« Nous entendions les éleveurs laitiers parler de leur coût de production aux 1 000 litres de lait, se souvient Laurent Brémaud. Alors pourquoi ne pas en faire autant sur nos exploitations allaitantes ? La coopérative Ter'Elevage a lancé une réflexion et, cet hiver, pour la troisième année, je retrouverai une dizaine de collègues pour échanger sur ce sujet. »
Le stage se déroulera en trois temps : un premier consacré à l'épluchage de la comptabilité et un deuxième à l'examen des résultats techniques et économiques. La dernière journée s'articulera autour de la visite de l'exploitation d'un des membres du groupe ou d'un point technique particulier avec un intervenant extérieur.
150 VÊLAGES PAR AN
Laurent est en Gaec à Saint-Pierre-à-Champ, dans les Deux-Sèvres, avec Isabelle, sa femme, et Kévin, leur fils qui s'est installé en 2010. Ils disposent de 180 ha : 105 ha de prairies, 40 ha de blé, 10 ha de triticale et 25 ha de maïs ensilage. Ils font vêler 150 charolaises chaque année. Les 70 à 80 mâles nés sur l'exploitation sont engraissés et vendus à la coopérative. Jusqu'à présent, quelques génisses partaient comme reproductrices. Dorénavant, ils en conservent 50 pour le renouvellement du troupeau. Toutes les autres seront engraissées et commercialisées comme babynette.
Quels enseignements Laurent tire-t-il de ces réunions ? « Nous mettons nos chiffres sur la table. Certains ne sont pas bons mais nous n'avons pas peur de les montrer. Nous ne sommes pas là pour regarder les résultats des autres mais pour constater où se situe notre marge de progrès. » Ce que Laurent apprécie dans ce travail de groupe, c'est le dialogue, l'échange. C'est là qu'il estime apprendre le plus. S'il s'est tourné vers une formation liant les aspects techniques et économiques, ce n'est pas par hasard. « Les performances zootechniques, il en faut, poursuit-il. Cependant, à un moment, vous arrivez au bout. Il faut chercher une marge de progression ailleurs, trouver où nous pouvons économiser. »
RÉDUIRE LA FACTURE DE CONCENTRÉS
Le critère où les performances du Gaec pèchent est bien identifié. Il s'agit du coût des concentrés, qui atteint 62 €/100 kg vif. La référence fournie par la chambre d'agriculture pour un naisseur-engraisseur en race charolaise est de 28 €/100 kg vif. « Le premier vêlage à 2 ans impose une conduite adéquate pour assurer aux génisses une croissance soutenue, détaille Laurent. Notre objectif est qu'elles atteignent 450 kg à la mise à la reproduction. La protéine nous manque. Nous voulons en produire davantage, avec des mélanges de ray-grass et de trèfle blanc pour la récolte de fourrage. Nous pensons aussi ensiler plus tôt. Les analyses nous montrent que nous pouvons par ce biais améliorer la qualité du fourrage. »
Côté reproduction, les résultats sont satisfaisants : l'intervalle entre deux mises bas est de 363 jours, contre 380 pour la référence, et le taux de mortalité des veaux avant sevrage de 7 %, contre 11 %. L'âge moyen au premier vêlage se situe à 28 mois. Adepte de l'insémination, Laurent Brémaud a d'abord travaillé sur le gabarit de ses charolaises pour améliorer l'ossature. Aujourd'hui, il cherche à améliorer la conformation de ses femelles sans sacrifier les facilités de naissance. « Cela reste une priorité dans le choix des taureaux, avec un premier vêlage à deux ans, insiste-t-il. Sur 150 vêlages, nous n'avons eu qu'une seule césarienne. C'était pour un veau mal placé. »
Laurent veut améliorer le taux de réussite à la première insémination (IA), et en particulier celui des génisses. Avec une seule période de vêlage par an, toutes celles qui ne sont pas inséminées à 15 mois doivent attendre un an supplémentaire avant la mise à la reproduction suivante. Cela allonge leur période improductive.
« Nous faisons 180 à 200 inséminations pour avoir 165 vaches et génisses prêtes à vêler sur la période de trois mois que nous nous fixons, calcule Kévin. Nous avons la génétique pour une première mise bas à deux ans. Avec deux périodes de vêlages, nous pourrions viser 24 ou 30 mois. Là, c'est 24 ou 36 mois. »
UNE CROISSANCE PLUS RÉGULIÈRE
Deux points retiennent l'attention des associés du Gaec pour améliorer la fertilité des jeunes femelles. Le premier concerne les inséminations. Kévin doit suivre une formation pour les réaliser lui-même. « La difficulté avec le vêlage à deux ans, ce n'est pas de repérer les chaleurs, insiste Laurent. Cela ne nous pose aucun problème. En revanche, le passage de l'inséminateur n'est pas toujours régulier. Parfois, les femelles restent bloquées deux heures au cornadis avant son passage. Certains jours, il y en a une dizaine à faire. Une fois Kévin formé, il pourra intervenir lui-même, régulièrement, deux fois par jour. »
L'autre chantier que les associés du Gaec ont choisi de rouvrir avec les génisses est leur conduite. La sélection génétique aidant, les jeunes femelles sont de plus en plus nombreuses à atteindre l'objectif de poids à la mise à la reproduction. Il était de 450 kg au départ mais atteint aujourd'hui 480 kg. Et ce n'est pas une estimation à vue de nez. Les génisses sont pesées quatre fois par an. « Nous allons réduire leur croissance et faire en sorte qu'elle soit plus régulière, annonce Laurent. Aujourd'hui, elle atteint 1 100 g/j jusqu'à l'insémination, puis chute à 300 g/j. Nous allons maintenant viser entre 700 et 800 g/j de moyenne jusqu'au vêlage, pour atteindre le même poids à la mise bas. Ainsi, nous éviterons les à-coups. Nous allons voir si cela a un impact sur leur fertilité. Elles arrivent peut-être trop en état à l'insémination. » Cela pourrait aussi se traduire sur la facture de concentrés. Rendez-vous lors des prochaines réunions du groupe « coût de production », constater si le plan d'action engagé est payant.