Si rien ne vient perturber la fin de l'année, il devrait se vendre pas loin de 600 automates de traite en France, soit 200 de plus que l'an dernier. Et le phénomène n'est pas que franco-français: dans plusieurs pays du nord de l'Europe (Suède, Danemark, Pays-Bas), la traite robotisée s'impose dans sept ou huit installations neuves sur dix. Pour faire face, les deux marques leaders, Lely et DeLaval, ont augmenté la capacité de production de leur site respectif de Maassluis (Pays-Bas) et de Tumba (Suède). Elles vont aussi devoir composer avec une concurrence plus vive. Peu actifs ces dernières années, Fullwood revient à la charge, Sac Christensen cherche à se faire une place et WestfaliaSurge se réveille en négociant un accord avec RMS.

DeLaval : le réseau à pied d'oeuvre

Depuis l'an dernier, les concessionnaires assurent la vente, l'installation et la maintenance des robots.

 

Le numéro un mondial du matériel de traite s'est un peu fait attendre dans le domaine du robot. En Suède, ses premiers VMS (Volontary Milking System) installés en ferme ont à peine dix ans et l'activité sur le marché français n'a démarré qu'en 2001. Jusqu'en 2003, c'est une équipe spécifique qui assurait toutes les prestations autour des robots. Les concessionnaires ont commencé à s'en occuper à partir de 2004 et, depuis 2006, tout est délégué au réseau.

 

Stocks de pièces en commun

Sur les cent cinquante points de vente que compte la marque en France, quatre-vingts proposent aujourd'hui la traite robotisée dans leur gamme. Environ 250 personnes sont passées sur le site de formation de DeLaval France, aux Clayes-sous-Bois (Yvelines), pour la formation à la vente et au service après-vente des robots. A l'exception d'une zone dans le Sud-Est, 70% du territoire est à la portée d'un technicien formé à la maintenance sur cet équipement.

Dans les zones à forte densité de robots comme c'est déjà le cas en Normandie, dans les Pays de la Loire et en Bretagne, la marque estime qu'un technicien SAV peut suivre jusqu'à quarante installations. Pour les astreintes, une rotation entre concessions voisines a été mise en place, l'objectif étant de ne pas mobiliser un même intervenant plus d'une semaine par mois. DeLaval a aussi mis l'accent sur le dépannage à distance, tous ses robots étant «visitables» de loin par l'intermédiaire d'une ligne modem. En France, cinq techniciens sont ainsi affectés en permanence au télédépannage et à l'assistance des personnels de maintenance. Pour limiter les coûts, les stocks de pièces détachées spécifiques au robot sont mutualisés sur trois ou quatre concessions. La forte implantation mondiale de DeLaval lui a permis d'avoir des robots au travail dans vingt-cinq pays, avec une forte concentration en Europe et quelques unités en Asie, Océanie et Amérique du Nord. Sur environ 8.000 robots en activité de par le monde, près de 3.000 sont des DeLaval.

 

Comptage cellulaire automatisé

Le VMS est, depuis le début de l'année, commercialisé dans une nouvelle version reconnaissable à sa conception tout en Inox et son tapis de caoutchouc au sol. Le constructeur a aussi retravaillé la position et l'amplitude de mouvement du bras au bout duquel l'ancienne pince qui servait à saisir les gobelets a été remplacée par un électroaimant. Mais l'innovation la plus notable reste l'adaptation, en option, d'un minilaboratoire automatique d'analyse du lait quartier par quartier: l'OCC (Online Cells Counter). Cet élément programmable prélève quelques millilitres de lait et les mélange à un réactif qui rend les cellules somatiques fluorescentes. Leur nombre est déterminé grâce à une image numérique et il s'affiche sur l'écran du PC qui pilote le robot. DeLaval a aussi remanié le logiciel qui pilote le VMS en lui intégrant une fonction MDI (Mastitis Detection Index), qui compile les données de conductivité, colorimétrie, baisse de production, intervalle entre traites. DeLaval installe aujourd'hui son robot monostalle dans des élevages comptant jusqu'à 75 vaches. Il y assure jusqu'à 172 traites par 24 heures et récolte 2.300 litres de lait.

 

Fullwood: une nouvelle génération

Changement de cap pour la marque anglaise, qui investit fortement dans le robot tout en impliquant le réseau de distribution.

 

Pas ou peu présenté sur les salons, pas ou peu soutenu commercialement, le robot Merlin avait presque fini par se faire oublier. Né en 1998 à la suite d'un accord de fabrication sous licence avec Lely, il s'est vendu à quelques exemplaires, surtout dans le nord-ouest de la France, à portée d'une poignée de concessionnaires et du siège français de la marque à Forges-les-Eaux (Seine-Maritime).

