« Mes capacités d'investissement étaient limitées, se souvient Cyrille Dubreuil, de Boisset, dans la Haute-Loire. Mais la construction d'un bâtiment fonctionnel était incontournable. Depuis mon installation, en 1999, le travail était lourd à gérer.

Les quarante abondances logeaient dans plusieurs vieux bâtiments. Elles étaient à l'attache. La traite s'effectuait encore au pot et le curage était manuel.

Il fallait absolument que je me sorte de cette situation, d'autant que ma laiterie faisait pression pour que je mette mes installations aux normes et que j'adhère à la charte des bonnes pratiques. »

 

Deux ans de réflexion. Cyrille Dubreuil, à gauche, à côté de son père, Jean (à droite), et de Didier Chazalon, a réfléchi à son projet pendant deux ans.

 

 

Béton. Les plus grandes surfaces bétonnées sont les couloirs d'alimentation, à droite, et de raclage.

 

 

 

 

Lisier. Le lisier est raclé grâce à un outil mis au point par Cyrille qui s'attelle facilement. Il tombe dans une trappe et s'écoule vers la fosse en géomembrane par un tuyau en PVC.

 

 

Bardage en bois. Pas de mur en béton, mais un bardage en bois et une bonne intégration paysagère.

 

 

Un seul quai. La salle de traite est simple : huit postes sur un seul quai.

 

 

Topographie. Les recommandations pour le logement sont respectées. L'aire paillée comprend 279 m², soit 6,9 m² par vache.

 

 

Stockage. Les céréales sont stockées au-dessus de la salle de traite, ce qui facilite la distribution.

 

Un bâtiment compact

Dans un premier temps, Cyrille imagine une structure de type « niche à vaches ». « Mais ce bâtiment n'est pas adapté à nos régions d'altitude », explique Didier Chazalon, conseiller en bâtiment à la chambre d'agriculture.

Très vite, la réflexion s'oriente vers une construction traditionnelle, c'est-à-dire entièrement couverte et fermée. Mais la plus compacte possible. Tout loge dans un rectangle de 42 m sur 18,70 m, soit 785 m².

Les couloirs de raclage et d'alimentation sont parallèles et s'étendent sur toute la longueur à côté de l'aire paillée, au bout de laquelle est aménagé le bloc de traite avec la nurserie.

« Nous avons pris le temps de mûrir notre projet », assure Cyrille, qui a visité plusieurs installations avec son père avant d'arrêter son choix. Les discussions avec les conseillers ont duré deux ans.

De nombreux chiffrages ont été réalisés. « Si un poste était un peu élevé, on essayait de gagner sur un autre », se souvient Cyrille. Avantages et inconvénients de chaque option ont été évalués. Et, en premier lieu, ceux de l'emplacement de la construction.

La proximité avec les anciens bâtiments est préférée. Le raccordement aux réseaux d'eau et d'électricité s'est fait à partir des installations existantes. « Ce qui n'aurait pas été possible si nous avions choisi une parcelle plus plate mais plus éloignée de l'exploitation », signale Cyrille.

Cela a nécessité un terrassement un peu coûteux compte tenu de la pente. « Nous avons cherché à tirer partie de la topographie pour l'écoulement des lisiers ou pour le plain-pied de la salle de traite », poursuit Didier Chazalon. La roche arrachée a aussi servi pour l'empierrement avant de couler le béton des couloirs bétonnés.

Pas de béton extérieur

« Charpente et béton sont les plus gros postes de dépenses d'un projet, indique Didier Chazalon. C'est pourquoi notre réflexion s'est d'abord portée sur l'analyse de ces postes. »

Pour la charpente, Cyrille a choisi un modèle standard bipente, type treillis avec des « fermes » de 4 m, ce qui limite l'épaisseur des pannes. Ce sont des 8 cm sur 22 cm. Pour un bâtiment plus large, il faut prévoir des 10 cm sur 22, ce qui augmente le coût.

Les bétons se limitent au couloir d'alimentation et à l'aire raclée. Aucune surface bétonnée extérieure n'a été nécessaire. A un coût compris entre 40 et 44 €/m², celles-ci augmentent vite le montant de la facture.

