Les intérêts du pâturage ne font plus débat : réduction du coût alimentaire, diminution des volumes d'effluents à épandre, de la pression sanitaire et du temps de travail, amélioration de l'autonomie protéique, moins de besoins de mécanisation... Pourtant, dans les faits, quand les troupeaux s'agrandissent, la part de pâturage dans la ration diminue. En Bretagne par exemple, les troupeaux de plus de 100 vaches valorisent 500 kg d'herbe sur pied de moins par animal et par an que la moyenne.
L'argument économique est souvent la principale motivation pour valoriser le pâturage. « C'est un réel plus pour maîtriser le coût alimentaire, explique Jean-Marc Seuret, de la chambre d'agriculture de Bretagne. L'éleveur économise sur les quantités de correcteur azoté et de concentré distribuées. Moins de fourrages stockés impliquent aussi moins de fourrages récoltés. Ramené à l'UFL, le coût de l'herbe pâturée est quatre fois moindre que des fourrages stockés. » L'impact sur l'image de la production laitière auprès du grand public n'est pas à négliger non plus. Les reproches concernant des vaches « enfermées dans des hangars » sont de plus en plus fréquents. Aux Pays-Bas, certaines laiteries encouragent le pâturage via une prime de quelques centimes.
UNE CONDUITE EXIGEANTE
Fondamentalement, le pâturage présente les mêmes intérêts et contraintes pour un troupeau de plus de 100 vaches que pour des cheptels moins importants. Cependant, certains risques comme le piétinement des parcelles, la mauvaise circulation des vaches, leur sortie intempestive des paddocks ou la mauvaise valorisation des parcelles sont exacerbés avec un grand troupeau. De ce fait, les conseils donnés pour les petits et moyens troupeaux deviennent des règles quasi obligatoires.
Disposer d'un parcellaire groupé autour des bâtiments d'élevage devient un atout essentiel pour faciliter la circulation des animaux. Cependant, les ares accessibles aux vaches ne sont pas toujours pâturés. Une étude du contrôle laitier breton montre que, en moyenne, chaque animal a potentiellement accès à 45 ares. « A partir de 20 ares pâturés par vache laitière, le pâturage est intéressant sur le plan technique et économique, divulgue Jean-Marc Seuret. En deçà de 15 ares par vache, la limite est atteinte et le pâturage s'apparente davantage à de la promenade. Sur le terrain, nous observons une meilleure valorisation de l'herbe quand les surfaces accessibles sont réduites. »
DES AMÉNAGEMENTS STRUCTURANTS
Parcellaire morcelé, portance des sols, présence de cours d'eau, de haies, de routes... Force est de constater que tous les élevages ne sont pas égaux. Certaines exploitations se prêtent naturellement mieux au pâturage que d'autres.
Pour les élevages ne disposant pas d'assez de surfaces accessibles, tout n'est pas pour autant perdu. Des échanges amiables de parcelles avec des voisins, la reprise de foncier proche, voire des travaux de drainage permettent de maintenir une part de pâturage importante. Parfois, la simple création de chemins peut rendre accessibles plusieurs hectares. « Je n'ai jamais rencontré de cas où le pâturage était impossible », insiste Mathieu Bessière, conseiller en pâturage tournant dynamique pour Innov-Eco2.