Bien qu'elles soient moins visibles aux champs que celles qui touchent les herbicides, les résistances aux fongicides sont devenues une réalité sur le terrain. Il s'agit d'un phénomène naturel : dans les parcelles, des individus résistants existent et l'application de spécialités peut augmenter leur fréquence. C'est ce que l'on nomme la pression de sélection. Nous avons tous gardé en mémoire les premières résistances de la septoriose aux strobilurines apparues en 2002, alors que cette nouvelle famille de fongicides n'avait été introduite que quelques années plus tôt. Au final, ces produits sont devenus rapidement inefficaces sur cette maladie.

DES FAMILLES DE MOINS EN MOINS NOMBREUSE

En 2012, les toutes premières résistances à la famille des carboxamides (SDHI) ont été détectées par les firmes. Trois cas ont été recensés, dont une souche de septoriose sur blé tendre.

Il devient urgent de mettre en place une stratégie pour préserver l'efficacité des solutions encore disponibles, et ce d'autant que les familles sont de moins en moins nombreuses. Instituts et firmes phytosanitaires s'accordent désormais pour communiquer les mêmes éléments concernant la bonne gestion des modes d'action

Concernant l'emploi de triazoles, le réseau performance de 2013 montre que les souches de septoriose moyennement résistantes (TriR6, R7 et R8) dominent, même si elles sont légèrement en retrait comparé à 2012. Les souches émergentes restent encore minoritaires. La note commune (Arvalis, Inra et Anses) de 2013 précise de son côté que, « malgré une érosion de l'activité de tous les triazoles au champ, l'époxiconazole, le prothioconazole et le metconazole demeurent les plus efficaces ».

Il est recommandé de compléter leur action avec du chlorothalonil, du prochloraze ou des SDHI. Le conseil : alterner les IDM (inhibiteurs de la déméthylation), soit les triazoles ou le prochloraze, complémentaires dans le programme. Plus l'emploi de ces IDM est diversifié, plus il est possible de venir à bout d'un maximum de souches. « Pour faire ce choix, l'agriculteur doit prendre connaissance des souches les plus présentes dans sa région, ainsi que de leur caractérisation (consulter les tableaux ci-contre), explique Jean-Yves Maufras. Ainsi, en Midi-Pyrénées, il y a principalement des souches TriR7 et R8, le prochloraze trouve alors tout son intérêt. »

Au cours de la campagne, l'utilisation d'un chlorothalonil est fortement conseillée car il s'agit du seul fongicide multisite qui ne présente pas de pression de sélection.

Quant aux SDHI, la dernière famille de fongicides disponibles sur céréales, il est recommandé de les limiter à une application par saison quelle que soit la dose. Les sociétés détentrices de ces carboxamides souhaitent éviter que l'apparition de résistances spécifiques augmente. En outre, plusieurs traitements favoriseraient les souches MDR, un sous-groupe des phénotypes émergents, très résistant aux IDM et déjà faiblement résistant aux SDHI. Arvalis émet l'hypothèse que de grosses doses de SDHI sélectionneraient les résistances.