Johann Girard et ses salariés ont mis en hivernage 1 500 colonies d’abeilles. Un millier d’entre elles est dédié à la production de miel. Les 500 autres serviront au renouvellement des premières. « Je dispose d’une réserve de 250 essaims développés. Et, pour la première fois, de 250 reines avec de petites colonies qui pourront être placées dans des ruches sortant affaiblies de l’hiver, en mars. Chaque année, j’essaie quelque chose », explique l’apiculteur de 45 ans.
Il a développé l’élevage de reines durant les dix dernières années, pour remédier à des pertes de cheptel. « L’environnement a globalement changé, constate-t-il, au niveau du climat, des disponibilités des ressources alimentaires à certaines périodes, des problèmes de phytosanitaires, du parasitisme… Le levier que l’apiculteur maîtrise directement, c’est l’élevage. Il s’agit d’une activité technique, coûteuse en temps et en nourriture, à mener en parallèle des récoltes. Mais elle nous donne l’autonomie de changer, à l’automne, toutes les reines qui ont fait deux campagnes de production, ce qui rend la colonie plus dynamique et résistante aux agressions. »
Installé apiculteur en 1997, avec 200 ruches, Johann a choisi de se concentrer sur la partie production. Il délègue la commercialisation de ses miels à une SARL qu’il a créée avec son frère Mickaël, gérant de cette société et apiculteur à Labergement-Sainte-Marie dans le Haut-Doubs. Tous deux ont pris goût à cette spécialité auprès de leur père Jean-Baptiste. « En 1983, à 40 ans et suite à un licenciement, il s’est lancé par passion dans l’apiculture ici, à Velesmes-Essarts », relate Johann. Les deux frères ont préféré travailler de manière indépendante. Mais pour s’épargner un double investissement, ils ont en commun le matériel d’extraction du miel. Johann stocke sa production en fûts à la miellerie de Labergement-Sainte-Marie. Elle est commercialisée par la SARL sous la marque Le Rucher des deux lacs. « Une marque créée par notre père et qui est bien connue dans la région », précise Johann.
Suivre les miellées
Au fil d’une saison, l’apiculteur et ses salariés font transhumer les ruches en suivant les miellées, de la plaine autour de Velesmes au printemps, jusqu’à la montagne (Haut-Doubs et Jura) en été. « Nous trouvons toutes les miellées en Franche-Comté, à 1 h 30 d’ici au plus loin », souligne-t-il. Excepté lorsque les ressources manquent, comme cette année. « Nous n’avons rien eu en tilleul, puis nous avons laissé l’acacia aux abeilles comme nourriture, retrace-t-il. Lorsque des collègues d’Isère nous ont invités à bénéficier d’une miellée de châtaignier fin juin, nous avons emmené, exceptionnellement, 240 ruches sur place pour un mois. Cela a limité la baisse de production. Ensuite, une miellée de sapin au 15 août, sous laquelle nous avons déplacé rapidement 500 ruches et récolté en moyenne 5-6 kg de miel par ruche, nous a permis d’atteindre 15 tonnes récoltées au total ». Soit 50 % d’une année moyenne. L’apiculteur considère cette variation de volume, donc d’EBE, inhérente au métier. Il adapte du coup sa gestion. Il a ainsi reporté un investissement dans un véhicule.
Johann s’avoue moins préoccupé par ces aspects que par les évolutions environnementales. Il mentionne notamment un problème sur 300 ruches en plaine en 2015, « à cause d’un traitement d’insecticide qui m’a contraint à quitter le site et utiliser toutes mes ruches d’élevage pour recharger les colonies et les sauver. » Ou encore « la disparition, cette année sur ma commune, d’environ 300 m² de haies, réserves de nourriture pour les abeilles. »
Des intérêts communs
« Trouver des intérêts communs avec les agriculteurs est essentiel, nos productions ont besoin l’une de l’autre, pointe-t-il. L’Association pour le développement de l’apiculture en Franche-Comté (ADAFC), dont je fais partie, s’investit sur ce sujet.De plus, je suis en discussion avec un céréalier voisin en vue de l’implantation de couverts mellifères en été. Dans ce but, je vais tester l’an prochain différentes plantes sur mes 50 ares jouxtant le bâtiment de stockage. »