Les premières coupes de luzerne-dactyle-trèfle violet ont été fauchées début mai. À cause de la pluie, Valentin Fassier a dû patienter quelques jours pour récolter les six hectares du mélange. En 2015, les premières luzernes avaient été implantées en pur sur les terres argilo-calcaires. Depuis l’automne 2016, le jeune éleveur les cultive en mélange avec du dactyle et du trèfle violet. « L’association des espèces sécurise la valeur alimentaire du fourrage. La graminée apporte l’énergie qui fait défaut à la légumineuse », précise-t-il. Ce fourrage, riche en protéines, est valorisé dans un mash (1). Complété avec des aliments achetés, ce dernier est préparé à l’aide d’une mélangeuse tous les deux jours pour les vaches suitées, et tous les quinze jours pour les femelles à l’engrais et les broutards.
Afin d’obtenir de bonnes valeurs nutritives, Valentin essaie de couper précocement : au stade début bourgeonnement de la luzerne et du trèfle (l’épi du dactyle étant quant à lui à mi-chemin dans la gaine) pour l’enrubannage, et dès la première fleur pour le mélange rentré en foin. En plus du stade du fourrage, il tient compte de la somme des températures : 700 à 800 degrés/jour pour la fauche précoce. « J’essaie de faucher à 7 cm minimum, explique-t-il. Cela facilite la circulation de l’air et permet à la plante de mieux repartir. Je fauche en début d’après-midi et j’évite de remuer le fourrage autant que possible. Pour l’enrubannage, je ne fane qu’une seule fois. »
Différents mash
L’enrubannage est destiné à la ration des vaches suitées. Il est intégré dans un mash (voir tableau) distribué quotidiennement. En parallèle, du foin de prairie est déroulé manuellement au cornadis, à raison d’une douzaine de kilos par vache. La mise à l’herbe des mères et de leurs veaux a lieu fin mars-début avril, en pâturage tournant.
Les broutards mâles sont complémentés à partir de mi-mai. Ils pèsent alors entre 220 et 250 kg. Dans des nourrisseurs adaptés, un mash fibreux préparé avec du foin de luzerne (voir tableau) a remplacé le concentré acheté. Il est distribué à volonté. « À poids brut équivalent, la consommation de mash est identique à celle d’un aliment complet, précise Valentin. Mais le mash est bien moins coûteux et il permet de faire consommer de la fibre, ce qui réduit le risque d’acidose. » Les premiers mâles sont vendus fin août-début septembre. À dix mois, ils pèsent autour de 400 kg. Les ventes peuvent être anticipées selon les opportunités de marché. En 2017, 47 broutards ont été commercialisés à un poids moyen de 379 kg et à un prix de 2,64 €/kg.
Les génisses d’un et deux ans destinées au renouvellement sont alimentées en libre-service, par souci de simplicité et de contrainte de bâtiment. En plus d’un enrubanné de prairie permanente, elles sont complémentées au seau.
30 bovins de plus
Les femelles non conservées pour le renouvellement ou vendues pour la reproduction sont engraissées. En 2017, le poids carcasse moyen des 23 vaches finies s’est établi à 480 kg, et celui des 5 génisses de 30 mois, à 370 kg. L’aliment d’engraissement se compose de 8 % de mélasse, 24 % de paille, 52 % de farine de triticale-maïs (50-50) et 16 % de complémentaire azoté à 30 %. Avec 5 à 6 ha supplémentaires qui seront implantés cet été, l’association luzerne-trèfle-dactyle pourra être introduite dans la ration sous forme de foin. Valentin ne compte pas utiliser l’enrubanné pour les femelles à l’engrais. « Ce serait trop contraignant en termes de fabrication du mash. Avec l’enrubanné, la durée de conservation est de 3 à 4 jours maximum, alors qu’en sec, il m’arrive de le garder quatre mois pour des petits lots. »
Avant d’introduire des légumineuses dans son assolement, Valentin achetait pour ses broutards 70 t d’aliment complet par an à 370 €/t. Aujourd’hui, avec la même quantité de concentré, il peut engraisser 30 bovins adultes supplémentaires. Il estime possible d’économiser encore 7 000 à 8 000 € sur la facture d’aliment, avec des fourrages récoltés au bon stade et riches en protéines. « Mon objectif est de supprimer les complémentaires azotés du commerce dans l’alimentation des vaches suitées. Pour autant, je ne vise pas l’autonomie protéique à 100 %. J’estime que, pour bien finir les animaux, il me faudra toujours apporter un peu de concentrés achetés. »
(1) Mélange de matières premières en l’état ou aplaties (ni broyées ni en granulés), et incorporant des fibres.