Dans les céréales, on assiste à une recrudescence des populations de graminées de type brome, vulpin, folle avoine et, dans une plus faible mesure, ray-grass. Les pertes de rendement peuvent atteindre 30 q/ha dans les situations les plus sévères.

Plusieurs éléments sont en cause : la progression des surfaces de cultures d'hiver, dont la période d'implantation correspond à la période de levée préférentielle du vulpin, ray-grass, brome, etc., le développement des techniques sans labour, la simplification des stratégies de désherbage antigraminées (traitement unique, moindre utilisation des herbicides racinaires au profit des foliaires...).

A cela s'ajoute le développement de populations de graminées résistantes aux dimes et aux fops et/ou aux sulfonylurées. Seul mot d'ordre donc : combiner les techniques pour limiter l'utilisation des herbicides.

Au-delà de l'application de programmes herbicides associés ou non à un désherbage mécanique, la mise en place de moyens de lutte agronomiques reste essentielle pour maîtriser la densité des adventices et diminuer les IFT (indices de fréquence des traitements).

Mais si techniquement il est possible de faire baisser ces IFT, d'un point de vue organisationnel, ce sera beaucoup plus compliqué. A chacun donc d'adapter ces techniques selon le contexte de l'exploitation.

 

 

Diversifier l'assolement

L'introduction d'une nouvelle espèce dans la rotation permet d'alterner les périodes et les techniques de semis, ce qui perturbe le cycle des adventices. Autre intérêt : la diversification des solutions de désherbage en variant les modes d'action.

Ainsi, il est souvent conseillé de profiter du colza pour contrôler le vulpin et le ray-grass grâce à la carbétamide (Légurame) et à la propyzamide (Kerb Flo). Il reste qu'il n'est pas toujours envisageable d'introduire une ou plusieurs cultures de printemps dans toutes les parcelles.

Et la question du débouché et de la rentabilité économique se pose aussi. Retarder de quelques jours la date de semis pour accroître la levée des mauvaises herbes avant l'implantation peut être bénéfique lorsque le salissement est important, notamment en cas de vulpin, ray-grass et brome.

Une pratique qui pénalise parfois le rendement et qui n'est pas toujours facile à pratiquer en raison du faible nombre de fenêtres météorologiques favorables pour semer. La dose de semences doit par ailleurs être augmentée.

Autre levier d'action : le fauchage de l'extérieur des parcelles car il maintient une flore diversifiée qui évite l'installation des bromes, gaillets ou encore géraniums. L'utilisation d'un récupérateur de menue paille peut aussi contribuer à ralentir la prolifération d'adventices, avec une économie possible de 20 €/ha.

Réduire le stock semencier

Les déchaumages postrécolte, le faux semis et le labour permettent de diminuer le stock semencier. La première technique, qui stimule la levée des graines d'adventices, se révèle efficace lorsque la parcelle est très sale à la récolte. Les outils travaillant superficiellement (5-6 cm de profondeur) et de manière rappuyée sont plus aptes à faire lever les adventices.

Le faux semis est surtout efficace pour épuiser le stock semencier dans les céréales d'hiver. Il consiste à réaliser, de façon très superficielle, un lit de semences anticipé pour provoquer la levée des mauvaises herbes avant l'implantation de la culture.

« L'efficacité du faux semis dépend de la qualité du lit de semences, de l'humidité et des mauvaises herbes », détaille Arvalis. Les espèces à levée précoce et groupée, dont les semences ont une faible dormance comme le vulpin, seront les mieux contrôlées par les faux semis de fin d'été au début d'automne.

Un déchaumage n'est en effet pas efficace sur vulpin car il ne germe pas après la récolte. Mais cette technique devient plus difficile avec une culture intermédiaire. Plusieurs règles sont donc à respecter pour éviter des phénomènes d'envahissement.

Arvalis conseille une implantation sur une parcelle propre, plutôt à la fin d'août avant les pluies, de choisir des couverts à levée rapide afin que ce soit la culture intermédiaire qui concurrence l'adventice et pas l'inverse.

Le mode de destruction devra éviter les phénomènes de repiquage dans la culture suivante. Quant au labour, il va surtout enfouir les graines des annuelles en profondeur (au-delà de 15 cm), inhibant leur germination et mettant en dormance les semences persistantes (brome, par exemple).

« Le travail profond du sol est un levier agronomique très puissant dans la gestion des adventices, souligne Arvalis. Mais il n'est pas forcément nécessaire de le pratiquer sur toutes les parcelles, chaque année. Un labour dans les situations à problèmes, tous les trois ou quatre ans, est une solution efficace et économique. »

Des variétés étouffantes

Le pouvoir couvrant des variétés de blé associé à une forte agressivité au tallage est aussi une piste pour limiter les adventices.

Des essais réalisés par Arvalis mettent en évidence des différences entre les variétés de blé tendre vis-à-vis de la concurrence contre les adventices.

Celles qui ont une croissance très rapide (Saturnus, Cézanne, Apache...) sont les plus efficaces contre le ray-grass. A l'inverse, Glasgow et Caphorn sont moins performantes. « Mais l'effet du pouvoir couvrant sur une forte population ne peut excéder 10-15 % », relativise Arvalis. 

  

 

Le réseau Florad

Le réseau Florad, démarré en 2008, regroupe des experts qui travaillent sur la gestion de la flore adventice en grandes cultures. Il regroupe des instituts techniques, des chambres d'agriculture, la recherche publique et l'enseignement agricole.

L'objectif est de développer des solutions d'avenir pour le désherbage dans un contexte de réduction réglementaire de l'utilisation des phytos et de développement d'adventices résistantes.

 

 

Deux mécanismes de résistance

Une plante ne devient pas résistante par l'application d'un herbicide, c'est l'application répétée d'herbicides de la même famille qui permet à quelques individus naturellement résistants de se multiplier.

Cette sélection conduit à une population résistante de plus en plus importante et donc, à terme, à une inefficacité de la famille d'herbicides utilisée de façon répétée. On peut ainsi trouver sur certaines parcelles des ray-grass résistants aux fops et aux dimes et/ou aux sulfos.

Les plantes ont principalement deux mécanismes de résistance :

- la mutation de la cible de la matière active, qui ne peut alors plus l'atteindre et être efficace,

- ou la destruction de la matière active par le métabolisme de la plante.

Une fois dans la parcelle, la résistance, qui peut survenir en cinq ans, sera définitive.

 

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