Chantal et Dragan Téostki ne voyaient plus la fin de leurs journées de labeur. «Nous exploitons 45 hectares à Saint-Antonin-de-Lacalm, dans le Tarn. Nous trayons 160 chèvres. Nous avons construit une nouvelle fromagerie il y a huit ans et monté une SARL pour compléter nos besoins en lait de chèvre puis en lait de brebis. Je gère cette fromagerie et mon épouse est exploitante agricole», explique Dragan. Au quotidien, ils travaillent dans les deux structures avec l'aide de trois salariés: «Celui de l'élevage est parti il y a un an et depuis nous cherchons un associé», explique Dragan.

Le conseiller de l'Adasea les aiguille aussitôt vers l'Atag, Association tarnaise pour le développement de l'agriculture de groupe. Chantal Tresserra, conseillère en relations humaines et organisation du travail, les accompagne depuis un an pour définir le profil de l'associé recherché: «Ils étaient en état de faire face à l'urgence mais n'arrivaient plus à prendre du recul. Madame Téostki avait besoin avant toute chose de redéfinir sa place dans l'exploitation.»

Le recul d'une tierce personne

Chantal Téostki confirme: «J'avais vécu des situations tendues entre mon mari et nos salariés. Inconsciemment, je mettais un frein à une future association pour ne pas me retrouver au milieu de conflits. Le travail avec l'Atag n'a pas été une révolution mais, grâce à cet accompagnement, la mise en place des améliorations a été rapide. Une tierce personne nous permet de dire ce que l'on n'ose pas. J'avais l'impression de devoir toujours abandonner mon poste pour boucher les trous. Nous avons calculé mon temps de travail: entre la comptabilité, les livraisons, le travail dans l'élevage, je suis à 100% dans l'entreprise. Je veux revenir à 50% et plutôt dans l'élevage. Nous avons instauré un autre mode de communication: une discussion hebdomadaire, un planning pour la semaine.»

Dragan a apprécié les six demi-journées de travail avec l'Atag: «J'ai cerné mon objectif: être à 100% dans la fromagerie à la fin de cette année. Nous cherchons un associé pour l'élevage.» Chantal Téostki a suivi une formation sur la gestion de conflits. «J'ai retenu les façons de discuter sans mettre l'autre en accusation. Il faut savoir dire les choses et les dire plus tôt, explique-t-elle, apaisée.

Dragan conclut: «Je vais veiller à ne pas mettre la pression sur notre futur associé. Chacun a besoin de temps pour dire ce qu'il désire vraiment, pour s'engager.» Après deux tentatives, ils vont signer un Cefi (contrat emploi formation à l'installation) avec une jeune future associée.

 

VIRGINIE ROUSSELIN et CHANTAL TRESSERRA, conseillère à l'Atag

«Etre en groupe, c'est du travail»

L'Atag, Association tarnaise pour le développement de l'agriculture de groupe, a été créée en 1993 pour promouvoir les démarches collectives: entraide, emploi partagé, mise en commun des moyens de production. Virginie Rousselin y est conseillère. «Lorsque nous intervenons auprès des associés, nous travaillons à la fois sur les relations humaines et sur l'organisation du travail. L'Atag peut intervenir à trois stades dans un projet. Nous aidons les futurs installés à réfléchir sur leur engagement associatif lors du stage préparatoire à l'installation. Souvent, ils nous disent: «Avec mes parents, il n'y a pas de problème.» Or ils n'ont pas idée des besoins financiers réels de chacun. Ils confondent partage du travail et partage des responsabilités. Le bureau est un autre point d'achoppement: où sont les papiers? Ils ont aussi rarement discuté de l'organisation du travail.» L'Atag intervient aussi lors de tout projet d'association avec un tiers hors cadre familial. «Nous encourageons la période d'essai, comme dans le cas du Gaec de Vindrac», explique Virginie Rousselin. Le conseil régional de la région Midi-Pyrénées finance cette intervention à hauteur de 300 €.

Chantal Tresserra, conseillère indépendante, assure une mission deux jours par semaine à l'Atag. «Nous accompagnons les associés comme les Téostki pour qu'ils clarifient leurs attentes. Parfois, nous remettons en place un dialogue professionnel qui n'existe plus. Nous n'intervenons que dans le domaine professionnel. Quand cela relève du privé, nous leur indiquons d'autres adresses.» L'Atag intervient aussi à la carte chez ceux qui le demandent. «Tous les ans, nous proposons une formation à la médiation et à l'initiation à la gestion des conflits. Les conflits font partie de la vie. Mieux vaut apprendre à les reconnaître, les mettre à distance, les comprendre.» En 2006, l'Atag a mené une soixantaine d'audits auprès de 160 exploitants. Depuis peu, l'association demande une participation de 80 € par demi-journée, plus la prise en charge des frais de déplacement.