Pour acheter et utiliser des produits phytosanitaires, il faudra bientôt que les agriculteurs présentent un Certiphyto, sous forme de carte de crédit délivrée par FranceAgriMer.

Si ce certificat devient obligatoire pour chaque agriculteur en 2014, une phase expérimentale pour son obtention est lancée dès maintenant jusqu'en juin 2011 (les salariés d'exploitation ne sont pas concernés).

Elle est d'ailleurs aussi ouverte aux conseillers et distributeurs dont l'obligation de Certiphyto sera effective dans le courant de 2010 ou 2011, juste après la sortie des textes d'application de la loi Grenelle 2.

Ce test grandeur nature permettra de caler les modalités pédagogiques et leurs mises en oeuvre, qui formeront à terme de 800.000 à 900.000 agriculteurs, distributeurs, conseillers. Un vrai défi pour le ministère, qui laisse les rênes à FranceAgriMer pour la gestion.

L'objectif final est, essentiellement, que tous les agriculteurs puissent identifier et minimiser les risques liés à l'utilisation des produits phyto, raisonner leurs usages et limiter leur impact sur l'environnement.

Quatre voies d'accès

Pour obtenir son Certiphyto d'une durée de validité de dix ans, l'agriculteur devra se présenter à son centre de formation et choisir parmi quatre voies d'accès (A, B, C, D). La voie A permet une validation directe des acquis académiques, de la formation professionnelle et continue.

Certainement la voie la plus rapide à condition d'être titulaire depuis moins de dix ans d'un diplôme inclus dans une liste disponible prochainement. Les dix ans de validité du Certiphyto seront comptés à partir de la date de délivrance du diplôme. A priori, les agriculteurs, applicateurs et décideurs ont des niveaux de formation requis différents.

Pour l'applicateur, le niveau minimal d'un Bepa, BPA ou d'un certificat de spécialisation adossé à des formations de niveau 4 devrait être demandé. Pour le décideur, le niveau 5 serait requis : bac pro, brevet professionnel, bac techno, certificat de spécialisation adossé à des formations de niveau 5 ou certificat de capacité technique agricole et rurale.

La voie B consiste à passer un test sous forme de QCM (une cinquantaine de questions à choix multiple). Près de 360 sont déjà prêts sur les 2.000 nécessaires.

Une évaluation qui sera adaptée selon l'option qui intéresse l'agriculteur : grandes cultures et grande polyculture-élevage, petite polyculture-élevage, viticulture, arboriculture, pépinière-maraîchage de plein champ, cultures sous serres, productions tropicales (banane...).

Le candidat doit s'inscrire dans un centre de formation agréé dont la liste définitive sera bientôt disponible. Pour l'instant, près de 370 organismes sont engagés dans l'expérimentation, dont 125 centres de formation professionnelle et de promotion agricoles, 79 chambres d'agriculture, 74 maisons familiales rurales et 24 coopératives réparties sur toute la France (Dom-Tom compris).

Si le candidat ne réussit pas l'examen, il recommencera plus tard ou s'inscrira dans une formation par la voie C ou D.

La voie C propose une matinée de formation sur la sécurité, les risques et la réglementation, suivie l'après-midi d'un test par QCM sans questions sur le thème exposé le matin. Si l'agriculteur n'obtient pas de résultat satisfaisant, le centre lui proposera de suivre une journée de formation complémentaire en rapport avec ses lacunes. Il obtiendra ensuite son Certiphyto sans repasser par la case QCM.

La voie D permet d'assister à une formation d'une durée de deux jours pour les agriculteurs, sans test.

Outre ces voies d'accès, le ministère prévoit que l'obtention du Certiphyto pourrait être liée à l'engagement dans une mesure agrienvironnementale « Réduction des phytosanitaires » ou encore à la certification « Bio » ou « Agriculture raisonnée ».

Des prises en charge

Le coût d'obtention du Certiphyto variera selon le centre de formation choisi. L'organisme paritaire auprès duquel l'agriculteur cotise et les fonds de formation professionnelle (Vivea, Fafsea) devraient prendre en charge tout ou partie du coût de la formation.

En revanche, les voies A (validation des acquis) et B (QCM) devraient rester à la charge de l'exploitant.

Après l'obtention du Certiphyto et pendant les dix ans de sa validité, FranceAgriMer écrira régulièrement au candidat (par courrier papier ou électronique) pour l'informer des évolutions rapides de l'utilisation des produits phyto, notamment du point de vue réglementaire.

Un projet ambitieux dont la copie pourrait être revue à l'issue de la phase expérimentale. D'où l'implication importante des agriculteurs.

 

Obligation : Ecophyto 2018

L'obligation réglementaire de certification phyto est prévue dans l'axe 4 du plan Ecophyto 2018, en cohérence avec la directive européenne sur l'«utilisation durable des pesticides» publiée au Journal officiel de l'Union européenne le 24 novembre 2009. Cette dernière prévoit l'information, la sensibilisation et la formation des conseillers et des utilisateurs de pesticides.

 

 

Les formations de deux jours ont commencé

«Nous avons prévu sept sessions gratuites de deux jours (voie D) avec une quinzaine de stagiaires pour chaque, précise Paul Vittecoq, conseiller agronome de la chambre d'agriculture de la Manche. Les sessions, axées polyculture-élevage, seront dispensées dans les cinq antennes de la chambre jusqu'au 1er avril. Plus tard, les agriculteurs sont trop occupés. Les stagiaires, outre le Certiphyto, viennent surtout chercher des informations techniques», constate le formateur.

Le stage, mis au point par la chambre d'agriculture et financé par les fonds Vivea et Feader, se divise en deux parties. «Un conseiller de la MSA vient une demi-journée rappeler les risques liés à l'utilisation des phytos, les protections nécessaires...

Le reste du temps, un technicien de la chambre aborde le local phyto, le calcul du volume de bouillie, le remplissage du pulvé, le réglage des buses mais aussi les moyens alternatifs au chimique tels que le désherbage mécanique ou l'agriculture biologique», expose Paul Vittecoq.

Au printemps, les autres voies d'accès liées aux QCM devraient être possibles. «Nous attendons les questionnaires pour lancer l'expérimentation sur les voies B et C», indique-t-il.

Si les chambres d'agriculture de Normandie ou des Pays de la Loire se sont lancées dans la phase expérimentale, tous les centres de formation agréés n'ont pas encore franchi le pas.

«Je préfère attendre la parution du décret sur le lancement de l'expérimentation pour être sûre de la validité de la formation et de l'obtention du Certiphyto à sa suite, concède Françoise Mirabel, du groupe coopératif Arterris, basé dans le Midi-Pyrénées et le Languedoc-Roussillon. Une formation de deux jours pour la voie D est même prévue en décembre. Si je veux atteindre l'objectif de former 300 agriculteurs en vingt sessions d'ici à juin, il ne faut pas trop tarder», s'inquiète-t-elle.