Christophe Claudel a des journées bien remplies, et ses nuits aussi durant cinq mois par an. Jeune agriculteur de 27 ans, il s'est installé en 2008 en Gaec laitier avec ses parents, à Basse-sur-le-Rupt, dans les Vosges (814 mètres d'altitude).
La passion de la montagne
L'hiver, quand la neige envahit les prairies et les skieurs les stations voisines, Christophe consacre ses nuits au damage des pistes. « C'est la passion du métier et de la montagne qui me fait monter là-haut, dès deux heures du matin », affirme-t-il.
Il rejoint une équipe d'une douzaine de personnes à la station de La Bresse, à vingt kilomètres de la ferme. Ils s'efforcent ensemble, nuit après nuit, de rendre les 250 hectares de pistes « lisses comme un billard ».
« On étale les tas de neige, on remonte celle descendue en bas des pistes, on crée des virages relevés... Le tout sur des machines qui ne sont pas banales ! » Christophe conduit des dameuses équipées de treuils, permettant au chauffeur d'assurer ses descentes et ses remontées en s'accrochant à un arbre ou à un pilier.
« La pente, ça nous connaît, assure-t-il. C'est un plaisir de travailler la neige de nuit. Au petit matin, quand le soleil se lève et qu'on aperçoit les Alpes, on s'arrête casser la croûte en admirant le paysage. » Christophe dit éprouver « le même plaisir » lorsqu'il se lève pour aller chercher les vaches, « quand tout est encore calme et sans bruit ». Quand sonne neuf heures et que les skieurs grimpent en haut des pistes, il redescend à la ferme retrouver ses parents, ses vaches et son « vrai métier ».
Un complément de revenu indispensable
Les deux premières années de son installation, Christophe a assuré les saisons complètes de décembre à avril. « Mes parents s'occupaient de l'exploitation. Je me contentais de la traite du soir. C'était usant », avoue-t-il. Mais à 6.500 euros la saison, ce complément de revenu s'est avéré « indispensable pour vivre ».
En effet, à sa création, le Gaec a entrepris d'augmenter petit à petit le troupeau, en passant de vingt-cinq à quarante têtes et d'agrandir les bâtiments existants.
« Nous avons acheté une pelleteuse pour faire tous les travaux nous-mêmes, ça nous a pris du temps... » Et de l'argent. Ce n'est qu'après trois ans d'activité qu'ils ont commencé à dégager un revenu. L'occasion pour le pluriactif de « baisser le régime ». Cette année, il n'a damé que deux à trois nuits par semaine.
Les montagnards multiactifs
Christophe et ses parents peuvent aussi compter sur les revenus produits par leurs deux gîtes ruraux. « Tous les montagnards ne sont pas pluriactifs, tient à préciser le jeune homme. Mais entre les coupes de bois, la fauche dans les pentes, les tâches mécaniques et les travaux de construction, nous sommes tous, de fait, multiactifs ! »
Un agrément Gaec sous surveillance« L'organisation en Gaec est indispensable pour travailler à l'extérieur de l'exploitation, assure Christophe Claudel. Je peux me permettre d'aller damer les pistes l'hiver parce que mes parents sont là pour s'occuper de la ferme. » Par principe, l'exploitation en Gaec repose sur l'activité à temps complet des associés. Les comités d'agrément appliquent cette règle strictement mais acceptent parfois des activités de faible ampleur. « J'ai bénéficié d'une dérogation spéciale », confirme Christophe. Durée de l'autorisation : cinq ans, le temps de consolider son installation. Dans deux ans, il envisage d'arrêter le damage. A contrecoeur. « Mais ma priorité, c'est l'exploitation. Mon métier, c'est avant tout agriculteur, pas chauffeur de machine ! » |