Des noires, des blanches, des rouges, des brunes… Le troupeau laitier de Pascal Pommereul, éleveur à Saint-Brice-en-Coglès (Ille-et-Vilaine), n’est pas commun dans le paysage breton, formant un beau tableau sur fond de couleurs d’automne. Une diversité issue du croisement entre races que l’éleveur pratique depuis quinze ans. « Meilleure fertilité, facilité de vêlage, moins de problèmes de retournement de caillettes, moins de mammites, très peu de fièvres de lait », détaille l’éleveur, qui n’y voit que des avantages. D’autant plus que la production est au rendez-vous, puisque la moyenne d’étable s’établit à 8 200 kg par vache.
Un déclic en 2002
« Quand je me suis installé, comme beaucoup, j’étais dans le schéma classique de sélection holstein, dans la course à l’index et à la production laitière, avec l’objectif de vaches à 10 000 l », se souvient Pascal, en Gaec avec son frère, Jean-François. Avec à la clé des problèmes de mammites et de reproduction, et en conséquence des taux de renouvellement élevés. « Même en diminuant la production laitière, je n’ai pas vu d’amélioration. »
Le déclic a lieu en 2002 en écoutant le directeur de l’Upra Holstein, de retour d’un voyage aux États-Unis, vanter la technique de croisement pour remédier aux problèmes de consanguinité. Un tollé à l’époque ! Sa réflexion mûrit. Il s’appuie sur un constat : « En porc, en lapin, en volailles, les éleveurs ne travaillent jamais en race pure. Nous sommes les seuls à le faire, en bovins. »
Le producteur se lance en 2003 en démarrant avec de la semence montbéliarde, puis brune. « La première année, j’ai tout inséminé en montbéliard. » En s’affranchissant du schéma classique, sans référence, il tâtonne. « Avec le recul, la brune a été une erreur car l’offre en reproducteurs était réduite. Nous avons utilisé un seul taureau, avec comme résultat une baisse de la conformation et des veaux mâles difficile à vendre. » Avec son frère, ils décident de passer en rouge scandinave en 2010.
Se tenir à une stratégie
« L’important est de garder une stratégie et de s’y tenir. Il faut se poser la question : “Qu’est-ce que je recherche en tant qu’éleveur ?” Pour ma part, mes priorités sont le lait, les taux, les bonnes mamelles et du corps. » Le schéma de croisement alterne les races dans une même succession (taureau montbéliard, puis rouge, puis holstein, avant de revenir à un montbéliard, etc.), avec des mâles de race pure. Pascal choisit les reproducteurs parmi le tiers supérieur selon ses critères. « Le plan d’accouplement est simple à établir, je dispose de 5 à 6 taureaux complets dans chaque race. La consanguinité n’est plus un problème et un critère d’élimination de taureaux. » Un choix qui s’avère payant sur le plan technico-économique grâce à un troupeau plus fonctionnel (voir tableau). Les génisses sont inséminées à partir de 400 kg et plus de 15 mois d’âge. Les frais vétérinaires sont réduits (6 €/1 000 l).
Sur le dernier exercice (2015-2016), particulièrement pénalisé par la conjoncture laitière, l’exploitation a dégagé un EBE de plus de 200 €/1 000 l. L’éleveur ne reviendrait pas en arrière. « Je fais moins d’heures de travail et, surtout, je me suis libéré d’une charge mentale, se félicite Pascal. Les vaches croisées, ce n’est pas miraculeux, mais elles sont intégrées dans un système optimisé sur mon exploitation. Elles contribuent donc largement à ces bons résultats. Et ce sont des vaches faciles à vivre. »