Du foin, Serge Thuillier en a récolté en abondance en 2016, à Saint-Didier-en-Donjon (Allier). Pourtant, il ne lui en restera pas suffisamment pour affourager ses 65 charolaises pendant l’hiver. Pourquoi ? Parce qu’il en distribue depuis le mois d’août à cause de la sécheresse. Son stock a déjà fondu comme neige au soleil. Et même si l’avancement de la date du sevrage de quinze jours a permis de réduire l’apport au champ au mois de septembre, Serge a dû trouver une autre stratégie pour économiser du foin.

Il a décidé de modifier la ration du lot de vaches qui vêleront en février en apportant de la paille avec de la mélasse. Ce choix s’inscrit dans le cadre d’une réflexion que Serge effectue chaque année, à l’automne, avec Franck Doriat, conseiller à la chambre d’agriculture, après réalisation de son bilan fourrager.

Des foins de mauvaise qualité

Cette année, en plus d’une quantité limitée, son foin est d’une qualité très médiocre. « Je n’ai récolté au bon moment en raison de la pluie », regrette-t-il. Les teneurs en énergie et en protéines, révélées par les analyses infrarouges, sont dans le rouge : 0,62 UFL/kg de MS et 63 g de MAT/kg de MS. Pourtant, la gestion de l’herbe au printemps fait partie des priorités de Serge. Après l’inspection de ses parcelles, il analyse chaque semaine le bulletin « Infoprairies » de la chambre d’agriculture qu’il reçoit (gratuitement) par internet. « Ces bulletins me guident pour lâcher mes vaches au bon moment. » Pour la récolte aussi. À condition que le beau temps soit au rendez-vous.

Début 2016, la saison avait bien démarré. L’hiver doux avait favorisé la pousse précoce de l’herbe et les sols étaient portants. « J’ai lâché mes animaux tôt, dès que les sommes de températures avaient atteint 300 °C (1), indique Serge. J’ai récolté 7 ha d’enrubannage de très bonne qualité le 7 mai à 750 °C. »

Puis le temps s’est dégradé. Serge a enrubanné 2,5 ha dix jours plus tard. Les rendements de cette parcelle en première coupe ont atteint 5,5 t de MS/ha, soit 2 t de MS/ha de plus que celle réalisée en début de mois. Cette récolte sera analysée en cours d’hiver (et complémentée en conséquence). « Exceptionnellement, j’ai réalisé 4 ha d’enrubannage supplémentaires sur une deuxième coupe le 21 juin », explique-t-il, estimant la qualité proche de celle récoltée début mai.

Le bilan de l’enrubannage reste bon. Le taux de matière sèche des balles réalisées début mai avoisine 57 %. Les teneurs en azote et en énergie sont de respectivement 14,3 % de MAT et 0,83 UFL/kg de MS.

Avant le vêlage, les vaches recevront 8 kg de MS avec 8 kg de foin. La complémentation comprendra 500 g d’orge et 500 g de tourteau de colza. « Cette ration vise à maintenir les vaches en état jusqu’au vêlage, explique Serge. Nous avons estimé la note d’état cette année à 2,5 en moyenne, soit un point de moins que l’année dernière, la pousse de l’herbe ayant été abondante à l’automne. C’est le point positif de cette campagne, ajoute-t-il. Le besoin des vaches en fin de gestation sera un peu inférieur à celui de l’année dernière à l’entrée en stabulation, qui débutera aux alentours du 15 novembre. Mon but pendant cette phase est d’éviter que les vaches perdent du poids. Sinon, je m’expose aux pires complications au moment du vêlage. Les vaches ont du mal à expulser leur veau. Celui-ci est moins vigoureux et le colostrum n’est pas de qualité optimale. »

Allotement à l’entrée en stabulation

Pour ne pas gaspiller de fourrage pendant l’hiver, Serge allote ses vaches à l’entrée en bâtiment en fonction de la date de mise bas estimée lors du diagnostic de gestation. Celles-ci s’étalent du 1er décembre au 15 mars. Les animaux sont regroupés dans deux lots de 28 et un lot de 12, composé des vaches vêlant le plus tardivement. Ce petit lot consommera de la paille avec de la mélasse jusqu’à la mi-janvier. Ce n’est qu’un mois avant le vêlage, autour de la mi-janvier, que les vaches recevront la ration à base de foin et d’enrubannage. Pour chaque lot, dès que les vêlages sont terminés, elles reçoivent 8 kg de foin, avec 12 kg d’enrubannage. Aucune complémentation n’est ajoutée. Les fourrages suffisent. L’ensilage d’herbe est assez riche. « J’ajoute 1 kg de céréales avant la mise à la reproduction, pour favoriser la prise de poids afin de garantir les résultats. »

Grâce à ce programme d’alimentation, il restera 10 t de foin dans le hangar avant la mise à l’herbe au printemps 2017. « C’est une réserve indispensable pour parer d’éventuels problèmes », assure-t-il. En juin dernier, il en restait 30 t. « Ce stock m’a aidé car j’ai rentré les animaux du 1er au 15 juin à cause de la pluie qui avait rendu les prairies impraticables. » Le sevrage des broutards plus tôt a aussi permis d’économiser quelques balles de foin.

(1) Somme des températures moyennes journalières enregistrées entre 0 et 18 °C.