«Nous voulions aller jusqu’au bout de notre produit. En être les acteurs. » C’est cet objectif qui a conduit trois couples de chevriers drômois, qui se connaissaient, à créer leur fromagerie. « La filière longue ne nous intéressait plus. Nous ne nous y retrouvions plus, tant d’un point de vue éthique que financier », explique Thierry Crouzet, l’un des six gérants de la fromagerie des trois becs. « Au départ, nous avions associé un grossiste en fromages au projet. Il voulait assurer son approvisionnement auprès de producteurs locaux. Mais ce projet n’a pas abouti. Ne voulant pas baisser les bras, nous avons décidé de créer notre propre fromagerie », explique l’éleveur.
300 000 litres
Avec l’appui de René Guilhot, leur conseiller en agroalimentaire, il leur aura fallu 18 mois pour concrétiser le projet. La fromagerie de 170 m2, aménagée dans une ancienne brasserie et située au centre du périmètre des trois exploitations, est opérationnelle depuis novembre dernier. Investissement total : 450 000 €, dont 120 000 € d’aides du département, de la Région et de l’État. Chaque couple produit annuellement 100 000 litres de lait, collectés tous les deux jours avec un véhicule équipé d’une remorque citerne de 2 000 litres. « À tour de rôle, nous effectuons la collecte sur une période de 7 à 10 jours, dans un périmètre estimé à 170 km », explique Thierry.
Si les gérants prennent en charge la collecte, la fabrication est laissée aux fromagers. « Nous avons fait le choix d’embaucher un salarié à temps plein et un autre à mi-temps pour la fabrication des fromages. Nous avons suffisamment de travail dans nos exploitations pour ne pas en rajouter », argumente le gérant. Les tommes sont livrées à trois affineurs de la Drôme et de l’Ardèche. Quelques-unes sont affinées sur place et vendues en AOP Picodon auprès de clients locaux.
Après 6 mois d’activité, les gérants de la fromagerie des trois becs se disent satisfaits. « Ce projet est une belle aventure humaine qui répond à nos objectifs. Même si nous n’avons pas encore assez de recul pour le démontrer chiffres à l’appui, ce projet est économiquement viable. Il nous permet de dégager une meilleure marge. Critère indispensable en ces temps de crise laitière », conclut l’éleveur.