Découragés, les agriculteurs des cantons de Seurre, Saint-Jean-de-Losne, Auxonne et Pontailler-sur-Saône subissent pour la quatrième année les inondations tardives de la Saône. « Il y a trois semaines, j’ai dû ressemer 23,5 ha de maïs, explique Sébastien Noize, céréalier à Seurre sur 180 ha. Aujourd’hui, alors que la plante est à trois feuilles, les parcelles sont en passe d’être inondées de nouveau. Dix hectares de blé sont abîmés. On y récoltera entre 0 et 50 q/ha. »
Producteur de lait à Chamblanc sur 160 ha, dont un tiers en zone inondable, secteur où il a toutes ses surfaces fourragères, Laurent Jacquin n’est pas mieux loti. « 13 ha d’ensilage implantés début avril ont dû être ressemés. Si ça déborde encore, ils seront fichus alors que j’espérais ensiler le fourrage début août. Les laitières mises à l’herbe le 8 mai ont dû être rentrées quatre jours plus tard. Relâchées, elles sont à nouveau à l’étable. Or il ne me reste que douze bottes de foin. Dans les prés où les génisses ont été lâchées mi-mai, il n’y a plus rien à pâturer. Les sols sont matraqués et le foin verse. Dans les terres habituellement non inondées par la Saône, je fais des rigoles depuis deux jours pour essayer d’évacuer l’eau. C’est catastrophique. »
Depuis le 1er janvier 2016, les agriculteurs de ce secteur ont subi près de dix crues. « Nous acceptons les crues d’hiver et celles qui sont liées à des pluviométries exceptionnelles, mais pas les inondations dues à un manque d’entretien de la rivière et à une gestion défectueuse de Voies navigables de France (VNF), souligne Nicolas Michaud, responsable FDSEA du secteur. Ces petites crues de dix à quinze centimètres d’eau à chaque fois inondent les cultures et les prairies. Un millier d’hectares sont impactés. Ce n’est pas normal. Le niveau des nappes de la Saône, ça se gère avec les barrages. »
Manque d’entretien
Faute de moyens, l’entretien de la Saône a été délaissé depuis 25 ans, dénoncent les agriculteurs du secteur. Des îles artificielles de granulats se sont créées et perturbent la circulation de l’eau. De grands ouvrages (A36, canal à grand gabarit) ont modifié l’expansion du lit de la rivière. Pour protéger les parcelles agricoles, il faudrait évacuer l’eau en préventif dès que le niveau monte en amont, en tenant compte des apports des affluents très nombreux dans ce secteur. La mise en œuvre d’un protocole de pré-crues est indispensable. Or pour l’instant, VNF fait la sourde oreille. « L’institution se retranche derrière un protocole datant de 1972 qui ne fonctionne plus, regrette Nicolas Michaud. Elle privilégie la navigation des bateaux de plaisance à l’agriculture. Dans le seul canton de Seurre, 500 ha, soit l’équivalent de trois exploitations, ne sont pas ensemencés. »