Les « fondamentaux »...
Cette expression s'incruste dans quasiment tous les articles qui traitent de l'actualité des marchés céréaliers. Ce terme désigne toutes les informations qui renseignent sur l'état de l'offre, de la demande et des stocks.
L'analyse de ces fondamentaux permet d'évaluer, à l'échelle d'une campagne, les disponibilités pour chaque produit et d'anticiper des échanges lourds, équilibrés ou tendus. Cela permet de savoir qui, du vendeur ou de l'acheteur, sera en position de force et donc d'anticiper des tendances de prix. L'agriculteur peut s'en servir pour définir ses objectifs de prix de vente.
Offre : observer les semis, la météo et les décisions politiques
L'offre mondiale peut être considérée comme la résultante des surfaces emblavées couplée à une météorologie plus ou moins clémente. Dès lors, ces deux critères sensibles sont à surveiller de près. A plus long terme, les politiques de régulation des marchés agricoles des différents pays exportateurs impactent aussi le niveau de l'offre.
« Lorsque le Kazakhstan décide de subventionner ses exportations de blé au travers d'aides au transport, cela implique potentiellement des quantités de blé supplémentaires disponibles pour approvisionner le marché mondial », analyse Andrée Defois, directrice de Tallage stratégie grains.
Demande : trois consommateurs : l'industrie, l'alimentation humaine et animale
La consommation humaine est assez prévisible et augmente schématiquement au rythme de la croissance de la population mondiale. C'est un facteur qui ne peut pas donner une nouvelle tendance au marché à l'échelle de la campagne. En revanche, la consommation d'aliments du bétail est déjà plus sensible à des variations à court terme, en fonction du prix du lait et de la viande.
Les industriels utilisateurs de matières premières agricoles peuvent ajuster leurs capacités et leurs cadences en fonction de certains facteurs favorables ou perturbateurs, ce qui peut modifier le niveau de la demande.L'intensité des échanges mondiaux est un bon indicateur de la dynamique de la consommation. « Quand on apprend que la France vend 200 000 t de blé à l'Egypte, il est important d'évaluer comment cela peut impacter le marché français », relève Nicolas Pinchon, conseiller chez Agritel.
Stocks : étudier les bilans prévisionnels
Le bilan prévisionnel résume, à un instant donné, les prévisions du déroulement de toute la campagne en cours ou à venir, au regard des informations actuelles. Le bilan décrit les perspectives d'offre et soustrait les perspectives de demande permettant d'estimer le stock qui se reportera sur la campagne suivante.
C'est un exercice auquel se livrent une multitude d'organismes. Les bilans sont réajustés régulièrement en fonction des nouvelles informations, ce qui ne manque pas de faire frémir les marchés lorsque les prévisions font le grand écart d'une analyse à l'autre.
Revenu : fixer des objectifs de vente
L'analyse des fondamentaux doit permettre d'établir une fourchette de prix potentiels du marché, avec une limite haute et une limite basse. L'agriculteur définit ainsi son prix d'objectif en faisant un compromis entre le revenu souhaité et les perspectives. Pour la récolte 2010, de nombreux organismes de conseils ont incité leurs adhérents à vendre une partie de leur blé dès les semis. Les prix de seuil étaient atteints, avec des perspectives de hausse limitées même en cas d'incidents climatiques car les stocks sont lourds.
« Si, au regard de ces perspectives, il semble difficile d'atteindre un prix rémunérateur, il faudrait songer à limiter les nouveaux investissements ou revoir les perspectives de revenu à la baisse », explique Benoît Labouille, directeur d'Offre et demande agricole.
Information : adopter une méthodologie
Selon Benoît Labouille, « l'information va devenir le nerf de la guerre. L'agriculteur va en recevoir de plus en plus, mais il devra faire le tri, hiérarchiser, juger et pondérer pour donner à chacune l'importance qu'elle mérite ». Quelles sont les informations à regarder tous les jours, toutes les semaines ou tous les mois ?
En réfléchissant à ces questions, l'agriculteur peut se constituer une méthode pour rester informé des éléments qu'il juge importants. Investir dans une source d'informations spécialisées permet de déléguer à des spécialistes une partie du temps de surveillance nécessaire. À chacun de choisir entre les sources qui donnent des informations brutes et celles qui s'orientent vers du conseil. Se constituer un réseau permet parfois d'accéder à des informations exclusives.
Les rapports qui animent les marchés :•Le Wasde (World Agricultural Supply and Demand Estimates) est publié généralement au cours de la deuxième semaine de chaque mois par le département américain à l'Agriculture (USDA). Disponible en anglais gratuitement sur leur site, il donne les perspectives de production et de consommation pour les grandes productions. •Le Grain Market Reportest diffusé par le Conseil international des céréales (CIC) la dernière semaine de chaque mois. Il est payant mais une synthèse gratuite est disponible sur leur site. Il analyse l'offre et la demande mondiale, ainsi que le dynamisme de la consommation et des échanges. •Les bilans FranceAgriMersont publiés à l'issue du conseil spécialisé grandes cultures, le deuxième mercredi de chaque mois. Ce rapport indique comment se fait l'équilibre entre l'offre et la demande française, et met ces chiffres en perspective de différents éléments d'actualité. |