Le lisier est poussé deux fois par jour dans une trappe de 3 m de profondeur. Il s'écoule par un tuyau en PVC jusqu'à la fosse à lisier en géomembrane située en contrebas. Cette dernière constitue un investissement modéré par rapport à une fosse en béton.

« La trappe présente plusieurs avantages, précise Didier Chazalon. Elle limite les bétons extérieurs et permet d'économiser une porte à l'origine d'éventuels courants d'air et qui coûte beaucoup plus cher que le simple bardage. »

La plus grosse partie des parpaings a été utilisée au niveau du bloc de traite. Les longs pans sont essentiellement composés de bardage en bois. Il est renforcé sur la partie basse près des animaux et à claire-voie au-dessus. Aucun problème d'ambiance n'a été constaté.

« Lors de mes contrôles, j'ai juste remarqué que les vaches évitaient certaines zones quand il y avait du vent, explique Didier Chazalon. Cela provenait d'un courant d'air issu d'une ouverture située sous la toiture au niveau du pignon. Depuis, des planches ont été ajoutées et les vaches se déplacent partout. »

Du côté de la salle de traite, là aussi la simplicité domine. C'est une monoquai avec 8 postes en épi à 50°. Pas de décrochage ni de lavage automatiques.

« Je n'en éprouve pas le besoin. D'autant que, pour le lavage, je ne suis pas sûr que le système soit économe en temps puisqu'il faut être là pour tourner les boutons entre prélavage et lavage », explique Cyrille.

  

Conforme aux plans

En tout cas, le bâtiment est conforme aux plans de départ. C'est un gage de réussite. « Prévoir une structure économe, c'est bien, insiste Didier Chazalon. Encore faut-il s'y tenir jusqu'au bout. Cela demande beaucoup de rigueur. »

Une rigueur que s'est imposée Cyrille. Du coup, il a réalisé quelques aménagements, avec notamment un stockage pour les céréales sur un plancher au-dessus du bloc de traite. Grâce à une vis, les céréales sont dirigées vers l'aplatisseur situé dans le couloir d'alimentation. « Tout est sur place, ce qui facilite le travail », assure Jean.

Un petit regret subsiste : « La largeur du couloir de raclage ne permet pas le passage d'un tracteur avec la pailleuse derrière les vaches », reconnaît Cyrille.

 

Première année: adaptation à l'aire paillée

Les animaux sont passés de l'attache à l'aire paillée. Une nouvelle hiérarchie a dû s'instaurer. « Cela a pris une année », note Cyrille, qui a aussi fini par couper les cornes des tarines et abondances pour avoir plus de calme.

 

 

Une grande part d'autoconstruction

- En 2007, le montant de l'investissement s'élevait à 127.400 euros, salle de traite comprise, soit 3.185 euros par vache laitière (€/VL). « Aujourd'hui, compte tenu de l'augmentation des prix, il faudrait compter 3.500 €/VL », estime Didier Chazalon, technicien en bâtiment à la chambre d'agriculture et participant à l'étude sur le bâtiment économe de l'Institut de l'élevage.

- La participation de Cyrille aux travaux a toutefois limité l'investissement. « Si le même bâtiment était à l'heure actuelle construit entièrement par une entreprise, il coûterait 4.670 €/VL, soit 25 % de plus que les 3.500 €/VL estimés.

« J'ai beaucoup participé aux travaux pendant deux ans. C'est un travail lourd à gérer en plus de l'astreinte et ma vie personnelle en a été un peu affectée. J'ai eu la chance de travailler avec le maçon. J'ai pu avancer sur le chantier en son absence. Il a en plus accepté de facturer son travail à l'heure passée. »

- Un bâtiment standard construit par les seuls intervenants extérieurs coûterait 6.550 €/VL, selon l'Institut de l'élevage. C'est 47 % de plus que Cyrille débourserait aujourd'hui.

- Le montant des subventions a été moins important que prévu. Et cela en raison de la longue liste de projets déposés dans le cadre du plan de modernisation des bâtiments d'élevage. Les aides représentaient 37 % de l'investissement, alors que Cyrille espérait 42 %, dont 5 % pour l'emploi du bois.