« Nous avons besoin de 300 à 400 milliards de dollars dans les dix prochaines années pour réussir la transformation complète », a affirmé Chiji Ojukwu, le directeur de l’agriculture et de l’agro-industrie de la BAD. L’Afrique dépense près de 35 milliards de dollars par an en importations de nourriture alors qu’elle dispose de 65 % des terres arables non cultivées, selon la BAD.
Amorcer la pompe à crédits
La BAD va injecter directement 24 milliards de dollars avec la volonté que cette mise de départ « serve de catalyseur ». « Notre contribution est dérisoire, une goutte d’eau dans l’océan, poursuit Chiji Ojukwu. On a besoin de beaucoup plus. Nos fonds doivent servir de catalyseurs pour que d’autres donateurs et partenaires nous rejoignent. »
Le privé comme le public ne s’intéressent pas ou peu à l’agriculture en Afrique. « Les gouvernements mettent très peu dans l’agriculture, reprend-il. Nous voulons faire augmenter les investissements publics dans le secteur agricole. Quant au secteur privé, il a des ressources immenses dont il ne se sert pas. Les banques par exemple ne prêtent pas à l’agriculture. Nous voulons les faire investir cinq fois plus. »
« Nous allons apporter le capital de départ aux banques et les “dérisquer” », explique-t-il, précisant qu’il veut aussi créer des instruments pour pouvoir ponctionner les fonds souverains en faveur de l’agriculture.
Faire de « l’agriculture comme un business »
« Le problème numéro 1 de l’agriculture africaine c’est la faible productivité. La technologie est là mais elle n’arrive pas à l’agriculteur. Les agriculteurs doivent arriver à l’autosubsistance, mais pour l’atteindre il faut qu’ils fassent de l’agriculture comme un business et non une agriculture de subsistance », analyse Chiji Ojukwu.
« Le problème numéro 2 : la faible valeur ajoutée. Ce que nous produisons, nous ne le transformons pas. Nous exportons de la matière brute. Exemple : l’industrie du chocolat représente 100 milliards de dollars par an dans le monde. L’Afrique en prend moins de 10 % » alors qu’elle produit 80 % des fèves de cacao, résume-t-il.
La faiblesse des infrastructures, de l’irrigation, du secteur bancaire et un environnement des affaires peu engageants sont d’autres problèmes à régler. « Nous pensons qu’on peut y arrive dans les 10 ans mais il ne faut pas attendre 2025: la course commence aujourd’hui », lance Chiji Ojukwu.