L’électrochoc a eu lieu il y a quatre ans. J’étais en Gaec, depuis treize années, près de Nantes, avec ma mère et un associé, ainsi que son frère qui avait remplacé mon père à sa retraite. Le travail ne manquait pas avec 125 vaches laitières sur 300 ha. Alors que pour moi tout allait bien, j’ai reçu un véritable coup de massue sur la tête. Mes associés m’ont, d’un seul coup, assailli de reproches sur mon travail. J’étais abasourdi. Moi qui étais éleveur depuis vingt ans, je pensais pourtant bien maîtriser mon métier ! J’ai vécu deux mois très compliqués à ruminer, sans arriver à en parler à ma femme ni à mes parents. J’étais malheureux. Pouvais-je quitter l’exploitation qui était dans la famille depuis quatre générations ? Mais je savais qu’il fallait que je fasse un choix pour moi, et non pas en fonction des autres et du qu’en-dira-t-on. Après bien des nuits blanches, j’ai pris ma décision, de façon irrévocable.

Le 3 décembre 2013, j’ai annoncé à mes associés que je partirais huit mois plus tard, en août 2014. Mais ils m’ont demandé de partir avant, au 31 mars, date à laquelle ma mère prenait sa retraite. Cette façon de me dire qu’ils ne voulaient plus de moi m’a déculpabilisé et même soulagé.

Nous avons fait évaluer l’entreprise et trouvé un arrangement financier, ainsi qu’un échéancier qui convenait aux deux parties. L’annoncer à mes parents a été difficile. Sur le coup, ils n’ont pas compris. Mais quelques mois plus tard, ils ont reconnu que c’était la meilleure solution.

Regarder devant soi

La session « Continuer ou se reconvertir », organisée par la chambre d’agriculture de Loire-Atlantique et la MSA 44-85, m’a bien aidé à me projeter dans ma vie d’après. J’ai fait un bilan de compétences, puis j’ai passé un permis poids lourd. J’ai trouvé tout de suite du travail dans le transport. Le premier patron que j’ai rencontré m’a dit : « Je vous embauche parce que vous étiez agriculteur. Ça veut dire que vous êtes travailleur, débrouillard et courageux. » J’ai passé trois ans sur les routes, et aujourd’hui je travaille dans une entreprise locale. Je profite enfin de mes enfants, j’ai des vacances et mes week-ends. Avant, c’était une vie de fou ! Si mes associés ne m’avaient pas poussé vers la sortie, je serais encore agriculteur, qui sait ? J’ai aimé ce beau métier, mais je n’ai pas de regrets, il faut voir le bon côté et regarder devant.