 

Appui commercial et technique

Après ces débuts peu enchanteurs, Merlin est revenu à la charge l'an dernier, fort d'une version complètement réactualisée et d'une volonté claire de Fullwood de peser davantage sur le marché. Les concessionnaires français ont découvert le nouveau robot en février 2006 et, quelques semaines plus tard, un séminaire a permis d'en remettre à plat le schéma de vente d'installation et de maintenance. Les formations commerciales pour les concessionnaires et vendeurs ont démarré dans la foulée, suivies à l'automne des formations techniques, puis informatiques sur le site de fabrication en Grande-Bretagne. «L'objectif est d'impliquer au maximum les concessionnaires, indique Gilles Réot, au siège français de Fullwood. Ils bénéficieront dans un premier temps d'un appui commercial et technique pour la vente, l'installation et l'accompagnement au démarrage. A terme, ils seront le plus autonomes possible, mais pourront être soutenus si besoin est par une équipe technique régionalisée. Pour les astreintes, nous tablons sur des rotations entre plusieurs concessionnaires, avec éventuellement une contribution des équipes techniques.»

Ce dispositif, déjà en place dans l'Ouest, les Pays de la Loire et l'Est, est en cours d'installation dans le Rhône-Alpes. Mais quelques zones posent un problème, comme le Nord-Pas-de-Calais qui ne compte qu'un seul concessionnaire. Pour les régions à moindre densité en vaches laitières, Fullwood n'exclut pas de faire appel à ses concessionnaires spécialisés en traite ovine ou caprine.

 

Maîtrise de la traite et du froid

En dehors du système de détection des trayons, la quasi-totalité des composants du robot Merlin sont d'origine Fullwood ou apportés par les mêmes fournisseurs qui équipent ses matériels de traite conventionnelle: compteurs à lait Afimilk (Israël), détecteurs de mammites Sensortec (Nouvelle-Zélande). Les Merlin sont assemblés dans l'usine d'Ellesmere, à l'ouest de l'Angleterre, à quelques encablures du pays de Galles, sur une chaîne de fabrication dont la capacité est de 60 à 70 unités par an. Comme les autres fabricants de robots monostalles, Fullwood préconise une stalle pour un troupeau de 60 à 70 vaches ou 700.00 à 750.00 litres produits par an avec des vêlages étalés. C'est un peu plus que pour les Merlin de première génération, mais cela s'explique par l'arrivée d'une détection plus rapide des trayons avec un laser statique qui s'adapte de surcroît à une plus large variété de configurations de mamelles. Le robot de Fullwood a aussi reçu une version réactualisée du logiciel de suivi de troupeau Crystal 2.0.

Au chapitre des options ou des équipements qu'il est possible d'adapter par la suite un test de conductivité Fullquest, un détecteur de sang et un écran PC tactile intégré sur la façade de la stalle. A noter enfin que Fullwood est détenteur de la marque de tanks à lait Packo et peut ainsi proposer des installations complètes de traite robotisée et de refroidissement du lait, notamment avec la technologie à eau glacée.

 

Lely: vers davantage de proximité

Lely confie la vente et l'entretien des robots à des établissements franchisés répartis sur tout le territoire : les Lely Center.

 

Encore un peu de patience et les robots Astronaut devraient bientôt être commercialisables partout en France. Depuis son arrivée sur notre marché, la marque néerlandaise s'est en effet cantonnée aux régions à forte concentration d'élevages laitiers: le grand Ouest et l'Est. Elle a ensuite progressivement agrandi sa zone de commercialisation sans toutefois satisfaire les éleveurs installés loin des grands bassins laitiers. Depuis deux ans, sa stratégie de vente, d'installation et de maintenance bascule d'un système en direct vers une délégation à des franchisés, une première en agriculture.

 

Vingt points de vente et de services

Une dizaine de Lely Center sont aujourd'hui installés et il reste encore quelques places à prendre, la marque tablant sur vingt points de vente et de services vers la fin de 2008 pour avoir une couverture nationale. Chaque Lely Center est une entreprise indépendante, avec la plupart du temps un statut de SARL et un effectif moyen de cinq ou six personnes. A la différence d'un contrat de concession, la franchise repose sur des engagements réciproques et contractualisés entre les deux parties. Le franchiseur a des obligations d'assistance technique et commerciale, de formation, de soutien par rapport à son franchisé qui doit installer les équipements d'élevage et assurer le service après-vente selon un cahier des charges précis et identique dans tous les Lely Center. Ce système ne concerne que la gamme élevage de Lely, ses matériels de fenaison restant commercialisés par un réseau de concessionnaires.

