Très fluctuant d’une année à l’autre, le bénéfice net des quelque 2 millions de fermes des États-Unis a reculé de 9,6 % en 2018, en raison notamment d’une forte augmentation des dépenses (fourrage, main-d’œuvre, intérêts, semences, etc.). Il devrait rebondir de 4,7 % en 2019 pour atteindre 95,7 milliards de dollars, selon les dernières prévisions du ministère de l’Agriculture (USDA) dévoilées ce mercredi 6 mars 2019.
Des disparités entre productions
Ce chiffre reste loin du record de 136 milliards dégagés en 2013, année où les cours s’étaient envolés sur les marchés. Parmi les mal lotis figurent les producteurs de soja et de porcs, qui devraient voir leurs recettes baisser de respectivement 6,6 % et 3,2 %. Ils sont touchés de plein fouet par le bras de fer engagé par Donald Trump avec plusieurs partenaires commerciaux.
Même si certains mettent en avant le nombre élevé de faillites ou la dette record des agriculteurs américains, « l’industrie agricole américaine dans son ensemble n’est pas en crise », estime Vincent Smith, économiste de l’Université de l’État du Montana. Le nombre de faillites a légèrement baissé en 2018, 498 exploitations ayant déposé le bilan.
Il a toutefois augmenté de 19 % dans les grands États agricoles du centre des États-Unis, dans le Midwest, où il est à son plus haut niveau en 10 ans, fait valoir le Farm Bureau, le principal syndicat agricole américain. Toutefois, « si on le rapporte au nombre total de fermes, plus de 2 millions, ce n’est pas grand-chose », remarque Vincent Smith.
Une dette record pour les agriculteurs
Quant à la dette des agriculteurs, elle est certes à un niveau record mais c’est parce que la valeur de leurs machines ou de leurs terrains a beaucoup augmenté. « Le rapport entre la dette et les biens est à environ 13,5 %, ce qui reste financièrement une position tout à fait solide », affirme-t-il.
La situation peut être temporairement compliquée pour les agriculteurs qui reposent principalement sur la culture du soja ou l’élevage de porcs, « mais cela ne conduira pas forcément à des faillites », souligne l’économiste.
Certains sous-secteurs de l’agriculture souffrent cependant bien de tendances plus profondes, reconnaît-il, à l’instar des plus petits producteurs de lait. Jim Goodman le constate amèrement. Après avoir élevé un petit troupeau de vaches pendant 40 ans dans le Wisconsin, et s’être converti au bio dans les années 1990, il n’a trouvé personne pour lui succéder après sa retraite.
« Le prix du lait bio est tombé tellement bas que les gens qui ont repris mes terres et mon matériel ne voulaient pas gérer une exploitation laitière, on a dû vendre les bêtes l’été dernier, explique-t-il. C’est la première fois qu’on ne traie plus de vaches sur l’exploitation » plus que centenaire, regrette-t-il.
15,5 milliards d’aides
Selon le ministère américain de l’Agriculture, les subventions versées directement par l’État fédéral aux agriculteurs devraient dans leur ensemble reculer fortement en 2019, de 16,8 %, après avoir bondi de 19,3 % l’an dernier. Combinées aux indemnités versées par les assureurs, ces aides devraient représenter au total 15,5 milliards de dollars, soit environ 16 % du bénéfice net comptant du secteur.
Il ne faut pas non plus oublier, souligne Vincent Smith, que de plus en plus de familles vivant dans des exploitations dépendent de revenus extérieurs, comme les allocations ou le salaire d’un conjoint. L’agriculture constitue le revenu principal du foyer dans moins de la moitié des fermes. Et c’est principalement grâce à la hausse de ces revenus non-agricoles que le revenu médian des foyers vivant dans une ferme devrait croître de 3,6 % en 2019, selon l’USDA, pour atteindre 78 987 dollars.