Près du quart des jambons ne répondent pas aux exigences des industriels en termes de qualité technologique (rétention d’eau à la cuisson et tenue de la viande au tranchage). Les salaisonniers, cherchant à réduire le sel et ne surtout pas utiliser des phosphates ont besoin d’une viande de haute qualité. Or, la filière se trouve à court de clés pour améliorer la situation. Pour une part, cette qualité technologique est liée aux pratiques en élevage. Le transport et l’abattage sont également des étapes déterminantes, et en général maîtrisées.
Rétention d’eau. « La valeur du pH est très liée au stress des animaux juste avant l’abattage, et le pH ultime est lié à la quantité de glycogène présent dans le muscle avant l’abattage, rappelle Gilles Nassy, de l’Institut du porc (Ifip). L’éleveur doit veiller à bien préparer ses porcs avant leur chargement : qu’ils soient ajeunés correctement, abreuvés et mis sur une plate-forme pour faciliter le chargement sans contraintes et sans stress. »
Tenue au tranchage. Les paramètres d’élevage ont une influence sur le pH, donc sur le déstructuré du jambon, sans que les chercheurs puissent aujourd’hui expliquer pourquoi. La météo a aussi un effet sur le pH, qui tend à diminuer quand il fait chaud. À l’inverse, le pH ultime augmente quand le temps de transport s’allonge, du fait de la consommation par les muscles de leur réserve en glycogène.
« Les modes d’élevage sont plus ou moins impactants, rappelle Patrick Chevillon, de l’Ifip. Le critère de pH ultime joue en défaveur du plein air et de l’élevage sur paille, par rapport à un élevage en bâtiment. Les filières concernées ont trouvé des parades, en jouant sur la génétique et sur une mise à jeun plus longue, par exemple. Le meilleur compromis semble de rester en bâtiment en accroissant la surface par animal. Sur la tenue au tranchage en revanche, les porcs de plein air, ayant davantage d’activité physique, donnent des jambons qui se tiennent mieux. » De plus, toutes choses égales par ailleurs, certains éleveurs fournissent des viandes de meilleure qualité que d’autres, sans que les causes de cette différence soient identifiées.
La piste génétique
Une étude sera menée courant 2017 par l’Ifip pour tester différentes hypothèses : la ventilation, les caillebotis, l’alimentation et le taux de fibre, l’abreuvement… Une autre étude se penche sur la génétique. « L’objectif est de comprendre le déterminisme génétique sur le défaut de déstructuré du jambon, décrit Sandrine Schwob, de l’Ifip. Nous soupçonnons une implication de certains gènes majeurs, dont le gène halothane. »
L’étude doit permettre d’identifier les gènes impliqués, ainsi que la variabilité de ce défaut selon les races. Ainsi, 1 500 porcs charcutiers, dont on connaît les pères, seront génotypés pour cela. En parallèle, le caractère de déstructuré du jambon sera mesuré sur les 2 500 collatéraux de races pures abattus chaque année à la station expérimentale France génétique porc à Le Rheu.