domaines et regrettent qu’elle néglige encore le domaine du bien-être animal. Enfin, de manière générale, l’aspect administratif peut inhiber certaines démarches positives.

Concernant le paysage agricole général, les auteurs trouvent que la Pac a peu d’effet sur l’utilisation de l’espace, se contentant de renforcer les tendances existantes. Si elle tend à freiner la tendance à l’agrandissement des exploitations, elle n’apporte toutefois pas de soutien suffisant pour maintenir les petites fermes.

B. Lafeuille