Pourquoi défendez-vous l'agriculture familiale ?

« Elle est souvent plus efficace que les autres formes d'organisation de la production. En France, c'est cette agriculture, aidée par les pouvoirs publics, qui a réalisé les gains de productivité considérables enregistrés ces cinquante dernières années.

Cette efficacité est largement prouvée ailleurs dans le monde. Elle a fini par s'imposer pendant la deuxième moitié du XXe siècle, au détriment du latifundium latino-américain, de la plantation coloniale en Afrique ou du grand domaine collectivisé à l'est de l'Europe.

Sous réserve qu'elle ait accès à la terre, aux moyens de production et aux marchés dans des conditions acceptables, elle a montré sa capacité d'adaptation et d'innovation, de gestion des écosystèmes complexes et de création des emplois et de revenu.

D'où provient cette efficacité ?

Les exploitations dites familiales se caractérisent par la réunion entre les mains de l'agriculteur du capital productif, du travail (réalisé par le ou les agriculteurs) et de la terre (en propriété ou en fermage).

La réunion de ces trois facteurs de production autour d'un même centre de décision génère un revenu familial qui permet de vivre et au-delà d'investir. Dès que ces facteurs sont portés par des personnes ou institutions différentes, chacun doit être rémunéré.

La séparation du capital et du travail se fait au détriment du travail et de l'emploi. La gestion financière fait la part trop belle au court terme, au grand dam des considérations environnementales ou patrimoniales.

Comment l'encourager ?

L'exploitation familiale ne peut se défendre sans un contrôle des structures renforcé. Or il est devenu inopérant. Sans compter que le niveau de capital accumulé dans les exploitations françaises rend de plus en plus difficile leur transmission.

Certains proposent d'encourager le recours à des investisseurs. Mais mises à part les démarches basées sur la solidarité comme Terre de Liens, ces apporteurs de capitaux attendront une rentabilité élevée des capitaux investis.

Quelle maîtrise garderont les agriculteurs sur leur processus de production ?

Il faut revenir à des structures de taille acceptable et plus facilement transmissibles.

Quelles sont vos pistes de réflexion ?

Les Safer devraient avoir connaissance de toutes les ventes de terres mais aussi du marché locatif et de celui des parts sociales qui échappent à tout contrôle. Il faudrait aussi faire fonctionner les CDOA avec une information transparente et faire en sorte que les candidats potentiels à la reprise ne soient pas découragés en amont...

Tout cela exige des pouvoirs publics une réflexion sur le modèle d'agriculture qu'ils souhaitent.

Les aides publiques ne doivent plus inciter à l'agrandissement sans fin : les plus grandes exploitations ne créent pas toujours le plus de valeur ajoutée ni ne pérennisent le plus d'emplois.