« Ces décisions n’ont pas été rendues nécessaires par la récente acquisition », a affirmé lors d’une conférence téléphonique le 29 novembre 2018, le patron du groupe, Werner Baumann, évoquant une « stratégie remontant à 2014 ». Un tiers des suppressions de postes envisagées concerne toutefois la division agrochimique, effet direct de la récente intégration de Monsanto, explique le groupe dans un communiqué.
Les conséquences sociales de la fusion
Bayer tablait jusqu’ici sur 1,2 milliard d’euros de synergies à partir de 2022, mais n’avait pas détaillé les conséquences sociales de ce mariage conclu au début de juin pour 63 milliards de dollars (54 milliards d’euros). Environ 1 250 emplois supplémentaires seront supprimés dans la division pharmaceutique et 1 100 dans les médicaments sans ordonnance, tandis que les services administratifs et commerciaux seront amputés de « 5 500 à 6000 postes ».
Un « nombre significatif » de ces coupes concernera l’Allemagne. Au total, le groupe entend économiser « 2,6 milliards d’euros par an » à partir de 2022, tandis que son vaste plan de restructuration devrait lui autour de 4,4 milliards d’euros. En se séparant de plus de 10 % de ses 118 200 salariés dans le monde, Bayer compte « améliorer ses performances et son agilité », argumente Werner Baumann.
Des activités à vendre
Le groupe pharmaceutique et chimique, qui se présente désormais comme une « entreprise des sciences du vivant », entend par ailleurs se délester d’activités non stratégiques. Bayer prévoit de vendre l’an prochain sa division de santé animale, la plus modeste du groupe, et « examine ses options stratégiques » concernant deux activités de parapharmacie, Coppertone (crèmes solaires) et Dr. Scholl’s (soin des pieds).
Comme il l’avait fait avec Covestro, son ex-filiale de chimie de spécialité, le groupe envisage de céder les 60 % qu’il détient dans Currenta, qui exploite trois sites chimiques en Allemagne. L’ensemble de ces mesures doit permettre à l’inventeur de l’aspirine, bénéficiaire mais violemment chahuté en Bourse depuis le rachat de Monsanto, de viser 10 € de bénéfice par action en 2022, contre une cible de 5,70 à 5,90 € cette année.
Pour « renforcer sa compétitivité », Bayer entend aussi réinvestir une partie des sommes économisées en déboursant 35 milliards d’euros d’ici à la fin de 2022, dont les deux tiers en recherche et développement. Le groupe n’explique cependant pas comment il compte apaiser les inquiétudes liées au rachat de Monsanto et à la cascade de risques judiciaires associés au mastodonte des semences et des OGM.
L’aléa juridique du glyphosate
Depuis cet été, et la condamnation de Monsanto à indemniser un jardinier californien en raison de la dangerosité de son herbicide au glyphosate, les procédures du même type se sont accumulées. Lors du dernier pointage au 30 octobre, « quelque 9 300 requêtes avaient été déposées aux États-Unis » contre le seul glyphosate, « et d’autres devraient suivre », a indiqué Werner Baumann à la mi-novembre.
La restructuration n’est « certainement pas » liée au glyphosate, a insisté le patron de Bayer. Mais les analystes soulignent l’énorme aléa judiciaire et financier associé à ces litiges, rendant la facture potentielle pour Bayer très difficile à évaluer. À la mi-août, la banque Berenberg avançait le possible montant final de 5 milliards de dollars, tandis que Michael Leacock, analyste chez MainFirst, jugeait que Bayer risquait de « facilement » débourser le double.
En Bourse, le titre Bayer a fini en baisse de 0,72 %, à 63,77 €, jeudi, portant à 37,7 % ses pertes depuis le début de l’année.