Production bio. Pour valoriser mes céréales bio, je réfléchis à élever des porcs en plein air ou des volailles en plus des faisans.
1. Stratégie. Les jeunes qui se lancent ne doivent pas se décourager. S'ils ont accès au foncier, toutes les solutions existent ensuite, des Cuma aux cercles d'échange.
2. Matériel. Son père, qui cultive aussi du tabac, a déniché la machine à récolter en Italie.
«Lorsque mon père a loué ses terres pour la chasse, j'avais 15 ans. Je me suis tout de suite attribué le «droit» d'élever ses faisans. Je ne savais pas vers quel métier me diriger. Cette passion a choisi pour moi.»
Xavier Pillet s'est installé en 2001 à Saint-Germain-du-Seudre, dans la Charente-Maritime, après son BTS: «En 2000, j'ai acheté à la Safer 19 hectares de terres qui se libéraient dans le village où mon père en exploitait une cinquantaine.
Je me suis installé l'année suivante.» Il paie à l'époque 3.100 euros ces terres non irriguées, en jachère depuis dix ans.
Une politique qui plaît à son banquier
«Il n'était pas question pour moi de faire autre chose que des cultures bio. J'ai obtenu l'agrément dès 2001, après avoir fait le tour des certificateurs. Quand je me suis installé, mon grand-père m'a laissé 27 ha à Saint-Georges-de-Didonne, à 20 km d'ici. C'est là-bas que je suis né, avant que mon père ne s'installe à Saint-Germain. J'aime aller d'un site à l'autre. Ici, je fais du bio, et à Saint-Georges, du conventionnel.» Originaire de la Vendée, son grand-père a conservé, jusqu'à cette année, une cinquantaine d'hectares: «Il a arrêté de cultiver à 85 ans. Son métier, c'est sa vie. Mon père est comme lui.»
Le bio, les deux mille faisans et les terres du grand-père ne suffisent pas à équilibrer son budget: «J'ai loué près de 3 ha supplémentaires à Saint-Germain pour cultiver du tabac.» Du côté du matériel et du bâtiment, pas question d'investir. Le banquier aurait refusé. Sa tante lui montre une autre voie: elle a fait partie des membres fondateurs du Cemes (Cercle d'échange de machines et d'entraide de la Seudre), qui compte 310 adhérents.
«Ma première dépense d'exploitation a été l'adhésion au Cemes. Lorsque j'appelle l'animatrice, au plus tard dans la journée je peux disposer du matériel ou je fais intervenir un prestataire du Cemes. Mon père et mon oncle y adhèrent aussi. Quand je vais travailler à Saint-Georges, je peux partir sans matériel. Ce groupe me motive. En tant qu'administrateur, je suis régulièrement des formations adaptées à mes attentes à Trame. En ce moment, le Cemes, à la recherche de nouveaux débouchés pour ses adhérents, réfléchit à la production d'électricité entre panneaux photovoltaïques et compostage de déchets verts.»
Xavier emploie un salarié au moment de la récolte par l'intermédiaire du groupement d'employeurs du Cemes. Il adhère à une Cuma pour le matériel de culture du tabac et les appareils de traitement. Pour la récolte et le tri du tabac, il s'adresse à son père: «Nous prenons soin de facturer toutes ses interventions pour éviter tout souci juridique.»
Si, aujourd'hui, son père possède une machine à récolter de dernier cri, il n'en a pas toujours été de même. «Au début, je ne cultivais que 3 ha. Mais j'avais des difficultés à trouver de la main-d'oeuvre pour récolter.» Son père, qui produit aussi du tabac, trouve une machine à récolter en Italie.
Leur coopérative ne valorisant pas suffisamment leur tabac récolté à la machine, ils se rapprochent d'une autre. Elle travaille avec un acheteur italien déniché par les exploitants eux-mêmes.
Aujourd'hui, Xavier récolte 12 ha de tabac cultivés sur des terres louées à l'année. Son père en cultive 30 ha: «En janvier, nous avons passé quelques jours à Véronne, en Italie, pour rencontrer le fabricant de matériel et visiter l'usine de notre acheteur. L'an prochain, nous lui vendrons directement notre récolte.»
Plus de 50% du chiffre d'affaires grâce au tabac
«Comme prévu, c'est le tabac qui m'a permis de m'installer, mais il m'a fait vivre à partir du moment où je suis sorti de la première coopérative. Actuellement, il assure plus de 50% de mon chiffre d'affaires. Ma diversification c'est cela: une production, le tabac, qui fait vivre l'autre, le bio. Pour valoriser mes céréales bio, je réfléchis à élever des porcs en plein air ou des volailles en plus des faisans. Je suis convaincu par le bio. Je veux conserver le patrimoine écologique de mes terres. Etre propriétaire me permet de faire perdurer cette valeur.»
Sa famille s'est implantée à Saint-Germain. Son père, qui a racheté récemment le château dont dépendait sa ferme, le restaure progressivement. Sa soeur et son beau-frère, formés à l'accueil et à la restauration, ont ouvert, en avril 2008, une auberge. Xavier s'enracine aussi: il vient d'être élu au conseil municipal. Pour l'instant, il n'a pas encore de vrai «chez lui». Mais il va se «poser» de l'autre côté du village. «Je vais construire mon siège d'exploitation sur mes terres: une maison écologique et un hangar.» Sans attendre, il va installer un chalet en bois pour être au plus vite dans ses murs.
«Il y a toujours une solution»«Il faut choisir sa stratégie d'investissement. Les jeunes qui se lancent, les «hors-cadre» en particulier, ne doivent pas se décourager. S'ils ont accès au foncier, toutes les solutions existent ensuite, des Cuma aux cercles d'échange. J'accorde davantage de valeur à la terre parce que notre travail entretient le patrimoine écologique. Or il pourrait nous échapper si nous n'en étions pas propriétaires. Pour le matériel, il n'y a pas cette dimension.» |