Une exploitation vaut-elle d’abord par ce qu’elle possède ou par ce qu’elle rapporte ? Derrière cette question d’apparence anodine se cache en réalité un sujet de fond pour l’avenir de l’agriculture… Et des agriculteurs.
En période assez stable, avec des activités bordées par des droits à produire et des soutiens bien accrochés, la valeur patrimoniale prenait le dessus, la plupart du temps. La fin des quotas, en particulier, a fait tomber un pan de valorisation implicite des exploitations… Même si les contrats sont censés les remplacer. Par ailleurs, s’agissant de transmission parents enfants, l’évaluation patrimoniale était la règle très majoritaire.
Le contexte agité actuel redistribue les cartes, aidé par la montée des formes sociétaires et par les installations hors cadre familial. Ainsi, estimer la valeur d’une exploitation en fonction d’une rentabilité, espérée sur plusieurs années, est-il devenu l’un des meilleurs gages de confiance (lire le dossier page 44) à donner à de potentiels repreneurs. D’autant plus si l’on veut favoriser l’entrée de capitaux extérieurs. Trouver le juste prix est alors le fruit d’un subtil panachage entre valeur patrimoniale et valeur économique. Pour satisfaire le cédant, cherchant un complément de retraite, et le repreneur, voulant garder un niveau d’endettement acceptable. Ces derniers temps, le taux d’endettement des jeunes a, en effet, focalisé l’attention sur la surévaluation d’exploitations acquises. Bien sûr, dans les secteurs malmenés comme l’élevage, la conjoncture a depuis tassé l’évaluation des biens à céder. En particulier pour des bâtiments dont l’usage spécifique peut limiter leur conversion. Mais déjà des signes de reprise se font sentir.
ll reste aussi une tendance lourde à maîtriser, qui n’apparaît pas forcément au bilan des exploitations mais qui peut peser à titre privé : celle qui voit, dans certaines régions, la pression foncière s’accentuer de manière démesurée.