Dure semaine pour les céréales françaises, dont les prix continuent de reculer pour gagner en compétitivité face à la mer Noire dans un contexte de remontée handicapante de l’euro.

Le blé poursuit son repli

Les marchés physiques du blé ont encore perdu du terrain cette semaine, cédant 2 à 6 €/t selon les places, le rendu Rouen s’établissant désormais à 154 €/t. Seule la cotation à La Pallice résiste, à 158,5 €/t. Le blé français reste sous la pression des exportations massives de la mer Noire, à commencer par la Russie.

Les blés de l’Union européenne (UE) sont par ailleurs pénalisés par le raffermissement de l’euro, qui a atteint jeudi son plus haut niveau depuis deux semaines face au dollar. La séquence haussière entamée par les prix des blés de la mer Noire il y a près d’un mois semble s’essouffler. La différence entre les prix (en dollar) du Fob Rouen et du Fob mer Noire est désormais à l’avantage du blé français, qui devrait donc redynamiser sa demande à l’exportation vers les pays tiers.

L’origine tricolore était toutefois de nouveau exclue du dernier appel d’offres du Gasc égyptien, mardi, car proposée à un prix bien plus élevé (environ 10 $/t) que les meilleures offres russes. La Russie a de nouveau raflé la mise, 170 000 tonnes, renforçant sa suprématie sur le marché égyptien.

Les prix actuels rendent le blé français très compétitif au sein de l’UE, mais il faudra pour la France assurer un bon rythme d’exportation, y compris en dehors de l’UE, pour ne pas finir avec un stock de report conséquent compte tenu de la volumineuse récolte.

À suivre également les conséquences de la mise en place par la Turquie d’une procédure administrative complexe pour l’importation de blé russe : si cela devait ralentir les exportations de la Russie vers ce pays, cela pourrait certes laisser de la place pour les origines concurrentes, notamment européenne comme l’an passé, mais aussi renforcer la pression baissière liée aux disponibilités pléthoriques de blé russe.

L’orge dans la roue du blé

L’orge fourragère n’a pas résisté au recul du blé. Le rendu Rouen perd près de 6 €/t, à 148 €/t, au plus bas depuis un mois. Sur le créneau de l’orge de mouture, c’est une nouvelle fois la mer Noire qui met la pression, avec des exportations très dynamiques de l’Ukraine, ce qui est assez habituel, mais aussi de la Russie.

Au début d’octobre, ce pays avait expédié près de deux fois plus d’orge que l’an dernier à la même date. L’Ukraine réussit quant à elle une belle performance à destination de la Chine, déjà près de 800 000 tonnes expédiées depuis le début de la campagne. Le marché de l’orge brassicole est quasi stable pour les variétés de printemps (environ 200 €/t Fob Creil), tandis que les variétés d’hiver fléchissent (–4 €/t à 159 €/t en Fob Creil).

Pas de malice pour le maïs

Les semaines se suivent et se ressemblent pour le maïs français, qui voit ses prix s’éroder, faute d’une compétitivité suffisante face aux origines concurrentes dans un contexte de très grosse récolte mondiale. Le Fob Bordeaux se déleste encore de 4 €/t cette semaine. De plus, le petit regain de compétitivité qu’avait permis le repli des cours dans l’UE depuis le début de septembre est en partie oblitéré par l’abaissement par Bruxelles du droit de douane sur les importations.

Les maïs brésiliens et ukrainiens continuent de « calculer » dans l’UE, ce qui va conduire à de fortes importations de maïs par l’Europe cette année. Le rapport du ministère américain de l’Agriculture (USDA) paru hier soir, le 12 octobre, n’est pas venu améliorer les choses. Le département américain à l’Agriculture a revu à la hausse le rendement de maïs prévu pour les États-Unis, dans le haut de la fourchette des attentes des opérateurs.

Toutefois, le rythme lent de la récolte dans ce pays pourrait réserver des surprises quant au volume définitif de la récolte. Seule la forte hausse du prix du soja, provoquée par la publication du rapport de l’USDA, apporte actuellement un soutien à celui du maïs.

Coup de pouce au soja de l’USDA

De nombreux opérateurs s’attendaient à une hausse des estimations de l’USDA du rendement de soja, mais c’est l’inverse qui s’est produit. Les cours du soja à Chicago s’étaient doucement effrités au cours de la semaine, et ont fortement rebondi lors de la séance d’hier. Ainsi, les cours du soja gagnent par rapport à la semaine dernière un peu moins de 9 $/t. La récolte américaine reste toutefois prévue par l’USDA à 120 millions de tonnes (Mt), avec une légère révision en hausse de la surface.

Il est à noter par ailleurs que les conditions climatiques restent toujours préoccupantes en Amérique du Sud, au Brésil en particulier, et que la Chine a publié un chiffre d’importation très supérieur aux attentes pour le mois de septembre, portant le total de campagne à 93,5 Mt.

Le colza sous la pression des importations

Les importations européennes de colza sont actuellement très élevées, plus de 1 million de tonnes depuis le début de la campagne, avec des bateaux ukrainiens qui arrivent dans les ports du nord-ouest de l’UE. Cela pèse sur les prix Fob Moselle, qui reculent cette semaine de 6 €/t. Par ailleurs, les prix perdent 4 €/t rendu Rouen (à 354 €/t), mais seulement 2 €/t sur Euronext. Nous attendons un recul des importations en seconde partie de campagne (moindres disponibilités australiennes).

Récemment, l’opérateur Saipol a annoncé préparer une réduction de la production hexagonale de biodiesel en 2018, avec pour effet un recul de la trituration. Cela fait suite à la décision de la Commission européenne de lever les droits de douane sur le biodiesel argentin. Malgré l’annonce de l’industriel, les contrats à terme sur février et mai 2018 se sont plutôt renchéris cette semaine : +4 à 5 €/t).

Le biodiesel en provenance de l’Argentine devrait, selon nous, surtout entrer sur les marchés du sud de l’UE, en particulier l’Espagne, sans vraiment concurrencer la demande en ester de colza. Les cours du canola sont quasi inchangés cette semaine au Canada (+0,5 $/t). La récolte au Saskatchewan est quasi terminée, mais reste en retard en Alberta (deuxième région productrice). Les exportations comme la demande intérieure accélèrent, et soutiennent les prix.

Le prix du tournesol est stable sur la semaine à 320 €/t à Saint-Nazaire.

Nouvelle remontée du prix du tourteau mondial

Le prix du tourteau de soja à Chicago remonte cette semaine de plus de 10 $/t sur le rapproché. La hausse des cours de la graine, ainsi qu’une forte demande mondiale et le maintien des craintes sur la production argentine soutiennent les cours. La cotation du tourteau de soja à Montoir est de nouveau inchangée par rapport à la semaine dernière.

Le prix du pois fourrager est stable à 190 €/t départ Marne. Le pois jaune n’est pas coté cette semaine.

Tallage

À suivre : avancée de la récolte de maïs aux États-Unis, retour des pluies sur le blé en Australie et gravité des dégâts liés à l’excès d’eau sur les céréales d’hiver en Argentine, semis de soja au Brésil, récolte de soja aux États-Unis et de canola en Australie.