L’AFBV a souhaité lors d’une conférence de presse le 27 septembre 2016 à Paris que la recherche agronomique française et européenne ne soit plus « bridée » dans ses utilisations des nouvelles technologies. Pour l’AFBV, ces techniques « d’édition génomique » ouvrent une nouvelle ère dans les recherches en biologie végétale ». Elles sont fondées sur l’utilisation de différents types d’enzymes – méganucléases, nucléases à doigt de zinc, Talen, Crispr-Cas… – pour réaliser des mutations ciblées et précises du génome.

Des travaux en Chine et en Amérique du Nord

Leur intérêt : une exploitation illimitée de la diversité génétique, une modification du gène d’intérêt seulement, un gain de temps pour la création de nouvelles variétés, une exploitation non limitée de la diversité interespèces. Le système Crispr-Cas, le plus connu, a été développé depuis 2012. Déjà plus d’une centaine d’exemples portant sur une vingtaine d’espèces cultivées (soja, orge, tabac, chou, tomate, pomme de terre, blé, maïs…) ont été publiés. La plupart des travaux sont menés en Chine et en Amérique du Nord. Au Canada et aux États-Unis, des variétés issues de cette technologie devraient être commercialisées dans les prochaines années.

« La technique Crispr-Cas 9 est très peu onéreuse, une vingtaine d’euros contre 300 000 € pour l’utilisation de méganucléases il y a seulement cinq ans, chiffre Fabien Nogué, directeur de recherches à l’Inra de Versailles. Elle devient donc accessible à tout le monde. » Crispr-Cas peut ainsi être utilisée par des laboratoires de recherche publique et des semenciers de petite taille. « Il serait extrêmement dommageable pour notre agriculture que des contraintes réglementaires lourdes et coûteuses freinent les sélectionneurs dans l’utilisation de technologies qui leur permettraient de mieux répondre aux défis des prochaines décennies », estime l’AFBV.

Une décision européenne « qui ne cesse d’être repoussée »

L’association demande donc que « soit enfin prise la décision européenne, qui ne cesse d’être repoussée, concernant l’interprétation de la directive 2001/18 pour savoir si elle doit ou non s’appliquer à toutes les plantes obtenues par les techniques d’édition génomique ».

L’AFBV soutient ainsi les positions allemandes et suédoises notamment, qui jugent que « seules les plantes contenant une nouvelle combinaison de matériel génétique par insertion d’ADN recombinant tombent dans le champ de la directive ». Pour l’association, les autres plantes, exemptées de la directive, doivent pouvoir être développées dans les mêmes conditions que les plantes issues de la sélection végétale conventionnelle.

Prendre conscience des enjeux

« Il faut que les pouvoirs publics et la Commission [européenne] prennent conscience des enjeux à venir en matière de recherche et d’amélioration des plantes, insiste Alain Deshayes, président de l’AFBV. Cela fait quatre ans que le système Crispr-Cas existe. On ne peut pas encore rester dans l’incertitude. Il faut que des décisions soient prises afin que les recherches au laboratoire puissent déboucher sur des essais au champ. »

I.E.