« Il nous aura fallu sept ans pour trouver un tracteur permettant d'entretenir les pâtures en zones accidentées », affirme Hervé Clerc, président de la Cuma d'Epersy (Savoie). Il y a deux ans, cette dernière s'est équipée d'un tracteur quelque peu original de marque Rigitrac. « Ce modèle de 120 ch à quatre roues égales, motrices et directrices est exactement ce que nous recherchions pour nos activités de montagne », se réjouit l'agriculteur. Hervé est installé au Gaec des Oursons, qui compte 3 associés à Saint- Ours, en Savoie. Le Gaec produit 650 000 l de lait pour la tomme de Saint-Ours. L'été, les 100 vaches laitières pâturent en alpage.

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Comme Hervé, une vingtaine de producteurs de lait ont besoin de broyer les refus de pâtures de la mijuillet aux premières chutes de neige, fin octobre. Le Rigitrac accède aux prairies à fortes pentes, inaccessibles avec un tracteur conventionnel. La particularité de ce tracteur (lire l'encadré) est son articulation au centre du châssis. « Sur le terrain, les quatre roues sont toujours au contact du sol », explique Anthony Gelloz, chauffeur de la Cuma. Les deux ponts sont rigides mais l'oscillation offre 22 degrés de débattement.

Aujourd'hui, les agriculteurs et le chauffeur sont satisfaits de leur équipement. Le Rigitrac entraîne un broyeur à herbe de 2,40 m de large attelé sur le relevage avant. Un second broyeur de type forestier est capable de hacher des arbres d'un diamètre maximal de 10 cm et ainsi de nettoyer des buissons ligneux dans les pâtures. « Avec ses grandes roues de 24 pouces, il a une meilleure adhérence que les autres tracteurs de montagne, qui sont plus légers et dotés de plus petites roues », affirme Anthony. Selon le chauffeur, cet engin monte partout : « C'est l'état du terrain ou la présence de cailloux qui limite l'évolution en fortes pentes sinon, rien ne l'arrête. »

Avant d'arriver à ce niveau de satisfaction, la Cuma a rencontré des aléas mécaniques avec son premier investissement.

L'activité d'entretien des pâtures a débuté il y a dix ans. Les adhérents ont commencé par louer un tracteur spécialisé, un Aebi Terra- Trac avec un broyeur léger SMA. Le contrat de location était d'une durée d'un mois et demi, à l'automne, sur deux années. « Au vu de la demande et de l'évolution du nombre d'hectares à entretenir, nous nous sommes vite rendu compte qu'il fallait investir », explique le président. Au total, la Cuma compte une quarantaine d'adhérents et une quinzaine étaient concernés par ce projet pour plus de 100 ha de pâtures.

Des problèmes de fiabilité durant cinq ans. « La première étape consistait à assister à des démonstrations. » Ayant connu le matériel du fabricant Suisse Aebi par la location, la Cuma c'est logiquement tournée vers cette marque et a investi dans un tracteur de montagne TerraTrac 270 de 95 ch, le plus gros modèle de la gamme à l'époque. L'investissement avoisinait 80 000 euros avec le broyeur, se souvient Hervé. L'équipement répondait aux attentes et remplissait ses fonctions avec un broyeur attelé sur le relevage avant. « Mais, malheureusement, l'engin passait plus de temps à la concession pour des problèmes mécaniques, soupire Anthony. Les adhérents m'appelaient pour broyer leurs pâtures mais je ne pouvais pas assurer le travail faute de matériel disponible. »

Au bout de cinq années, les adhérents décident de se réunir et de trouver une solution. « L'organisation de la coopérative de matériels était complétement bouleversée », observe Hervé. Deux solutions s'offraient alors : arrêter l'activité ou continuer mais avec un nouvel investissement. La deuxième solution est retenue et la Cuma investit 140 000 euros dans le tracteur Rigitrac et ses deux broyeurs. « Il nous a fallu un peu de temps pour trouver le bon équilibre et le matériel adapté. J'avais aperçu cet engin quelques années auparavant, au salon Agrama, en Suisse », nous confie le président.

Aujourd'hui, Anthony peut répondre aux appels des adhérents. Le tracteur est utilisé durant quatre mois de l'année et réalise plus de 400 heures de travail, ce qui représente environ 200 hectares de pâtures broyées. Le reste du temps, il est mis à la disposition des communes pour des travaux de curage des fossés. Afin de limiter les risques de casse dans les bosquets, la partie inférieure du tracteur est protégée par une tôle de blindage. Un arceau entoure également le toit de la cabine. « L'investissement est certes conséquent mais le travail est effectué en sécurité et en temps et en heure », conclut Hervé.