Ce levier est apparemment le plus simple à mettre en oeuvre. « L'augmentation du niveau azoté de la ration, de 95 à 105 g de PDI/UFL, ou des apports supplémentaires de concentré de production peuvent permettre de produire en moyenne 30 à 40 l en plus par vache et par mois », estime Rémy Hannequin, conseiller à la chambre d'agriculture de la Somme. Les vaches réagissent vite à un changement d'alimentation grâce à leur plasticité », constate Luc Delaby, de l'Inra.
Cependant, l'efficacité est très variable. La réponse de la vache dépend du niveau de la ration initiale et de son potentiel de production. « A régime identique, plus le potentiel génétique est élevé, plus les vaches produisent, complète Luc Delaby. Les prim'holsteins à potentiel élevé ont une plus forte réactivité que les normandes, mais avec une conséquence négative sur l'état corporel et la reproduction. » Les laitières en « sous-régime » réagissent bien aussi. En revanche, la réponse de celles qui sont déjà à un niveau de production élevé est faible, voire nulle. Ainsi, « avec une ration déjà équilibrée en énergie et en azote, la réponse à l'ajout de 1 kg de concentré sera plutôt de l'ordre de 0,3 à 0,4 kg de lait », explique Benoît Rubin, de l'Institut de l'élevage.
Augmenter les apports de concentré. Si la quantité initiale de concentré est inférieure à 4 kg, avec une ration à base d'ensilage de maïs et/ou d'herbe conservée, ajouter 1 kg de concentré augmente la production de lait de 1 kg, avec une légère hausse du TP. Si la quantité initiale est supérieure à 4 kg, l'ajout de 1 kg se traduira par une hausse de seulement 0,5 kg de lait. Autrement dit, si l'éleveur apporte initialement plus de 200 à 250 g de concentré/l de lait dans une ration à base de maïs ensilage, la réponse à un apport supplémentaire sera très faible. « Cette solution est intéressante si, pour 1 kg de concentré distribué en plus, on fait au minimum 0,6 l de lait en plus », conclut Didier Désarménien, de la chambre d'agriculture de la Mayenne.
Augmenter la densité protéique de la ration. « Si la ration initiale est équilibrée à moins de 90-95 g PDI/UFL, la réponse de la vache sera positive. Mais si elle est déjà à plus de 110 g PDI/UFL, il y aura peu d'impact. » Selon l'Inra, quand la ration passe de 100 à 110 g PDI/UFL (ce qui correspond à environ 1,3 kg de tourteau de colza ou 0,8 kg de tourteau de soja), la hausse attendue est de 0,9 kg de lait/jour. Si elle passe de 100 à 120, le gain est de 1,3 kg de lait. De 110 à 120, le gain n'est que de 0,4 kg de lait.
D'ABORD LES FOURRAGES
« Pour produire du lait, l'objectif premier est de faire manger des fourrages aux vaches, pas d'acheter des concentrés, rappelle Benoît Rubin. Apporter 1,2 kg de concentré pour produire 1 kg de lait n'a pas de sens économique. » Une forte hausse du cours des matières premières pouvant vite faire perdre tout intérêt à ce levier, il vaut mieux calculer le coût marginal du litre de lait supplémentaire avant tout changement.
Par ailleurs, le levier alimentaire présente quelques écueils. Si la vache doit puiser dans ses réserves énergétiques, il y a un risque de baisse du TP et de dégradation de l'état corporel, donc de la fertilité. Attention aussi à ne pas dépasser 30 % de concentrés dans une ration à base de maïs ensilage, 35 % avec une ration à base d'herbe, pour éviter l'acidose.
Sur le long terme, « l'alimentation peut être un levier pour réguler la production laitière, en adoptant une conduite d'élevage flexible, avec des vaches et des génisses en nombre suffisant et qui ne sont pas au maximum de leur potentiel, explique Benoît Rubin. Si la laiterie attribue 10 à 20 % de lait en plus, on met le pied sur l'accélérateur par l'alimentation, et les vaches répondront immédiatement. » Attention, en période de production modérée, les vaches en première lactation ne doivent pas être soumises à une baisse des apports, afin de ne pas brider leur capacité de production future. En revanche, jouer sur le niveau de production des adultes est réversible d'une lactation à l'autre.