Le mal-être des agriculteurs vient d’être ausculté lors d’une enquête régionale sur les conditions de travail, en mesurant deux indicateurs de santé psychologique pouvant conduire au suicide : le burn-out et la dépression. La MSA de a Franche-Comté a conduit cette étude en partenariat avec la recherche universitaire, en vue de faire évoluer l’accompagnement sur ces problématiques.
L’étude se base sur « un questionnaire envoyé il y a un an à 11 000 exploitants francs-comtois, que 2 400 d’entre eux ont rempli », indique le docteur Jean-Jacques Laplante, directeur de la santé à la MSA de la Franche-Comté lors de la présentation des résultats de cette enquête, le 20 mars 2017 à Valdahon dans le Doubs.
Épuisement émotionnel élevé
« Seulement une centaine d’études à l’échelle internationale traitent de la qualité de vie dans le monde agricole, dénombre Didier Truchot, professeur de psychologie sociale à l’université de Franche-Comté. Toutes constatent des problèmes de stress, burn-out (1) et suicide ». L’étude enfonce le clou, puisque « 12 à 16,5 % des 2 400 exploitants ont un degré élevé de désespoir. Et leur épuisement émotionnel est élevé comparé à d’autres groupes professionnels. »
Les risques de burn-out et de désespoir « sont plus élevés chez les femmes, chez ceux/celles vivant seul(e)s, lorsque les revenus sont faibles… », poursuit Didier Truchot. Concernant l’environnement de travail, les risques s’avèrent moins élevés chez ceux qui « ont une conjointe travaillant hors de l’exploitation, ont une production bio, sont élus (associatif, municipal, syndical…), adhèrent à une coopérative, une Cuma, un Ceta… L’engagement social constitue un facteur de bien-être au travail ! »
Les éleveurs très exposés
Au regard du type de production, les risques apparaissent particulièrement forts chez les éleveurs : ceux de bovins à viande présentent le risque de désespoir le plus élevé, suivis de près par les producteurs de lait vendant à un industriel. Parmi huit éléments « stresseurs » proposés aux agriculteurs, ceux-ci perçoivent la charge de travail, le manque de temps et les inquiétudes financières, comme les plus importants. Viennent ensuite l’incertitude face aux marchés et à l’avenir, puis les conflits entre associés ou avec la famille. La pression des réglementations n’est pas ressortie comme un facteur de stress.
Enfin, vis-à-vis de ces stresseurs, l’effet modérateur du soutien social est mis en évidence. Le soutien familial et plus encore celui des collègues diminuent le risque de burn-out et de désespoir. « Cela confirme la nécessité des solidarités, de se serrer les coudes et l’importance de la coopération », pointe Jean-Jacques Laplante.
(1) Face à des exigences professionnelles trop fortes, la personne aboutit à un épuisement émotionnel et à un cynisme vis-à-vis de son travail.