Faut-il implanter des cultures destinées à l’alimentation humaine là où prospère l’élevage aujourd’hui ? Les bovins viande sont-ils une plaie pour l’environnement à cause de leurs émissions de gaz à effet de serre (GES) ?

Jean-Louis Peyraud, directeur de recherche à l’Inrae, pointe le simplisme de ce raisonnement qui se répand dans les médias. « Certes, l’élevage occupe 70 % des terres exploitables, mais plus de la moitié de ces surfaces sont des prairies. » La plupart seraient inexploitées sans les animaux, surtout en altitude. « En montagne, la réalité, c’est la réduction du cheptel et la disparition des éleveurs. Bientôt, on va se demander comment maintenir le troupeau. »

Biodiversité favorisée

« Le pâturage a un effet irremplaçable sur la richesse de la biodiversité et sur les paysages, poursuit l’expert. Les ruminants récupèrent “gratuitement” l’herbe et la transforment en lait et en viande. » Sans compter l’emploi associé qui disparaîtrait. « En plaine, le retournement des prairies cultivables appauvrirait­ cette biodiversité. Il conduirait à un déstockage du carbone­ du sol et augmenterait l’usage des pesticides. »

Quatre problèmes seraient alors à résoudre, selon le chercheur : les GES, l’emploi des pesticides, le maintien de la biodiversité, l’autonomie en protéines et en azote des engrais. « La solution n’est pas la disparition de l’élevage mais son recouplage avec les cultures. En France, l’élevage est trop concentré à l’Ouest, alors qu’il a disparu dans d’autres régions. Mais les mécanismes économiques rendent difficile ce rééquilibrage. »

Pour calculer le réel « coût environnemental » du panier alimentaire, il faudrait additionner les émissions de GES de chaque élément, ainsi que les interactions entre les modes de production des aliments : utilisations des coproduits (comme les tourteaux), apport en biodiversité, usage des antibiotiques, des pesticides, recyclage des effluents.

Quant aux viandes cellulaires, les techniques sont loin de satisfaire aux exigences européennes, avec des procédés qui font appel aux antibiotiques, aux facteurs de croissance, parfois aux pesticides. Si on additionne le coût énergétique exigé, leur impact environnemental serait supérieur à celui de l’élevage.