Lors des assises de la Fict (Fédération des entreprises de charcuterie traiteur) le mardi 20 septembre 2022 à Paris, il a été beaucoup question de la répartition de la valeur tout au long de la filière, d’autant que les coûts de production ont particulièrement flambé ces derniers temps. Les propos d’estrade du directeur exécutif de Carrefour France, Rami Baitieh, presque empathiques à l’égard de ses fournisseurs charcutiers, se disant pleinement ouverts aux discussions dans les négociations commerciales, n’y auront rien changé : ils ont été largement contredits par les chiffres édifiants, divulgués par la suite par le directeur délégué de la Fict, Fabien Castanier, et qui sont issus de l’observatoire de formation des prix et des marges.
La grande distribution capte 86 % du prix de vente
Prenant l’exemple emblématique du jambon cuit supérieur en libre-service, celui-ci a montré que la grande distribution était le maillon qui captait de loin le plus de valeur. Ainsi, sur une augmentation de 1,69 €/kg du prix de vente au détail durant la période de 2016 à 2021, elle en a récupéré 86 %, soit 1,45 € quand les éleveurs captaient 14 centimes, les abatteurs 20 centimes pendant que les industriels perdaient 19 centimes. « La distribution voit la part qui lui revient en augmentation et en évolution constante et régulière pour atteindre +53 % à l’issue de la période », a-t-il commenté.
Plus largement, le rayon de la charcuterie chez les GMS est celui qui, en valeur absolue, contribue le plus à la marge nette des distributeurs, suivi des fruits et légumes et des volailles quand par ailleurs la boucherie, la poissonnerie et la boulangerie-viennoiserie sont en marge négative, selon là aussi des chiffres de l’observatoire établis à partir des comptes de 2020. Le taux de marge nette (6.9 %) est trois fois plus élevé que la moyenne des autres rayons qui n’est que de 2,3 %.
Leclerc et Intermarché sont directeurs
Intervenant depuis la salle, Antoine d’Espous (Loste) a fait remarquer que 40 % du marché de la charcuterie est réalisé par deux fabricants, Leclerc et Intermarché, « ce qui vous explique directement l’utilisation que ces distributeurs font de la baisse des prix et de la compétitivité dans leurs rayons, et ce qui amène l’ensemble des distributeurs à faire une pression terrible sur les PME. C’est une situation unique en Europe mais aussi en France d’avoir dans un métier une telle concentration dans la production. Que faire quand on est en face de ça ? »