«Une implantation de colza réussie dépend, pour une large part, de la capacité de l’agriculteur à s’adapter au contexte pédo-climatique et sanitaire de ses parcelles », déclare Gilles Sauzet, ingénieur Terres Inovia. Le but est de permettre au colza d’exprimer son potentiel tout en résistant aux agresseurs. Un peuplement homogène à l’entrée de l’hiver avec des plantes à 8 feuilles possédant un pivot bien droit de 15 cm de longueur et un diamètre au collet d’au moins 8 mm sont les prérequis indispensables.
Pour parvenir à ce résultat, la gestion de l’interculture est capitale. Il s’agit à la fois de prendre les bonnes décisions quant au mode de travail du sol qui impacte la structure favorable ou non à l’enracinement, la pression à venir des adventices et la conservation de l’humidité indispensable à une levée rapide.
« Comme nous l’avons constaté en 2016 et 2017, l’état du sol post-récolte a une influence considérable sur le développement futur du colza, poursuit Gilles Sauzet. Cela nous conduit à établir un diagnostic précis à la parcelle en pratiquant un test bêche. »
Après moisson, il s’agit de prélever cinq ou six échantillons sur une vingtaine de centimètres de profondeur et d’observer la tenue de la terre sur la bêche. La présence de blocs compacts ne se désagrégeant pas ou, au contraire, de mottes friables et poreuses avec présence de galeries de vers de terre et de racines va entraîner un type de préparation totalement différent : travail profond avec restructuration dans le premier cas, semis direct possible dans le second.
Limons : attention à la prise en masse
Dans les terrains limoneux, l’option déchaumage superficiel favorable à la levée des repousses et de certaines adventices, suivi d’un labour juste avant semis, peut s’envisager. Afin d’éviter une porosité excessive et un sol trop soufflé défavorable au bon positionnement de la graine ou encore la fabrication de terre fine en excès, le spécialiste déconseille l’emploi de la herse rotative. Une forte pluie peut alors entraîner une prise en masse des premiers centimètres et une asphyxie racinaire. Dans ce type de sol, le vibroculteur paraît mieux adapté. Sans problème particulier de salissement, une fissuration à 10-15 cm de profondeur à l’aide d’un outil à dents équipé d’une herse peigne brisant la paille en surface offre un bon compromis.
Argiles : préparer tôt
Le contexte est différent dans les terres argileuses où le travail du sol est à réaliser le plus tôt possible après la moisson, avec de préférence un outil à dents. « La profondeur est adaptée au résultat du test bêche, le but étant de casser la semelle sans oublier ensuite le roulage destiné à préserver l’humidité, recommande Gilles Sauzet. Le labour et les passages profonds tardifs sont à proscrire. »
Au préalable, il convient de limiter au maximum les déplacements intempestifs dans les parcelles à la moisson, en empruntant de préférence les passages de traitement avec des pneus basse pression. Sur sol sec, un déchaumage superficiel avec un outil à disques dégrade les résidus pailleux. Le travail de fissuration sur 8 à 15 cm intervient après, toujours suivi d’un roulage.
Semis direct à petite vitesse
En présence d’une terre bien structurée, le semis direct économique et rapide apporte une solution à la limitation du salissement. Pour une levée réussie sans élongation de l’hypocotyle, les pailles sont préalablement émiettées par deux déchaumages superficiels, sans rechercher un mélange dans le lit de semences qui contribuerait à l’assécher.
« En respectant une vitesse maximale de 6 km/h, le passage remue très peu de terre, avec pour conséquence des levées limitées de géraniums, assure Gilles Sauzet. Le semoir à disques est équipé de chasse-débris, de façon à obtenir un bon placement de la graine dans le sillon, et de roues de rappui qui assurent le contact sol-graine. »
Strip till : adapté aux limons
Autre alternative testée par Terres Inovia et quelques agriculteurs, le strip till donne des résultats intéressants dans les limons et les argilo-calcaires. Il combine un matériel spécifique qui fissure le sol en profondeur uniquement sur le rang et sème au monograine. « Avec cette technique, l’intervention doit avoir lieu en terrain bien ressuyé et à vitesse réduite, en descendant à 10-15 cm de profondeur, précise Gilles Sauzet. Toutefois, en terre argileuse, il est parfois difficile de trouver le bon moment pour passer et bien positionner la graine. »