Daniel Westphal est installé en Gaec avec son frère, Jean-Luc, sur 144 hectares à Weinbourg, dans le Bas-Rhin. Il partage une grande demeure avec ses parents. Le chauffage et la production d'eau chaude nécessitent entre 8.000 et 10.000 litres de fioul par an.

Pour pouvoir utiliser des matériaux végétaux, il change la chaudière, qui brûle tout d'abord de la plaquette de bois. Durant l'hiver 2001-2002, elle fonctionne aux graines de moutarde. "C'est une très bonne énergie", commente Daniel Westphal. Mais l'odeur désagréable produite à la combustion lui fait envisager la céréale. Depuis le printemps de 2002, l'orge de printemps sert de combustible. Elle est produite sur une partie des 15 hectares de jachère de l'exploitation et sera bientôt remplacée par le blé. La chaufferie prête à fonctionner a coûté 11.130 € TTC (73.000 F), soit de 25 à 30% de plus qu'une solution fioul. Il faut y ajouter 2.500 euros (16.400 F) pour le boisseau de stockage. Mais la Région et l'Ademe (1) ont octroyé une aide de 4.600 euros.

Pour Daniel Westphal, "la question de la rentabilité ne se pose pas. Avant, ma facture de fioul dépassait 20.000 F par an. Le blé ne me coûte que sa mise en culture. De plus, c'est une énergie naturelle, renouvelable et propre comparée au fioul". "Le plus dur a été de se procurer les textes réglementaires concernant la jachère énergétique et de dénicher un fabricant de chaudière", indique-t-il.

"Il est normal de respecter les règles"

Car produire de la céréale énergie comporte d'abord une série d'obligations déclaratives auprès de l'Oniol (2). Une déclaration d'intention doit être remplie avant le 31 janvier pour une culture d'hiver et le 30 avril pour une culture de printemps. Elle mentionne la surface et une estimation du volume de la récolte. Tout incident de culture doit être signalé à l'aide d'un formulaire type.

La première déclaration doit être accompagnée d'un descriptif technique de l'installation de chauffage (caractéristiques de la chaudière, estimation des besoins…). Les volumes récoltés font l'objet d'une pesée avec un matériel agréé et d'une déclaration récapitulative à l'office. La réglementation prévoit une dénaturation mensuelle de la céréale énergie avec 5% de fioul. "Ce n'est pas pratique, juge Daniel Westphal. Le fioul ne me convient pas. D'abord pour l'odeur de grillé qu'il dégage. Ensuite parce que 5% est une proportion qui imprègne trop la céréale." Pour des raisons pratiques, Daniel Westphal a également choisi d'incorporer immédiatement le fioul à l'ensemble des 18 tonnes qui couvrent ses besoins annuels. Le fioul est mélangé à la céréale lors de son chargement dans le boisseau de stockage. Au fil des mois, il tient un registre d'utilisation où sont notées les dates de réapprovisionnement du silo et les quantités ajoutées à chaque plein. Une copie en est adressée à l'Oniol. "L'utilisation de ces céréales est transparente, indique Daniel Westphal. Des règles ont été fixées. Il est normal que je les respecte."

(1) Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.

(2) Office national interprofessionnel des oléagineux, protéagineux et cultures textiles.

 

Autonomie: de deux à huit jours pour 600 litres

La chaudière a une puissance de 40 kWh. Le corps de chauffe brûle la céréale amenée par une vis depuis un silo accolé à la chaudière d'une capacité de 600 litres. Ce dernier est alimenté par gravité via deux goulottes en PVC qui font la liaison avec un boisseau de 30 tonnes installé sur une dalle à l'étage de la grange, où l'ensemble prend place. Le réapprovisionnement du silo est commandé par l'utilisateur. Six cents litres garantissent une autonomie de deux à trois jours en températures négatives et de six à huit jours à l'intersaison.

 

 

Produire au coût le plus bas

Les 3,25 hectares de blé destinés à la production d'énergie en 2003 ont été implantés sur une parcelle qui a reçu entre 6 et 7 t/ha de fientes de poules pondeuses pour toute fumure. Le travail du sol s'est limité à un classique passage de rotoherse. Daniel Westphal a utilisé de la semence de ferme d'un blé fourrager (Trémie). Il a semé à une densité de 160 kg, inférieure d'environ un quart à la normale (200-220 kg). La culture a subi en tout et pour tout un désherbage avec le produit le moins cher. Aucun fongicide n'est prévu. Il table sur un rendement de 55 q/ha. Trois autres hectares ont été semés en orge de printemps. Leur récolte approvisionnera la chaudière de la maison de Jean-Luc Westphal, qui s'est décidé à adopter la céréale énergie au début de 2003. En 2002, 8 hectares d'orge de printemps n'ayant subi ni désherbage, ni traitement, avaient fourni un rendement de 23 q/ha.