L'objectif est de renforcer la proximité des points de vente et de services par rapport aux éleveurs. A la clef, des interventions plus rapides et moins de temps passé en trajets routiers pour les techniciens. Chaque Lely Center dispose de son propre stock de pièces et, si besoin est, d'un appui technique permanent par l'intermédiaire d'une «hot line».

Fidèle à sa volonté de se démarquer, Lely procède par ailleurs à la certification des différents intervenants sur le robot. A l'issue d'une formation, ils subissent un examen pour être certifiés dans différents domaines:montage, maintenance ou dépannage.

 

Deux modèles monostalles

Lely propose deux versions de son Astronaut depuis la fin de 2005: le A2, comme modèle d'entrée de gamme, et le A3, plus sophistiqué. Il se reconnaît à son design plus moderne, mais surtout à son bras de positionnement fixé en hauteur pour accélérer la vitesse de détection et de pose des gobelets. Ce bras se déplace horizontalement, guidé par un capteur au sol qui détermine le centre de gravité de la vache et donc sa position dans la stalle. Ainsi, l'animal n'a plus aucun élément en appui sur lui et le capteur se charge aussi d'enregistrer son poids à chaque traite. L'A3 intègre de série un indicateur de cellules somatiques quartier par quartier: le MQC-C. Il fait appel à un produit réactif comme pour le test dit «californien». Inoculé dans un échantillon de lait, le réactif rend le lait plus ou moins visqueux selon sa teneur en cellules et la mesure de cette viscosité est interprétée par un logiciel. Cette fonction d'indication vient en plus de la mesure de conductivité et de la colorimétrie qui sert à détecter la présence de sang. En complément de ce dispositif, quatre bacs servent à isoler le lait anormal ou le colostrum.

Le nouveau robot a aussi inauguré un nouveau système de pulsation et de stimulation quartier par quartier. Pour pouvoir interpréter toutes ces nouvelles données, il est piloté par un logiciel spécifique, aux fonctions étendues: le T4C.

 

RMS négocie avec WestfaliaSurge

Punch Graphix, l'actionnaire de RMS, a annoncé qu'un accord était à l'étude avec le numéro deux mondial du matériel de traite.

 

Lorsque Gascoigne-Melotte a été racheté par Bou-Matic en 2004, la transaction ne portait que sur la traite conventionnelle. C'est de cette vente séparée qu'est née la marque RMS (Robot Milking Solutions), filiale du groupe néerlandais Punch Technix, rebaptisée PunchGraphix en juillet dernier. Punch Graphix fabrique différents équipements pour les activités graphiques, les industries agroalimentaires et le secteur médical. En 2006, le groupe a transféré l'activité de construction des robots de traite depuis la Belgique vers Namestovo, en Slovaquie, son principal site industriel. Là, une division spécifique emploie une cinquantaine de personnes et produit environ 100 robots par an, soit 250 boxes.

 

Equipes techniques régionalisées

L'essentiel de ces robots est commercialisé en Europe, sauf quelques unités envoyées au Japon. RMS annonce disposer de quatre cents robots simples et multiboxes en service, dont une centaine en France. Ce parc est composé d'une soixantaine d'automates commercialisés jusqu'en 2002 par AMS et de 2002 à 2004 par Gascoigne-Melotte, auxquels s'ajoutent une trentaine d'unités installées depuis 2006 par RMS France. Le siège social de cette SAS est basé dans le Doubs, pour des raisons de proximité avec la Suisse où RMS a également un parc de robots. La structure française, qui emploie 28 personnes, s'appuie aussi sur une antenne à Rennes (Ille-et-Vilaine). Ce site abrite un stock de pièces détachées et sert à la formation des techniciens de maintenance. Pour assurer une couverture nationale, RMS France a divisé le territoire en trois grandes régions où un spécialiste de la maintenance chapeaute une équipe de dépanneurs et assure la formation des éleveurs. Dans ses projets, RMS comptait diviser l'Hexagone en sept ou huit régions pour améliorer la proximité avec les éleveurs.

Tout est figé depuis le 22 juin, date à laquelle Punch Graphix a annoncé l'échange d'une lettre d'intention avec WestfaliaSurge. Dans ses grandes lignes, cette lettre stipule que WestfaliaSurge disposerait d'une licence mondiale sur la technologie des robots, mais que PunchGraphix resterait détenteur de la marque RMS et des brevets qu'elle possède.WestfaliaSurge assurerait le service après-vente pour tous les robots RMS déjà en place et intégrerait ce matériel dans sa gamme d'équipements. Les filiales françaises de RMS et de WestfaliaSurge soulignent qu'il ne s'agit pour l'instant que d'un projet à l'étude. D'après elles, l'issue des négociations ne sera pas connue avant l'automne. Si le projet n'aboutit pas, il reste à WestfaliaSurge à ressortir de ses cartons le robot Léonardo. Lancé en 1999, ce système multibox avait été commercialisé en quelques exemplaires en Allemagne et en France jusqu'en 2003.

