Trente-sept agriculteurs, autour de Stenay (au nord du département de la Meuse), sont concernés par une pollution constatée après les inondations de juin. Soit 500 ha de prairies en zone inondable. Parmi eux, dix-sept ont porté plainte. Michel Reuter est l’un des plus touchés avec 30 ha. « Le 10 juin, je suis allé en télescopique voir mes prairies inondées. J’ai cru que mon engin dégazolait ! J’ai vu de gros dépôts noirâtres. L’odeur était nauséabonde, les yeux et la gorge piquaient. » Les résultats des prélèvements d’eau montrent un taux d’aluminium anormalement élevé. Peu après, les agriculteurs constatent que la végétation est comme brûlée. Les foins sont tout de même faits, mais les producteurs craignent aujourd’hui de les donner aux animaux.

« Un SMS de la DDCSPP (1) m’a informé que les analyses de fourrages étaient conformes. Aucun résultat complet n’a été envoyé par courrier, s’étonne Michel Reuter, choqué du procédé. La personne venue faire les prélèvements a pris quelques poignées sur le bord d’une balle ronde, là où le foin a été le plus ventilé. Elle n’a même pas pris d’échantillons au centre de la botte ! » Des fourrages peut-être « conformes », au regard de normes qu’on se garde bien de communiquer aux intéressés, mais dont « les bêtes ne veulent pas », déplore Michel Reuter.

Fourrages à racheter

Alors que l’enquête patine, les agriculteurs sont en train de constituer une association, asyndicale. Antoine La Marle, éleveur à Inor, est concerné, et suit le dossier en tant qu’élu à la chambre d’agriculture : « Notre objectif n’est pas d’attaquer une entreprise, mais nous demandons que le problème soit reconnu et les circonstances de la pollution établies. L’État doit jouer son rôle en indemnisant les dommages, puis se retourner contre le pollueur. »

La plupart des éleveurs vont devoir racheter des fourrages, et certains ne sont pas en mesure de payer. « J’ai demandé un prêt de 30 000 € à ma banque, souligne Michel Reuter. J’attends la réponse. » Il faudra aussi ajouter les pertes de regain, les coûts de resemis car les repousses d’herbe sont rares. D’après l’étude économique menée par la chambre d’agriculture, le préjudice sur la zone s’élève à 330 000 €. Manuel Valls était en visite dans la Meuse le 14 septembre et un rapport complet a été remis à sa conseillère agricole.

(1) Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations.