«La suppression de l'agrément des collecteurs permettra des ventes de céréales par les producteurs directement aux utilisateurs. La disparition d'intermédiaires devenus aujourd'hui superflus rendra la filière plus compétitive. » Voilà ce que précisait l'exposé préliminaire à l'amendement déposé cet automne par Marc Le Fur, député des Côtes-d'Armor, à l'occasion du débat sur la loi d'orientation agricole. Après discussions à l'assemblée, le député l'a finalement retiré. Le monopole des collecteurs français n'est donc pas remis en cause et vendre en direct ses céréales reste une pratique interdite. Malgré tout, la réglementation offre des moyens de contourner la filière classique.
Petites quantités
Dans la limite de 5 quintaux par transport, une instruction de la direction générale des impôts, datée de 1978, autorise les cessions de céréales secondaires (orge, maïs, avoine, seigle) entre agriculteurs sur des zones réduites : la commune de production et celles limitrophes pour le maïs et l'orge, le département de production et les cantons voisins pour le seigle et l'avoine. Le producteur se voit alors dispensé de payer les taxes spécifiques. Seconde possibilité: les livraisons directes, applicables à toutes les céréales y compris le blé. Mais elles ne sont possibles qu'à titre exceptionnel, sous réserve d'une économie sur les frais de transport ou pour une marchandise de qualité particulière. Problème : le collecteur agréé doit donner au producteur une autorisation de transfert direct... Ce que rien ne le force à faire. Ce mode de vente oblige à une prise en charge comptable, une facturation, la perception des taxes et la délivrance d'un titre de mouvement spécial.
Selon une circulaire de l'Onic datée de 1981, seules les livraisons ayant lieu dans le département du collecteur autorisant la transaction ou dans les arrondissements voisins sont concernées.
Solution plus large : obtenir soi-même l'agrément Onic... Cette démarche ne s'avère pas toujours aussi compliquée qu'elle en a l'air.
500 ou 5 000 tonnes
Que requiert-elle? Outre les papiers administratifs classiques, le demandeur doit notamment disposer d'un silo de stockage en propriété ou en location pour au moins trois ans, d'un nettoyeur-séparateur efficace, d'un outil de pesée et d'une « trémie ». Concrètement, le directeur de l'Onic, seul compétent d'après l'arrêté du 30 mars 1998 pour définir les conditions de l'agrément, précise dans des circulaires que la capacité minimale de stockage doit atteindre 5.000 tonnes. Toutefois, elle tombe à 500 tonnes pour les zones défavorisées ou de montagne, qui concernent finalement près de 55% du territoire français (voir encadré). La situation de votre commune peut être vérifiée auprès de la DDAF. La circulaire de 1986 demande également de s'équiper d'un pont-bascule. Là aussi, l'investissement peut sembler important. Mais il peut se limiter à la location d'un outil communal. Le comité départemental des céréales, qui juge la pertinence du moyen de pesée, peut éventuellement accorder une dérogation. De quoi réduire les dépenses.
Bruxelles favorable aux collecteursNe pas pouvoir vendre librement ses céréales constitue-t-il une entrave au commerce pour Bruxelles? Député français au parlement européen, Jean-Louis Bernié a posé cette question à la Commission en mai 2003. Selon elle, ce régime garantit le paiement comptant des céréales au producteur et la régularité de la transaction. Il permet de préserver la qualité des céréales et d'assurer un suivi statistique fiable du marché, ainsi que le recouvrement des taxes parafiscales. La concurrence entre les OS existe. Donc la Commission a de nouveau approuvé le système. Mais à moyen ou long terme, la donne peut changer. |
Plus de la moitié du territoire en zone défavorisée
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Le classement d'une exploitation en zone défavorisée ou de montagne donne la possibilité d'obtenir l'agrément Onic avec une capacité de stockage dix fois inférieur au seuil normal. Plus de la moitié de la France est concernée. Mais attention: les autorités européennes souhaitent remanier ce classement, qu'elles jugent désormais inadapté. Si les zones de montagne définies sur des critères physiques ne font pas l'objet d'une remise en cause, ce n'est pas le cas des zones défavorisées qui reposent sur des critères socio-économiques datant des années 1970! Le statu quo est maintenu jusqu'en 2010. Les négociations concernant des redéfinitions devraient commencer en 2008.