Le poste des engrais est en constante augmentation dans le budget des exploitations. Patrick Losmède, agriculteur à La Chapelle-Grésignac, en Dordogne, en a fait le constat.
« J'ai donc cherché un moyen de diminuer la facture en réduisant les pertes. Les printemps étant de plus en plus secs, les risques de pertes par évaporation vont donc grandissant, explique-t-il. J'ai donc opté pour l'enfouissement de l'azote, dont les avantages en termes de réduction de doses ne sont plus à prouver. »
Ainsi, l'agriculteur apporte une partie de son engrais en localisé au moment de ses semis de maïs. Mais il a souhaité aller plus loin en enfouissant également les apports suivants.
« Pour cela, j'ai conçu un automoteur qui va me permettre d'enfouir mon azote liquide », indique Patrick. L'appareil va réaliser sa première campagne.
3.000 litres d'autonomie
La base de la machine est un pulvérisateur automoteur Evrard. « L'appareil était bon pour la réforme. Malgré tout, la mécanique et la cuve étaient encore en bon état », précise l'agriculteur.
Il s'agit d'un appareil de 100 ch, d'une autonomie de 3.000 litres. « Il était équipé d'une rampe frontale, signale-t-il. Je l'ai démontée pour ne conserver que le parallélogramme. »
Sur ce dernier, l'agriculteur a fixé un châssis pouvant supporter douze dents d'enfouissage. « Ce châssis est entièrement fabriqué avec de la ferraille de récupération. La partie centrale provient d'un ancien chisel que j'ai remodifié. Les extensions se présentent sous la forme d'une poutre unique repliable en deux parties », note Patrick.
Au travail, elles reposent sur des roues, ce qui permet un suivi du terrain. Cette configuration des extensions en deux parties procure un gabarit adéquat pour les déplacements. L'appareil affiche une largeur hors tout de 2,80 m pour une hauteur de 3,80 m.
« Je peux donc me déplacer seul sur la route et passer sans encombre sous les fils téléphoniques (hauteur réglementaire des lignes fixée à 4,50 m au plus bas) », apprécie-t-il. Ce schéma de repliage permet également un verrouillage automatique du système, la partie droite venant s'imbriquer dans la gauche.
Les dents d'enfouissage sont disposées sur une rangée. Elles se composent d'une sécurité à queue de cochon et d'un soc injecteur démontable. Le dosage et l'acheminement de l'azote jusqu'aux injecteurs s'effectuent en partie grâce à l'ancien circuit de pulvérisation de l'automoteur. La pompe et la régulation DPAM ont été conservées.
« J'ai aussi réemployé une partie des canalisations en Inox des rampes, de même que douze porte-buses avec leurs antigouttes calibrés à 5 mm », complète l'agriculteur.
Enfin, Patrick Losmède a changé la monte de pneumatiques de son appareil. « Je peux ainsi passer dans les champs de maïs sans écraser de rangs. De plus, les dimensions qu'il a fallu monter entraînent un abaissement de la garde au sol de l'automoteur », précise-t-il.
Au total, il lui aura fallu 60 heures de travail pour réaliser cette transformation.
Fraction liquide de lisier de canards
Patrick Losmède ne va pas s'arrêter à l'enfouissage d'azote liquide. Avec son épouse, il est également gaveur de canards. Il compte donc utiliser son automoteur pour injecter la fraction liquide du lisier de son élevage.
A la clé, une économie d'intrant supplémentaire. Grâce à l'enfouissage des engrais liquides, l'exploitation espère pouvoir économiser jusqu'à 30 unités à l'hectare sur ses apports d'azote.
Un adepte de l'autoconstruction
Patrick Losmède n'en est pas à son coup d'essai avec cet automoteur. En effet, il a construit lui-même bon nombre de matériels se trouvant sur son exploitation. A commencer par l'ensemble des bâtiments !
Ainsi, les hangars de stockage du matériel et d'élevage des canards ont été assemblés par ses soins.Autre réalisation de l'agriculteur, un séchoir à maïs fonctionnant par gravité. De la fosse de réception à la vidange dans une remorque, on ne retrouve que deux moteurs électriques animant deux élévateurs.Patrick
Losmède a également réalisé une bonne partie de son installation d'irrigation, depuis la station de pompage jusqu'aux pivots. La liste est loin d'être exhaustive et n'a pas fini de s'allonger. En effet, la dernière fabrication en cours est un combiné de travail du sol semi-porté permettant de décompacter et déchaumer en un passage.
L'appareil repose sur un châssis de cover-crop John Deere dépouillé de ses trains de disques. A l'avant, l'agriculteur a fixé un bâti de décompacteur doté de huit dents Michel. A l'arrière, on retrouve un chisel muni de onze dents réparties sur trois rangées.
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