Les agriculteurs peuvent être des acteurs de la reconquête de la qualité de l’eau. Dans l’Aude, ils mènent une démarche collective sur le bassin versant du Tréboul, avec le syndicat de rivière et l’Agence de l’eau. « Au sein de trois groupes Déphy, nous cherchons à réduire l’utilisation d’engrais et de produits phytosanitaires. Et avec quatre GIEE, nous mettons en place des aménagements destinés à capter une éventuelle pollution diffuse », expliquent Loïc Doussat et Aurélien Chayre, de la chambre d’agriculture de l’Aude.
La première étape a été d’améliorer l’efficacité des bandes enherbées. Leur but est de ralentir les eaux qui ruissellent, pour qu’elles aient le temps de s’infiltrer avant d’arriver au cours d’eau ou au fossé. « Mais si au ras de la bande enherbée, il y a une raie de labour, celle-ci collecte l’eau et court-circuite la bande enherbée », souligne Aurélien Chayre. Pour éviter ce problème, il faut combler ces raies de labour.
Lors d’un voyage d’étude en Lorraine, agriculteurs et conseillers ont ensuite découvert les zones tampons. En s’inspirant de ce qu’ils ont vu, ils ont réalisé en 2016 deux aménagements pilotes. Le premier porte sur un fossé, qui récupère les eaux de drainage d’un bloc de 32 ha avant de se jeter dans le Tréboul. Quatre seuils successifs ont été formés juste après le point d’arrivée du collecteur. Ces seuils ralentissent l’écoulement de l’eau, en formant de petits bassins.
Réduire la pollution
Dans ces bassins, les engrais et les produits phytosanitaires entraînés par les eaux de drainage sédimentent. Une partie est fixée et dégradée par les plantes et les bactéries. Les UV du soleil contribuent également à leur dégradation. « Cet hiver, nous avons réalisé des mesures qui ont montré une réduction de 40 % des nitrates entre l’entrée et la sortie des bassins », note Loïc Doussat.
Les chambres d’agriculture de Lorraine, qui ont mis en place dès 2010 des zones tampons expérimentales, ont constaté une réduction de 10 à 30 % des nitrates. « Pour les produits phytosanitaires, la dégradation va de 0 à 100 % suivant les molécules. En moyenne, elle se situe autour de 20 % », précise François-Xavier Schott, qui suit ces zones tampons.
Le deuxième aménagement pilote, dans l’Aude, est une mare, installée au lycée agricole de Castelnaudary. Elle retient les eaux de drainage en bordure de parcelle avant leur évacuation dans le Tréboul. « Nous allons laisser la végétation s’y développer, pour qu’elle joue son rôle d’épuration comme dans le fossé », précise Aurélien Chayre. L’objectif de ces deux aménagements pilotes est d’évaluer ce qu’ils peuvent apporter pour améliorer la qualité de l’eau. « Pour l’instant, il n’y a pas de cadre réglementaire pour les zones tampons. Avant d’en implanter, il vaut mieux se concerter avec les autres acteurs du territoire. Ce sont des solutions à partager », rappelle François-Xavier Schott.