L'échéance approche : le calendrier de mise en oeuvre prévoit que les arrêtés départementaux soient pris au plus tard au 30 juin 2009 pour une application dès cet été. Les DDAF (directions départementales de l'agriculture et de la forêt) ont finalisé et remonté les projets d'arrêtés au ministère de l'Ecologie.

La circulaire parue en mars 2008, qui représente une base pour ces futurs arrêtés, propose de conserver en zone vulnérable l'ensemble des dispositions incluses dans le précédent programme et de les compléter à l'aide de deux autres mesures.

La première est l'implantation d'une bande enherbée ou boisée permanente d'une largeur minimale de 5 mètres le long des « cours d'eau BCAE » (bonnes conditions agricoles et environnementales).

Une disposition qui ne présente pas de problème particulier, même si des discussions sont encore en cours quant à la définition exacte de la carte des cours d'eau ou la largeur de ces bandes.

En revanche, la mesure qui consiste à obtenir « pendant la période de risque de lessivage une couverture des sols de 100 % d'ici à 2012 » soulève plus dequestions.

« Il y a autant de situations que de départements », indique- t-on à l'APCA (Assemblée permanente des chambres d'agriculture). L'application de 100 % de couverture est parfois prévue dès cette année.

Ailleurs, l'obligation sera plus progressive. Les ministères de l'Agriculture et de l'Ecologie ont même décidé, à la fin de 2008, de mettre en place un groupe d'experts afin de lever le flou sur certains points.

Les réponses apportées par ce groupe à la fin de décembre ont en partie, seulement, permis de trouver des solutions.

Dans la circulaire, il est indiqué que les cultures intermédiaires doivent être implantées rapidement après la récolte et au plus tard au 10 septembre.

Ce texte réglementaire avait bien pris en compte le maïs grain, en précisant qu'il serait possible de remplacer la culture intermédiaire par un broyage fin des cannes suivi d'un enfouissement superficiel.

Mais qu'en est-il pour les autres espèces qui peuvent aussi être récoltées plus tard ?

Dérogations en soLs argileux

Le groupe de travail a donc précisé que les modalités destinées au maïs grain pouvaient également s'appliquer au sorgho grain et au tournesol.

« En ce qui concerne la betterave ou la pomme de terre, elles sont rarement suivies de cultures de printemps, mais si c'était le cas nous demandons qu'elles soient considérées comme une couverture des sols », signale la chambred'agriculture de l'Oise.

Le groupe d'experts estime toutefois que lorsque la date de récolte est incompatible avec le bon développement d'une culture intermédiaire piège à nitrates (Cipan), il faut examiner les possibilités de mise en place d'une Cipan sous  couvert ou le remplacement de la culture de printemps par une d'automne.

Ce dernier point inquiète : « Il risque d'y avoir une diminution draconienne des surfaces de cultures de printemps alors qu'il est plutôt recommandé, pour desraisons agronomiques, d'intégrer ces espèces dans ses rotations », indiqueun conseiller de chambre.

Pour bon nombre de départements, il est également impossible d'attendre le 15 novembre pour détruire les couverts dans les terres argileuses ou même hydromorphes, comme le demande la circulaire. Les experts estiment qu'« il convient d'autoriser une destruction un peu plus précoce ».

Pour les terres de marais comportant plus de 40 % d'argile, la Vendée demande qu'il n'y ait pas d'obligation de couverture. La région Midi-Pyrénées propose une dérogation, indiquant la difficulté d'implantation de ces cultures pièges à nitrates en fin d'été. Elle demande qu'en échange les exploitants implantent des bandes enherbées de 5 mètres le long des cours d'eau, BCAEou non.

Un délai très court

D'autres demandent la possibilité de réaliser un déchaumage après la récolte pour pouvoir lutter contre les limaces et les adventices. Des départements tels que la Nièvre réclament que les repousses de céréales soient considérées comme un couvert possible.

Certains pensent que les repousses de colza ne doivent pas être obligatoires avant une céréale d'hiver quand la rotation comporte des betteraves.

De nombreuses propositions sont soumises pour la destruction des couverts. Le Loiret demande ainsi que la destruction chimique soit interdite sauf pour les exploitations qui sont en techniques simplifiées.

En attendant de connaître les modalités exactes de mise en oeuvre de ces mesures, sur le terrain, beaucoup estiment que le délai risque d'être court. D'autant qu'il reste délicat de communiquer sur le sujet tant que les arrêtés définitifs n'auront pas été pris.

 

Adaptation du matériel agricole

Même du côté des fabricants de matériel agricole le sujet est pris au sérieux.

Grégoire-Besson a par exemple développé, à la demande d'agriculteurs et d'entrepreneurs bretons, un équipement utilisable sur des cover-crops ou des chisels conventionnels.

Ainsi, un semoir pour couverts végétaux, qui permet d'implanter à la volée des semences en mélange, a été mis au point.

Il accepte toutes les grosseurs de graines (jusqu'à 130 kg/ha) et même des ray-grass non ébarbés, habituellement très difficiles à semer.

 

 

Incertitudes sur la disponibilité de certaines espèces

Les entreprises semencières, qui proposent des couverts végétaux, ont depuis plusieurs années investi dans la recherche de nouvelles espèces ou de mélanges mieux adaptés aux intercultures.

L'implantation de cultures intermédiaires n'est donc pas, à leur yeux, qu'une obligation réglementaire mais présente de nombreux avantages agronomiques.

Elle ne se limite d'ailleurs pas à la moutarde. Elles ont ainsi tenté d'anticiper au maximum la demande. « Nous sommes malgré tout toujours en attente des textes locaux pour connaître les éventuelles espèces non autorisées.

Les légumineuses, qui ne peuvent être utilisées qu'en mélange, pourraient par exemple être interdites dans certains départements. Dans ce contexte, il serait possible d'avoir en fin de campagne des pénuries sur certaines espèces », indique Philippe Gratadou, chef du marché des semences chez Jouffray-Drillaud.

« Malgré des volumes disponibles, multipliés par trois cette année, je crains qu'il y ait un manque de marchandises. Pour une meilleure organisation, il aurait déjà fallu passer ses commandes », ajoute Jean-Pierre Brossillon, directeur de Sem-Partners.