Faire un bon « casting » dépend de la rotation et des fonctions recherchées avec le couvert : l'historique de la parcelle, le précédent, la culture suivante, la problématique spécifique (contrôle d'adventices, de maladies, structure...) entrent en ligne de compte. Ainsi, lors du passage au non-travail du sol, il faut remplacer la porosité mécanique par de la porosité biologique, « qui arrivera naturellement au bout de trois ans environ », précise Jean-Luc Forrler, conseiller à la chambre d'agriculture de Moselle. Le choix se portera donc sur des couverts qui structurent le sol, en associant des espèces à systèmes racinaires complémentaires (fasciculés et pivotants). Pour le conseiller, pour capter l'azote et le relarguer, le couvert doit contenir 30 à 50 % de légumineuses ou de protéagineux. « Au début du passage en agriculture de conservation, il y a une forte consommation d'azote, notamment en raison de la hausse de la biomasse microbienne. De plus, une légumineuse injecte 30 % de carbone en plus qu'une autre famille. Cela permettra de nourrir la vie microbienne via les exsudats racinaires. »

TROIS À QUATRE ESPÈCES

Le couvert doit être composé de trois à quatre espèces, afin de fournir aux organismes du sol de 4 à 5 tonnes de matière sèche par hectare. « Il faut avoir toujours un couvert qui pousse, pour concurrencer les adventices, ajoute Daniel Brémond, agriculteur à Oraison, en semis direct sous couvert végétal. C'est une course de relais ! » Cela permet aussi de mieux jongler avec les aléas climatiques.

Pour les systèmes avec élevage, la paille est généralement prélevée alors que, grâce à son rapport C/N proche de 100, elle alimente les champignons du sol. « Il faudra compenser cette exportation par un couvert riche en matière ligneuse, comme le lin, les crucifères ou les céréales, telles que l'avoine », précise Jean-Luc Forrler. Pour une interculture courte, le sarrazin occupera vite l'espace afin de concurrencer les adventices. Il pourra être mélangé avec du lin et de la vesce qui prendra le relais du sarrazin pour couvrir le sol.

Si les couverts sont détruits avant le semis (SCV sur couvert mort), ils peuvent être « calmés » par des petites doses de désherbants et rester en place plusieurs années, à l'instar la luzerne (SCV sur couvert vivant).

SÉLECTIONNER LA VIGUEUR

Les variétés utilisées en conventionnel et en bio ne sont pas forcément adaptées à l'agriculture de conservation (AC), car il faut allier productivité, qualité du grain, résistance aux maladies et à la verse, pouvoir couvrant, terroir et, enfin, bonne vigueur au départ et en végétation. Ces critères sont déjà pris en compte séparément dans les programmes de sélection publics ou privés pour des systèmes bio et conventionnels. « Parmi les évolutions possibles de notre programme de sélection du blé tendre, une des pistes est une éventuelle prise en compte des besoins spécifiques en sélection des systèmes TCS ou d'agriculture de conservation, » estime Bernard Rolland, de l'Inra de Rennes. En attendant, les résultats de la recherche, des essais variétaux de semenciers sont déjà en cours chez des agriculteurs. « Une levée rapide permet de mieux résister aux attaques de limaces, note Daniel Brémond. La bonne vigueur en végétation permettra de récolter plus tôt, donc d'installer un couvert plus tôt. »

MÉLANGES VARIÉTAUX

Mais parfois, la meilleure solution pour avoir un maximum de qualités techniques, c'est de mélanger les variétés. Chez Jean-Claude Quillet, agriculteur près de Tours, cette pratique est courante depuis 1998 (lire en page 40). « J'utilise deux mélanges de variétés de blé, un après colza un peu plus précoce, et un autre après maïs, millet ou sorgho, témoigne-t-il. Le but est d'allier productivité, qualité panifiable et résistance aux maladies. Si une variété sensible à la rouille jaune côtoie dans le mélange d'autres peu sensibles, l'explosion de la maladie sera évitée. » Le problème de cette pratique est la vente de la récolte aux coopératives, qui, en général, préfèrent les variétés pures.