Il n'est pas rare de trouver un matériel « fait maison » dans une cours de ferme. Mais lorsqu'il s'agit d'une bonne partie d'un parc de matériel, cela a de quoi interpeller. Ce parc, c'est celui de Daniel Salmon, agriculteur à Fleury-sur-Aire, dans la Meuse.
Cet exploitant a fabriqué plusieurs de ses matériels dont un semoir, une herse peigne ou encore un boisseau de stockage. Il a également modifié son déchaumeur à disques indépendants en outil combinant dents et disques.
Mais la construction la plus remarquable de Daniel Salmon est sans aucun doute son automoteur de pulvérisation.
Certifié conforme
« L'engin repose sur la base d'un tracteur Someca 1300 à deux roues motrices dont j'ai conservé l'ensemble moteur-boîte de vitesses-ponts, confie l'agriculteur. Un châssis intégral constitué de deux longerons repose sur cette base. Toute la partie relative à la pulvérisation ainsi que la cabine sont adaptées sur ce châssis. En cas de problème mécanique, on peut ainsi intervenir plus facilement. »
La cabine est issue d'une moissonneuse-batteuse Case IH Axial-Flow série 1400.
« À son bord, le monolevier permet désormais de gérer la levée et la descente des rampes, la géométrie variable et le correcteur de dévers. Sur la moissonneuse-batteuse dont il est issu, ce levier a aussi pour fonction de gérer l'avancement de la machine. Ici, il gère la régulation lorsque le pulvérisateur est utilisé en manuel », explique Daniel.
Du côté de la pulvérisation, on retrouve une cuve de 3.300 l du commerce. Le choix s'est porté sur un modèle permettant de rester dans un gabarit routier de 2,55 m. La régulation est de type DPAE par capteur de pression.
« L'information de vitesse est donnée par un capteur placé sur la roue avant gauche. L'automoteur étant un deux roues motrices, il n'y a pas d'erreur due à un patinage éventuel », précise Daniel.
Celui-ci poursuit : « Le circuit d'eau est conçu de la manière suivante. Le remplissage se fait par hydro-injecteur, l'eau passant par un compteur volumétrique en relation avec le contrôleur en cabine. J'ai également construit le circuit de manière à pouvoir rincer mes bidons à l'eau claire depuis l'incorporateur. »
Visibilité. L'automoteur de Daniel Salmon possède une visibité remarquable pour un appareil à rampes frontales.
Balancier au travail. Les deux éléments du châssis se comportent comme un balancier afin de suivre les irrégularités du terrain.
Bande. Le semis se fait en arrière de chaque dent sur une bande de 4 cm de largeur.
Goutte d'eau. Daniel a monté des socs en forrme de goutte d'eau sur les dents de sa herse peigne. Ainsi, il diminue l'usure de ces dents et améliore l'action de l'appareil.
Combiné. Daniel a ajouté une rangée de dents de chisel à l'avant de son déchaumeur.
Le circuit de pulvérisation est complété par une pompe à six membranes reliée à la prise de force du tracteur ayant servi de base. Une cuve de rinçage de 600 l fait également partie des équipements.
Les rampes sont aussi de fabrication maison. Larges de 30 m, elles sont conçues pour prendre un minimum d'encombrement.
Le cadre central offre ainsi une visibilité remarquable pour un appareil à rampes frontales. Celui-ci intègre une suspension pendulaire par vérin amortisseur et un système antifouettement.
Daniel Salmon a mûrement réfléchi la construction de son appareil. Rien d'étonnant à ce que celui-ci ait obtenu son certificat de contrôle technique.
Un semoir pour les terres pierreuses
Daniel Salmon a aussi construit son semoir. « Les parcelles de l'exploitation présentent un relief en hélice et possèdent un fort taux de cailloux. J'ai donc voulu créer un semoir pouvant à la fois suivre les irrégularités du terrain et passer dans les pierres », indique l'exploitant.
Le semoir de 4,30 m de largeur de travail possède un enterrage à dents. De fabrication maison, ces dernières sont construites en Creusabro pour une plus grande résistance à l'usure. Cet acier offre en effet une résistance à l'abrasion supérieure de 50 % à celle d'un acier trempé classique.
« J'ai également choisi de disposer ces dents sur un châssis à quatre rangées pour permettre une meilleure circulation des pierres et limiter les risques de bourrage », complète Daniel.
Ce châssis se compose de deux éléments montés sur pivots et repliable hydrauliquement. Au travail, chacun repose sur deux rouleaux (un avant et un arrière) pour former un système de balancier et ainsi permettre un suivi du terrain.
Pour la trémie et la distribution, Daniel Salmon a adapté un ensemble Accord. Qu'il a modifié à son goût.
« La trémie a été rehaussée pour atteindre 12 quintaux de capacité. La distribution possède désormais une deuxième vitesse pour le colza et un dispositif d'amorçage des descentes pour les débuts de rangs. Le système, qui vient en parallèle de l'entraînement mécanique classique, est animé par un moteur électrique qui charge la distribution en semences. Cependant, pour que ce double entraînement fonctionne, il m'a fallu concevoir une double roue libre à partir de mécanismes de roues de vélo ! »
Daniel devrait prochainement faire évoluer son semoir : « Pour améliorer la précision d'implantation, je compte installer des "décompresseurs" en bout des descentes qui élimineront tout risque de rebond des graines sur la ligne de semis. »
Des outils de travail du sol maison
Daniel Salmon a également construit une bonne partie de ses outils de travail du sol. On peut ainsi citer un déchaumeur à dents ou encore un décompacteur de huit dents.
« Pour ce dernier, j'ai opté pour des dents droites qui évitent les remontées de pierres. Tout a été confectionné à l'atelier, aussi bien le bâti que les dents. Comme pour le semoir, elles sont en Creusabro pour résister à l'abrasion des pierres. »
L'agriculteur a également confectionné une herse peigne. « Pour la fabrication, j'ai pris exemple sur les modèles du marché. Cependant, j'y ai ajouté une petite touche personnelle », révèle Daniel. En effet, en y regardant de plus près, on s'aperçoit que chaque dent est équipée d'un soc en forme de goutte d'eau améliorant l'action de l'appareil.
La dernière modification en date concerne le déchaumeur à disques indépendants, un appareil porté acheté d'occasion. Ce dernier est devenu semi-porté et possède une tête d'attelage pivotante pour un meilleur travail dans les parcelles irrégulières de l'exploitation. Daniel a ajouté une rangée de dents de chisel à l'avant de l'appareil.
« J'obtiens ainsi un outil complet qui me permet d'économiser un passage », conclut-il.
Un boisseau automatiséDaniel Salmon ne s'est pas arrêté à la construction du matériel de culture. L'agriculteur a en effet fabriqué son propre boisseau de stockage. D'une contenance de 35 t, celui-ci est entièrement automatisé. L'agriculteur-constructeur a installé deux palpeurs (un dans le boisseau et un en bout d'élévateur) permettant d'arrêter automatiquement l'installation lorsque celle-ci tourne à vide ou lorsque le boisseau est plein.
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Le boisseau de Daniel Salmon est entièrement automatisé. Les élévateurs cessent de fonctionner lorsqu'ils tournent à vide où lorsque le boisseau est plein.