À Grugé-l’Hôpital, dans le Maine-et-Loire, Christian Delahaye et son fils Johan ont adopté, depuis longtemps, une démarche pour préserver la biodiversité. « Mon père a intégré dès ses débuts, il y a plus de dix ans, le réseau Arbre (Agriculteurs respectueux de la biodiversité et des richesses de l’environnement) », se remémore Johan, installé depuis deux ans.
À ce titre, un diagnostic agroécologique a été effectué sur l’exploitation. Cela a, entre autres, débouché sur un travail de recolonisation de haies par repousses spontanées sur des bords de champs pour les îlots les plus ouverts. Près de deux kilomètres de linéaires sont concernés. « Il s’agit d’une action peu coûteuse, basée sur une simple modification de pratiques et sur l’observation », précise Christian.
Près de 4 km de linéaires
Sur ces onze dernières années, deux autres kilomètres de haies bocagères, constituées d’essences locales (érables champêtres, poiriers, pommiers, chênes, fusains…) ont aussi été implantés. « Nous avons également pris le parti de choisir certaines espèces habituellement plus adaptées au sud du territoire sur les parties les plus séchantes, comme le chêne sessile, notamment en prévision du réchauffement climatique », complète Johan.
Certes, l’emplacement des haies est réfléchi en fonction du pâturage ou de la fauche, toutefois l’idée est bien de créer de petites parcelles, de quatre-cinq hectares maximum, pour avoir une continuité écologique entre la rivière et le bois. La présence de haies offre aussi d’autres intérêts pour les vaches laitières de l’exploitation comme créer des brise-vent et des zones d’ombrages. « C’est également une bonne solution pour mieux canaliser les jeunes animaux », ajoutent les éleveurs de prim’holsteins.
Quant au bois récupéré au cours des tailles d’entretien, il est, en partie, transformé en copeaux pour la litière des animaux, voire pour combler certains chemins. « L’an dernier, l’économie de litière a été à peu près équivalente au coût du broyage », soulignent-ils.
Création de mares
De plus, une mare a été créée, il y a cinq ans, dans une zone humide qu’ils ne pouvaient pas valoriser. Cela a permis d’assainir la zone, où l’on voit désormais beaucoup de batraciens. Avec le syndicat du bassin de l’Oudon, une autre mare va être creusée. Le bassin entretient aussi les ripisylves.
Christian estime, par ailleurs, que l’irrigation de l’herbe favorise les différents biotopes. « Grâce à ces aménagements, il n’y a désormais plus de “coupures”. C’est pourquoi, depuis peu, je remarque des libellules passer au-dessus des chemins », constate son fils.
Un effort est également réalisé grâce à la faucheuse à sections de 9 mètres. En allant moins vite, il y a de fait moins de dégâts. En outre, afin d’être plus respectueux de la faune présente, les associés tentent, quand cela est possible, de travailler de l’intérieur vers l’extérieur de la parcelle, de façon à donner l’opportunité aux bêtes de fuir.
Système plus résilient
« Après le remembrement, quand je suis arrivé dans l’exploitation, nous avons décidé d’implanter des haies sur ce site, mais pas sur celui que nous avions à une dizaine de kilomètres d’ici. Cela nous a permis de nous apercevoir qu’avec le temps nous obtenions de meilleurs résultats ici que là-bas, avec un système plus résilient aux différents stress climatiques. D’autre part, les espèces opportunistes prennent moins le dessus dans nos milieux fermés, où un équilibre se crée entre ravageurs et prédateurs, que dans des milieux plus ouverts et plus propices à ces espèces », complète Christian.
Sur la partie « grandes cultures » de l’exploitation (gérée surtout par deux autres associés), des aménagements sont en réflexion. Avec, en particulier, la possibilité d’implanter des bandes enherbées en bout de champs : des zones qui, souvent, présentent de moins bons rendements et où le travail du sol n’est pas toujours aisé.
Ainsi, étant depuis longtemps dans une démarche propice à la biodiversité, les associés viennent, tout naturellement, de passer en agriculture biologique.
Céline Fricotté