 

Conception modulaire

Depuis leur arrivée sur le marché, les robots aujourd'hui commercialisés par RMS se sont démarqués par leur conception en simple ou multibox comportant jusqu'à quatre postes de traite. Ce concept est resté de mise sur le Titan, lancé à la fin de 2005, qui intègre en plus la conception modulaire. Un éleveur qui investit aujourd'hui dans un modèle à deux boxes pourra demain y ajouter une ou plusieurs stalles supplémentaires si son effectif augmente, et ce jusqu'à un maximum de cinq stalles. Avec ce système, RMS annonce répondre aux besoins d'éleveurs qui possèdent entre soixante et deux cents vaches. Par rapport à la génération précédente, le Titan se démarque avec son bras de positionnement suspendu et la double détection qui fait appel à une caméra optique associée à un laser et à un capteur rotatif à ultrasons, le tout géré sous Windows.

 

Sac Christensen: la surprise

En rachetant la société néerlandaise Hoko-Farm avec sa marque Galaxy, le constructeur danois pose un pied dans la cour des grands.

 

Dans la traite conventionnelle, Sac Christensen est arrivé tard en France et n'y a jamais eu une grande part de marché. Cela lui confère une image de «petite» marque dont beaucoup n'auraient pas été étonnés qu'elle finisse absorbée par un grand groupe, comme l'a été sa compatriote Strangko, passée aux mains de l'américain BouMatic au début de l'année. Forte d'environ 250 personnes, détenue et dirigée par Steen Aage Christensen, la marque a été suffisamment solide (1) pour absorber, en 2005, une entreprise aux activités complémentaires, Hoko-Farm, avec ses cinquante salariés, son savoir- faire dans la traite robotisée, l'alimentation automatisée et l'identification animale par transpondeur. Grâce à cette acquisition, Sac Christensen rejoint le club très fermé des marques qui proposent tous les systèmes de traite, depuis le pot jusqu'au robot, club qui ne comptait auparavant qu'un seul membre: DeLaval. Dans l'Hexagone, la SARL Christensen France a changé de mains en 2005 et a installé son siège social à Chartres (Eure-et-Loir). La nouvelle équipe s'est dans un premier temps attelée à renforcer le réseau, passé de trente-deux concessionnaires en 2005 à quarante-deux aujourd'hui, et va maintenant l'organiser pour qu'il puisse intégrer le robot dans sa gamme. Elle a concentré ses efforts dans le grand Ouest, où trois revendeurs ont formé leurs équipes, ce qui explique que le premier robot RDS (Robotic Dairy System) a été installé en Vendée et qu'un deuxième va l'être dans le même département. A terme, l'organisation pour l'installation et la maintenance des robots s'appuiera sur les techniciens des concessions, supervisés et aidés par des supertechniciens régionalisés.

 

Pour les pièces détachées, Christensen France travaille avec Calberson, une société spécialisée qui gère le stock installé en région parisienne et en assure la logistique. Des stocks spécifiques de pièces de robots vont aussi être créés chez certains concessionnaires.

Le Galaxy toujours fabriqué

Les visiteurs du dernier Sima ont pu observer qu'à côté du stand Sac Christensen, où trônait le robot RDS, se trouvait un autre stand présentant un modèle très semblable de marque Galaxy. Ces robots vont en effet continuer d'être fabriqués. Sac Christensen précise que son RDS sera commercialisé en priorité là où la marque est représentée. Si ce n'est pas le cas, un concessionnaire qui ne souhaite pas un rapprochement avec Sac Christensen pourra proposer d'installer un appareil de marque Galaxy.

(1) Présent dans 65 pays, Sac réalise un chiffre d'affaires estimé entre 120 et 150 millions d'euros.

 

Robot évolutif jusqu'à deux stalles

Le RDS Futurline est un robot évolutif puisqu'à partir d'une configuration en simple stalle, il est possible d'en ajouter une deuxième en parallèle, qui partagera la même machinerie, la même informatique et sera desservie par l'unique bras robotisé en position centrale. Les stalles sont inspirées de celles d'une installation en tandem et l'essentiel des composants est emprunté à la traite conventionnelle. Quant au bras robotisé, il est fourni par Motoman, une marque suédoise qui compte aujourd'hui dans les 150.000 automates au travail de par le monde, dans l'industrie, l'assemblage et même l'agroalimentaire puisqu'ils servent entre autres à retourner les fromages dans les salles d'affinage.