Fin 2008, Karine Bel devait annoncer à ses parents, agriculteurs à Caillavet (Gers), qu'elle reprenait ses études à la fac. Tout était prêt pour son départ à Montpellier. Après avoir passé un bac littéraire, suivi une formation en gestion administrative et exercé différents métiers - animatrice d'un Point information jeunesse, secrétaire médicale en neuropsychiatrie, assistante familiale -, elle arrivait à un moment de sa vie où elle avait « besoin d'autre chose. Or, le jour où je suis allée leur parler de mes projets, ils m'ont proposé de reprendre l'exploitation, raconte-telle. J'ai toujours aimé la campagne mais je n'avais jamais envisagé cette possibilité. J'ai pris le temps de réfléchir. Agriculteur, c'est un beau métier mais très dur aussi. D'un côté, on a la qualité de vie, la nature et la liberté de s'organiser comme on l'entend. De l'autre, la rigueur du travail, l'absence de week-ends, de vacances. Finalement, je me suis dit que c'était cette vie qu'il me fallait ! »

Karine entre en formation agricole à Mirande (Gers) pour obtenir son BPREA (1). Une phase importante de son parcours car les différentes rencontres avec les formateurs, les étudiants et ses deux maîtres de stage, l'un travaillant en bio, l'autre en conventionnel et très engagé en agroforesterie, lui « ouvrent l'esprit sur le monde agricole ».

A 36 ans, elle décide de s'installer en Gaec avec son cousin, dont le projet avait toujours été de reprendre les bovins et grandes cultures (377 ha) de l'exploitation familiale. « Moi, je voulais apporter quelque chose de nouveau, qui me ressemble et dont je pourrai être fière, poursuit Karine. J'envisageais un élevage en cycle court et un fonctionnement écologique. Mes bâtiments devaient s'intégrer au paysage, être polyvalents (poulets, pintades, canards…) et autonomes en eau et en énergie. »

UN SURCOÛT COMPENSÉ PAR DES ÉCONOMIES D'ÉNERGIE

Avec l'aide de Vivanat, filiale environnementale de la coopérative Vivadour, Karine choisit les équipements de ses deux bâtiments de 400 m2 : récupérateurs d'eau, panneaux photovoltaïques, éoliennes, double isolation sous toiture pour l'un des deux ateliers et finition soignée. « Même si cela coûtait plus cher, j'ai voulu qu'ils soient couverts de tôles laquées bois, précise Karine. Cet hiver, je planterai aussi des haies paysagères. »

Le surcoût du projet, environ 40 000 € sur une facture totale de 191 000 €, devrait être compensé par les économies d'énergie. « Je ne veux pas d'une activité qui ampute le bénéfice de l'exploitation, précise la jeune femme. L'atelier avicole devrait s'autofinancer dès la première année avec un petit bénéfice. »

Très méthodique, Karine relève chaque jour tous ses compteurs (température, qualité de l'air…) et la mortalité des poulets, afin d'obtenir des données par tranches de 24 heures. Après 18 jours d'exploitation, elle a constaté une différence entre les deux bâtiments, avec une consommation de chauffage réduite de moitié grâce à la double isolation.

Le projet est conçu pour évoluer. Deux hectares de parcours par bâtiment permettront de passer en bio. Elle a fait installer le courant électrique monophasé et triphasé, ainsi qu'une ligne de téléphone. A l'intérieur des salles d'élevage, des arrivées d'eau et d'électricité lui font économiser du temps et facilitent son travail. « C'est un atelier que j'aime, conclut Karine. Je suis contente d'arriver le matin et de m'occuper de mes poulets. »

(1) Brevet professionnel responsable d'exploitation agricole.