Agriculteur et aide-soignant : le profil est atypique. L'agriculture, c'est un héritage familial. Le monde de la santé, c'est sa femme, infirmière, qui le lui a fait découvrir. Un « monde attrayant » et « pas trop routinier », apprécie-t-il. Mais si avoir une activité extérieure « permet de voir autre chose que l'agriculture », pour Mathieu Ménard, c'était avant tout une nécessité.

Ce jeune double actif a toujours voulu s'installer sur l'exploitation familiale, en Touraine : une SCEA entre son père et son oncle, qui regroupe deux fermes d'une centaine d'hectares chacune, en grandes cultures. « Mais je ne suis pas fou, tempère-t-il. Je n'étais pas prêt à m'installer à tout prix, il fallait avant tout que ce soit rentable. Et pour ça, il ne faut pas se tromper sur l'étude prévisionnelle. » Il ne se précipite donc pas pour racheter les parts de son père lorsque ce dernier prend sa retraite. D'autres repreneurs se montrent intéressés mais leur étude prévisionnelle d'installation ne passe pas.

Mathieu se lance finalement à l'été 2009. « A cette époque, le cours des céréales était bas, autour de 100 €/t, rappelle-t-il. Dans ces conditions, l'exploitation n'était pas viable, il me fallait un deuxième emploi. » Cela tombe bien, il vient d'achever sa formation d'aide-soignant. Le dossier est accepté et il s'installe en 2010, avec les aides, en tant qu'agriculteur à titre principal. Avec la sécurité que lui apporte son activité extérieure : « Si l'exploitation ne marchait pas bien, je pourrais toujours travailler à 80 % comme aide-soignant afin de dégager un revenu correct. »

FILET DE SÉCURITÉ

Depuis deux ans, il cumule deux activités et donc, deux régimes de protection sociale. Associé exploitant dans la SCEA familiale, il exerce aussi comme aide-soignant par le biais d'une société d'intérim spécialisée et d'un centre de soins à domicile.

Aujourd'hui, le cours des céréales est remonté. L'exploitation a une meilleure assise financière, ce qui lui permet de lever le pied dans son activité d'aide-soignant. D'abord pour une question de temps : son exploitation et ses trois enfants en bas âge lui en demandent déjà beaucoup. Ensuite, pour ne pas surcharger sa feuille d'impôts lorsque l'exploitation dégage assez de résultat. Dans le cas contraire, comme l'an dernier avec la sécheresse, un complément de revenu extérieur est apprécié.

D'ici deux ans, le jeune agriculteur envisage de reprendre les parts de son oncle, qui partira à son tour à la retraite. « Je n'aurai plus besoin ni le temps d'avoir une double activité », prévoit-il. Mais sa formation et son expérience d'aide-soignant restent un filet de sécurité. « Dans le futur, avec la réforme de la Pac, on ne sait pas comment ça va se passer... »