Faisant suite à un signalement de scientifiques en 2019, qui avait déjà donné lieu un avis ne concluant pas à une alerte sanitaire, l’Anses (Agence nationale de sécurité sanitaire) avait décidé d’engager des expertises complémentaires sur les inhibiteurs de la succinate déshydrogénase, les SDHI. Ces dernières portaient sur la révision des valeurs de sécurité utilisées pour statuer sur les risques liés aux expositions ainsi que sur les expositions par ingestion aux résidus de SDHI.

Réexamen de 39 valeurs toxicologiques de référence (VTR)

L’Agence a publié mardi 5 décembre 2023, les résultats de ces expertises sous la forme de deux avis. Concernant le réexamen des valeurs toxicologiques de référence de cette famille de fongicide, elle indique ainsi avoir examiné 14 substances actives SDHI : 11 approuvées dans l’Union européenne, 2 ne l’étant plus, et 1 en cours d’évaluation. Cela correspond à l’examen approfondi de 39 valeurs toxicologiques de référence (VTR).

« Les VTR sont les doses de substances chimiques à ne pas dépasser pour préserver la santé humaine, pour une voie d’exposition donnée et une durée donnée (court, moyen ou long terme). Une attention spécifique a été portée à la prise en compte des modes d’action pouvant provoquer une toxicité mitochondriale », précise l’Agence.

L’expertise ne remet pas en cause 28 VTR existantes. Toutefois à la suite de l’examen des données scientifiques disponibles, l’Agence propose d’ajuster à la baisse les 11 autres, en diminuant modérément leur valeur actuelle d’un facteur de réduction allant de 1,5 à 3,3.

Ajustement et recommandations

« Ces propositions d’ajustement, qui vont dans le sens d’une plus grande protection, seront portées au niveau européen afin d’être prises en compte lors des réévaluations des substances actives concernées », confie l’Anses. L’Agence formule par ailleurs plusieurs recommandations méthodologiques et de recherche pour poursuivre l’amélioration des connaissances concernant les modes d’action des SDHI et leurs conséquences sanitaires éventuelles.

Certaines recommandations seront de plus portées à la connaissance de l’OCDE (Organisation de coopération et de développement économiques) et de l’Efsa (Autorité européenne de sécurité des aliments) pour contribuer à définir des stratégies de tests et des protocoles d’études à utiliser dans le cadre de l’évaluation des substances actives.

L’Anses a par ailleurs évalué pour les consommateurs les risques liés à une exposition cumulée à l’ensemble des substances SDHI via l’alimentation.

« Les résultats obtenus montrent que les seuils de sécurité pour la santé des consommateurs ne sont pas dépassés, y compris avec les VTR revues à la baisse par l’Anses. »

Poursuite des études

Afin de poursuivre l’amélioration des connaissances sur les niveaux d’exposition des populations aux SDHI, l’Anses a d’ores et déjà intégré ces substances dans l’étude de l’alimentation totale (EAT). En cours de déploiement, elle estime l’exposition des populations à des substances chimiques présentes dans les aliments ainsi que dans une campagne de mesures de présence des produits phytopharmaceutiques dans les sols (réalisée par l’Inrae).

D’autres études viendront par ailleurs compléter les données épidémiologiques disponibles « peu nombreuses pour ces substances ». Et deux projets de recherche sont en cours, financés par le plan Ecophyto et le programme national de recherche environnement-santé-travail (PNREST) de l’Anses, afin d’approfondir les connaissances des effets des fongicides de cette famille au sein des cellules vivantes, par des approches toxicologiques et mécanistiques.