Le regard bleu d’Éric Gruot s’est accroché au ciel durant son enfance. Pour ne plus s’en détacher. A Villiers-sur-Suize, en Haute-Marne, où il a repris l’exploitation familiale qu’il mène avec son épouse Roseline, il dispose d’un poste d’observations idéal. « Notre secteur est peu peuplé, le ciel est quasiment noir. Nous voyons 1 200 étoiles, contre une vingtaine à Paris ! », se réjouit l’agriculteur de cinquante-quatre ans, en ouvrant l’observatoire qu’il a lui-même construit.

Montreur d’étoiles

Émerveillé par les nuits étoilées en rentrant tard de l’école - son instituteur gardait le jeune gaucher pour l’entraîner à écrire de la main droite -, Éric nourrit dès lors une fascination pour l’espace. « Adolescent, j’étais féru de romans de science-fiction. L’année de notre mariage, Roseline m’a offert mon premier télescope. Mais ce fut techniquement très compliqué d’observer, je l’ai remisé… » Doté d’une grande curiosité, l’agriculteur, devenu papa de deux garçons, se documente sur l’astronomie et accumule les connaissances en autodidacte.

En 1999, le couple crée chambres et table d’hôtes. Le violon d’Ingres d’Éric prend alors une nouvelle dimension. « Pour y associer nos hôtes, j’ai monté mon observatoire. Puis, nous avons obtenu l’agrément ferme pédagogique et accueilli, durant cinq années, une dizaine de classes par an, du cours élémentaire au lycée. Avec, au programme, la relation entre les étoiles et les plantes. »

Les interventions d’Éric auprès de divers publics se multiplient. « L’exercice n’est pas facile, car je suis réservé, avoue-t-il. Mais je souhaitais vulgariser des connaissances qui restent trop souvent dans des cercles de spécialistes, au langage compliqué et excluant. L’envie de partager m’a motivé ! ».

L’activité pédagogique prend fin en 2009, car la conversion à l’agriculture bio mobilise l’exploitant. Mais le paysan astronome communique encore sa passion « à des voisins, clients, associations ». Calme et minutieux, il manipule ses instruments d’observation d’une main (gauche !) experte, pour initier qui le souhaite aux secrets d’un univers pas si lointain... « Il y a 201 ans, à Chassigny, à 40 km d’ici, est tombée une météorite martienne (1) très rare ! » raconte notre montreur d’étoiles, également passionné d’histoire.

(1) Cette météorite reste une des seules au monde dans sa catégorie géologique.